L'actrice redonne la parole à des victimes de violences sexuelles, dans une danse symbolique qui a conquis la Croisette, hier soir.
Si le tapis rouge de Furiosa était attendu comme un événement, avec sa pluie de stars (Anya Taylor-Joy, Chris Hemsworth, Greta Gerwig, Eva Green...) et l'attente générée par la claque prise il y a neuf ans, déjà à Cannes, devant Mad Max : Fury Road du même George Miller, l'image forte de la soirée fut finalement tout autre.
Peu après la montée des marches de l'équipe de ce préquel très réussi, Judith Godrèche est à son tour apparue sur le tapis rouge du Palais des festivals, pour défendre Moi aussi. Un court métrage d'une quinzaine de minutes dont le titre faisant écho à #MeToo n'a rien d'un hasard : il s'agit d'un manifeste de l'actrice pour redonner la parole aux victimes d'agressions sexuelles. Il a été projeté à deux reprises sur la Croisette le mercredi 15 mai 2024 : d'abord en ouverture d'Un Certain Regard, puis au Cinéma de la Plage.
Judith Godrèche, devenue l'emblème de la parole libérée, notamment grâce à son discours puissant lors des derniers César, a initié un geste fort : entourée de membres de son équipe, elle a masqué sa bouche de ses mains, pour dénoncer la parole trop longtemps entravée sur ces sujets. Un acte militant illustrant parfaitement sa démarche, elle qui a parlé sans détour des traumatismes dont elle a été victime dans son enfance, quand elle débutait dans le milieu du cinéma et se voyait manipulée par Benoît Jacquot et Jacques Doillon, dont elle a publiquement dénoncé les actes, et ce jusqu'au Sénat.
L'image forte du jour au @Festival_Cannes : Judith Godrèche a présenté son court-métrage "Moi aussi", qui met en scène 1000 victimes de violences sexuelles.
— france.tv cinéma (@francetvcinema) May 15, 2024
📺 Ce sera à découvrir le samedi 25 mai sur Culturebox et https://t.co/ccAuse55mG. #Cannes2024 pic.twitter.com/j2llTAmR4E
Développant le travail déjà initié dans sa série d'Arte Icon of French Cinema, elle a de nouveau engagé sa fille, Tess Barthélemy, pour déambuler au sein d'une foule. On comprend que les nombreuses femmes qui l'entourent, et quelques hommes aussi, ont tous été personnellement traumatisés par des actes de violences sexuelles. D'abord hésitants, leurs gestes s'affirment, s'unissent pour former une danse commune.
L'actrice et réalisatrice a donc choisi la métaphore pour faire passer son message, embauchant près d'un millier de personnes le temps d'une journée de tournage à Paris, qui l'ont contactée suite à son témoignage sur la scène de la dernière cérémonie des César.
Souvenez-vous, le 23 février dernier, elle disait haut et fort : "Depuis quelque temps, je parle, mais je ne vous entends pas." Puis elle évoquait, déjà, cette idée de foule. "Après tout, moi aussi, je suis une foule. Une foule face à vous. Une foule qui vous regarde dans les yeux." Est-ce cette réflexion dite devant un public de stars qui lui a donné l'idée de ce court métrage ?
Judith Godrèche a proposé des mesures contre les violences sexuelles au cinéma devant le SénatDans Moi aussi, elle passe par le corps, le mouvement, pour montrer qu'une guérison est possible, et dire aux victimes qu'elles ne sont pas seules, qu'elles peuvent s'unir pour s'entraider. A la toute fin de son court-métrage, en voix-off, Judith rappelle des chiffres tristement édifiants : au cours de sa vie, une femme sur quatre sera victime de violences sexuelles, et un homme sur quatorze. Chaque année, en France, 160 000 enfants subissent des agressions de ce type. 81% des victimes le sont avant leur majorité.
A la fin de ces deux projections de Moi aussi, Judith Godrèche a été longuement applaudie. Lors de celle, en accès libre, du Cinéma de la Plage, le public a repris son geste fort de la montée des marches, se masquant la bouche avec les mains en signe de rebellion pour dénoncer la parole entravée. Un moment marquant de cette 77e édition du festival de Cannes, qui se déroulera jusqu'au 25 mai, date à laquelle Moi aussi sera proposé gratuitement sur le site de France.TV.
Ovation for Judith Godreche, whose ME TOO (MOI AUSSI), highlighting the voices of those affected by sexual violence speaking their truths, played as opening film at the #Cannes2024 Un Certain Regard premiere pic.twitter.com/phwqKfB5pO
— Jason Gorber (@filmfest_ca) May 15, 2024
MOI AUSSI, le court-métrage de Judith Godrèche, a été projeté ce soir au cinéma de la plage à #Cannes2024. L’émotion a pris le public quand la voix de l’actrice et réalisatrice a résonné. pic.twitter.com/RjAgdeNpuV
— We Love Cinema (@welovecinemafr) May 15, 2024
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