Drive-Away Dolls
2023 Focus Features. LLC.

Le cinéma des frères Coen continue encore et toujours de faire des émules.

Cet article a initialement été publié au sein du nouveau numéro de Première (n°550 avec S.O.S. Fantômes : La Menace de glace en couverture). Nous le partageons en ligne, maintenant que Drive-Away Dolls est sorti au cinéma.

Point météo cinéphile : la sortie d’une poignée de films et séries « à la frères Coen » (ou « coeneries », comme on les appelle affectueusement) suffit-elle à justifier une page « microclimat » dans les news ? Après tout, des films inspirés par le style néo-noir et absurdo-minimaliste de Joel et Ethan, on en voit fleurir un peu tout le temps, sous toutes les latitudes. C’est devenu un genre en soi, et depuis longtemps. Quarante ans très exactement : on le sait parce que vient de paraître chez Criterion une édition 4K anniversaire de leur chef-d’œuvre inaugural Blood Simple, le film qui posait en 1984 les bases de leur grammaire.

Drive-Away Dolls
2023 Focus Features. LLC.

Le mythe des frangins naissait là : l’un réalisait, l’autre produisait, ils étaient deux et parlaient pourtant d’une seule et même voix. Leur style allait bientôt essaimer partout. Depuis qu’ils se sont séparés (après La Ballade de Buster Scruggs, en 2018), on pensait que leurs carrières solo allaient enfin nous permettre de mieux savoir qui était qui entre Joel et Ethan. Le premier a tourné une histoire d’amour et de meurtres avec Frances McDormand (très Blood Simple, donc), mais adapté de Shakespeare, pour changer (The Tragedy of Macbeth). La deuxième tente aujourd’hui de reproduire les figures imposées du coenisme dans le road-movie lesbien Drive-Away Dolls. Mais tout (le filmage cartoon, les accents péquenauds, les persos nigauds…) paraît vieillot et laborieux. Comme si Ethan ne savait plus parler le Coen.

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Le fait qu’un mauvais Coen sorte au cinéma n’est en soi pas très grave, ce ne sera pas la première fois. Ce qui l’est plus, c’est que la cata Drive-Away Dolls intervient peu de temps après la fin de la cinquième saison de Fargo, l’anthologie télé inspirée du chef-d’œuvre coenien sorti en 1996. Après une saison 4 en forme d’impasse, épuisante, saturée de personnages et d’effets de signature, Noah Hawley a eu la bonne idée de revenir à l’essence de Fargo, réexaminant le film originel à la loupe pour y questionner une sorte d’angle mort (le personnage de la femme kidnappée de William H. Macy), duquel repartir pour broder 10 heures de télé foisonnantes, fonctionnant comme un instantané d’une Amérique en plein délire sécessionniste post-Trump – la preuve que les dispositifs coeniens, aussi épurés soient-ils, sont peut-être bien en réalité inépuisables.

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FX

Ce que suggère aussi LaRoy, premier long de Shane Atkinson, Grand Prix du dernier festival de Deauville en salles le 17 avril, sur un cocu texan sans qualité, qui va se retrouver pris dans un engrenage meurtrier sans retour… Un néo-Blood Simple, encore un, par un débutant doué qui a clairement choisi le Coen première langue à l’école de cinéma. Comment Joel et Ethan réagissent-ils à l’effervescence artistique de leur progéniture ? Et au crash de Drive-Away Dolls au box-office US ? Figurez-vous qu’ils viennent d’annoncer qu’ils allaient reformer leur duo. Avec un film « dans la veine de Blood Simple » ! Un retour aux sources pour réapprendre à parler leur langue maternelle. Ou fraternelle, en l’occurrence.


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