Tron : Ares
Disney

Malgré ses qualités visuelles, et une bande-son géniale signée Nine Inch Nails, le nouveau volet de la franchise manque cruellement d’humanité.

La saga Tron est restée 28 ans au placard avant que Joseph Kosinski ne signe Tron : L’héritage, une suite sans intérêt dont l’histoire n’aura retenu que la BO de Daft Punk. Ce ne fut pas un flop pour autant, et même un succès modeste, avec plus de 400 millions de dollars de recettes dans le monde pour 170 millions de budget. Juste assez pour justifier de prolonger la franchise, avec un troisième film mis en chantier dès 2011 par Disney, mais qui aura lui aussi connu une longue gestation. Kosinski est encore en coulisses comme producteur, laissant la mise en scène à Joachim Rønning, le réalisateur de Pirate des Caraïbes 5 et Maléfique 2

Nous revoilà donc plongés dans le monde de Tron. La société ENCOM, fondée par Kevin Flynn (Jeff Bridges), cartonne toujours dans les jeux vidéo. Elle est désormais dirigée par Eve Keem (Greta Lee), une humaniste travaillant en parallèle à sauver le monde grâce aux nouvelles technologies. Son grand rival, Julian Dillinger (Evan Peters), le petit-fils de l’antagoniste du Tron de 1982, a lui des ambitions moins nobles. Il veut donner vie à son programme informatique de défense, Ares (Jared Leto), pour en faire un super soldat à la RoboCop. Mais les deux font face au même problème, leurs créations, générées par des super imprimantes laser, s’auto-détruisent au bout de 29 minutes. 

Quand Eve Keem trouve la solution, Julian Dillinger ne tarde pas à envoyer Ares à ses trousses. Spoiler : il va aussitôt s’éprendre de sa cible et se montrer plus humain que son créateur (c’était dans les bandes-annonces). Bientôt, il se met à philosopher et à déclarer son amour pour Depeche Mode et l’esthétique des années 80, avec en point culminant sa rencontre "collector" avec Flynn/Bridges, petit intermède rétro et fan service lui aussi teasé dans les trailers. Pas déshonorant mais un peu vain. 

 

Tron : Ares
Disney

C’est le principal problème de ce nouveau Tron, dont le scénario trop basique et simpliste peine à impliquer le spectateur. On se rattrape sur les visuels, assez impressionnants. Il faut saluer le travail du décorateur Darren Gilford, qui avait déjà oeuvré sur Tron : L’héritage, et le boulot sur les effets spéciaux, notamment assurés par Industrial Light & Magic (ILM). Autre bon point, quelques scènes d’action sacrément bien foutues. Et magnifiées par la musique de Nine Inch Nails (Trent Reznor et Atticus Ross), modèle de techno indus qui rehausse chaque séquence du film. 

Tout ce beau verni ne peut malheureusement pas sauver Tron : Ares. Aussi à cause de son casting mal fagoté. Gillian Anderson ne sait pas ce qu’elle fait là, Jodie-Turner Smith n’a rien à jourt en robot implacable, Evan Peters en fait des caisses (pensez à Gary Oldman chez Besson) et Jared Leto, guère plus inspiré que dans Morbius, peine à donner de l’humanité à son personnage, faisant tomber à plat le coeur même du film. Avant que les IA remplacent les acteurs, ce sont encore les acteurs qui jouent des IA. Mais la plus-value n’est ici pas très évidente. 

Et que dire de la morale du film ? Au terme de cet affrontement entre la "good tech" et la "bad tech", on nous ressert cette idée dépassée qui voudrait que l’innovation (ici l’intelligence artificielle) finira un jour par régler tous les problèmes qu’elle a causé à notre planète. Un scientisme un peu à côté de la plaque à l’heure où l’on investit des centaines de milliards dans des data centers pour faire tourner ChatGPT…