Poet

Deux questions imprègnent le nouveau film du kazakh Darezhan Omirbayev (dont on était sans nouvelles depuis L’Etudiant en 2014). Que peut la poésie dans l’ère de l’ultra consommation ? Et quelle place lui donner ? Certains prétendent que l’inutilité marchande des vers est un privilège absurde des nantis. D’autres (à commencer par le protagoniste, Didar, un sage employé d’un petit journal, fasciné par la prose de Makhambet Utemisov, un poète kazakh du XIXème siècle) lui vouent un culte, gratuit et noble. Par ses plans fixes contemplatifs et la lenteur de la mise en scène, le film (sélectionné à la Berlinale de 2022 dans la section Forum) échappe au didactisme. Poet prend parti certes (pour la poésie). Mais plutôt que de railler prétentieusement les smartphones et les centres commerciaux apathiques, il regarde le beau et le bon, sans cynisme.  

Estelle Aubin