Terminator Dark Fate Linda Hamilton
2019 Twentieth Century Fox

Divertissement plus qu’honnête, le sixième Terminator, mené par Linda Hamilton et Mackenzie Davis, déploie beaucoup d’efforts pour ressembler au Jugement dernier (le film, pas l’événement).

En ce dimanche soir, France 2 proposera la première diffusion en clair de Terminator : Dark Fate. Voici la critique de Première, publiée lors de sa sortie au cinéma, en octobre 2019.

Sur le tournage de Terminator 6 -qui ne s’appelait encore Dark Fate- l’été 2018, Tim Miller avait promis aux journalistes de passage tout sauf un film chiant. De ce point de vue-là, c’est une promesse tenue. On ne s’ennuie guère devant Dark Fate. Quasiment dénué de temps morts, le film est truffé de jolies scènes d’action, avec de bonnes trouvailles. C’est en tous cas l’envie de cinéma qui anime le réalisateur de Deadpool.

Depuis que Le Jugement dernier a fait souffler une onde de choc industrielle dans l’univers des blockbusters, chaque film Terminator avait le mérite de tenter quelque chose de différent : le piratage de l’héritage cameronien pour Le Soulèvement des machines avec son twist à la Twilight Zone, le film 100% Résistance du futur pour Renaissance, et le vrai-faux reboot tiédasse, incompréhensible et inachevé avec Genisys. Le point commun de ces tentatives de reprise -démenties systématiquement par un score critique et public faiblard- à chaque fois, c’était l’aval de James Cameron en personne : Saint James jurait que ce Terminator-là allait être le bon, croix de bois croix de fer. Dark Fate n’échappe pas à la règle (le marketing veut nous faire croire que les films précédents n’ont même jamais existé), et insiste sur son statut de suite directe de Terminator 2 : Le jugement dernier.

Terminator 2 : l'histoire secrète d'une des meilleures suites de film

Le temps de son prologue -irréprochable techniquement mais très discutable narrativement et moralement- Dark Fate veut faire table rase du passé et commencer sur de bonnes bases. Ce qui, de toute évidence, signifie copier la recette de Terminator 2 presque scène par scène. Et cette méthode provoque inévitablement l’irrésistible envie de remater Le Jugement dernier. Dark Fate met donc en scène Grace, une guerrière solitaire (Mackenzie Davis, tout simplement exceptionnelle) venue du futur pour protéger Dani (Natalia Reyes, vue dans Les Oiseaux de passage), une jeune Mexicaine traquée on ne sait pourquoi par un terminator Rev-9 (Gabriel Luna, ex-Ghost Rider à la télé) surgi de l’avenir. Et voilà que Sarah Connor se mêle du combat, armée jusqu’aux dents. Outre les scènes de baston opus citées, c’est dans cette jolie dynamique que réside l’intérêt de Dark Fate, qui met en scène sa bataille pour le futur autour de la frontière américano-mexicaine sans mettre son contexte politique sous le tapis, ce qui est bienvenu (les migrants sont parqués par les flics comme du bétail dans des cages). Le trio Natalia Reyes-Mackenzie Davis-Linda Hamilton fonctionne du tonnerre. Grace, soldate génétiquement modifiée mais bien limitée face au Terminator, doit recharger ses accus régulièrement à coups de drogues diverses sous peine de tomber en carafe (une belle idée un peu sous-exploitée), est un très joli personnage. C’est cependant la présence de Linda Hamilton, qui assume son look badass, son treillis, son arsenal ambulant et sa voix de cendrier avec un aplomb dingue, qui est bien suffisante pour recommander le film.

Ah, au fait, et Schwarzenegger ? On ne spoilera pas les raisons plus ou moins justifiées de son comeback plus ou moins réussi dans le film, mais sachez que son apparition quand même réjouissante a fait un tabac lors de la projection aux journalistes. Même si, au fond, sa présence cristallise les problèmes d’écriture d’un film qui est loin, très loin d’avoir la fluidité parfaite du Jugement dernier. Les trous dans le script sautent souvent aux yeux entre deux scènes de bagarre. Dark Fate ne lésine pas sur les efforts pour y ressembler le plus possible. C’est à la fois louable et vain. Mais l’original de 1991 reste -et encore pour très longtemps, apparemment- le mètre étalon de la suite parfaite. Une suite meilleure que l’original à tous points de vue, mais sans jamais mépriser ou renier le film dont il est issu. Le paysage hollywoodien contemporain nous rappelle tous les mois que la leçon a été bien mal retenue. Dark Fate n’est pas du tout un mauvais élève et c’est déjà beaucoup.


Terminator Dark Fate : Tim Miller explique le rôle de John Connor