DR

Sans livre de George RR Martin sur lequel s'appuyer, Weiss et Benioff ont semblé libérés. Comme si la série avait enfin pris son envol.

"La saison 6 est la meilleure qu'on ait jamais faite"tambourinaient fièrement les showrunners de Game of Thrones, au printemps dernier, en pleine tournée promotionnelle. À l'époque, on s'était (un peu) moqué d'eux et de cette énième proclamation grandiloquente. Mea Culpa. Ils disaient vrai. Attention spoilers !

Game of Thrones : tous les grands enjeux de la saison 7

La série HBO vient de boucler sa saison la plus spectaculaire, la plus riche, la plus intense, la plus excitante. Sans conteste, la meilleure saison depuis son lancement, en 2011. D'abord et surtout parce qu'elle fut la plus rythmée de toute. Chaque semaine, les épisodes ont livré surprises, action et révélations. Le contraste avec les décevantes saisons 4 et 5 a rendu ce sentiment encore plus évident. Souvenez-vous de l'interminable exil de Tyrion, de l'ennuyeuse promenade d'Arya et Clegane, de la longue séquence au Manoir de Craster, de l'exténuante rébellion des Fils de la Harpie ou du temps qu'il a fallu attendre, pour que Stannis se décide enfin à attaquer Ramsay (une saison entière !). Ces dernières années, on a quand même (trop) souvent regardé notre montre devant Game of Thrones

DR

Mais avec la saison 6, on n'a tout simplement pas vu le temps passer. C'est comme si la série avait enfin pu prendre son envol. Comme si les scénaristes avaient enfin pu balancer la sauce, sans avoir peur de manquer de respect à l'oeuvre monumentale de George RR Martin. Car oui, cette année, et pour la première fois, Game of Thrones ne s'est pas appuyée sur un tome de la saga A Song of Ice and Fire (qu'elle a dépassé en 2015). Certes, D.B. Weiss et David Benioff n'ont pas inventé leur propre histoire parallèle (ils se sont entretenus avec le romancier à maintes reprises pour écrire les nouveaux épisodes). Mais leur narration s'est totalement libérée. Ils ont pu faire avancer les intrigues à leur guise, à leur rythme. Un rythme manifestement plus approprié au support télévisuel. À croire que les showrunners étaient bridés par le poids des bouquins les années passées.

Pendant trois mois, Game of Thrones a ainsi livré, chaque semaine, une floppée de scènes à couper le souffle : la résurrection de Jon Snow, le collier magique de Melisandre, les passionnantes visions de Bran, les retrouvailles émouvantes de Jon et Sansa, les coups de force de Daenerys, la mort bouleversante d'Hodor, le retour du Limier... Une véritable frénésie de climax, qui est allée crescendo, atteignant son apothéose avec la gigantesque bataille de l'épisode 9 et ce final explosif, dopé aux morts et aux révélations.

Game of Thrones, saison 6 : le plus beau final

Au-delà du travail d'écriture, c'est toute la production qui est montée en gamme cette année. La réalisation, notamment, a pris une toute autre ampleur. Jack Bender (un ancien de Lost) a fait des merveilles sur "The Door" (l'épisode 5). Mark Mylod nous a offert un superbe siège de Vivesaigues (épisodes 7 et 8). Et bien sûr, Miguel Sapochnik (à qui l'on doit déjà l'époustouflant"Hardhome" de la saison 5) a bluffé son monde avec la "bataille des bâtards", signant une scène de guerre d'anthologie, comme on n'en avait encore jamais vue à la télévision. Même la musique a semblé mieux utilisée dans cette saison 6, à l'image de la vengeance finale de Cersei, magnifiée par la composition enivrante de Ramin Djawad, "Light of the Seven".

DR

Évidemment, on peut toujours reprocher à Weiss et Benioff d'avoir voulu en faire trop. D'avoir manqué de subtilité, en fourguant du "fan service" (vous voulez voir Ramsay mourir dans d'atroces souffrances ? Pas de problème !). Même d'avoir oublié par moment la griffe Game of Thrones, ses joutes verbales, sa sophistication, sa cynique atmosphère politique (qui a franchement disparu, avouons-le). Et puis à force de vouloir booster le rythme, les scénaristes ont curieusement détraqué la chronologie narrative, donnant parfois l'impression que certains personnages peuvent se téléporter (comment expliquer que Varys puisse aller à Dorne et revenir à Meereen en un clin d'oeil, alors qu'il a fallu 10 épisodes à Sam et Gilly, pour se rendre à la Citadelle ?).

DR

C'est certain, la saison 6 de Game of Thrones n'est pas exempte de défaut. On peut ainsi arguer que la saison 1, plus raffinée, a encore son mot à dire. Ou que la saison 3, plus équilibrée, ne doit pas être oubliée. Qu'importe. Au bout du compte, la série n'a jamais paru aussi vivante que cette année. Pour la première fois depuis longtemps, on attend la suite avec impatience. Seul problème : il va être difficile de faire plus fort maintenant. Avec cette sixième saison dantesque, Game of Thrones pourrait bien avoir atteint son apogée.