Toutes les critiques de Midnight Traveler

Les critiques de Première

  1. Première
    par Thierry Chèze

    Tout commence en 2015. Le réalisateur afghan Hassan Fazili signe Peace in Aghanistan, le portrait d’un commandant taliban qui a choisi d’arrêter de rendre les armes. Une provocation pour ses anciens camarades. Peu après sa diffusion télé, ce gradé est assassiné et la tête de Fazili mise à prix. Pour survivre, une seule option : fuir son pays avec sa femme cinéaste (Fatima Hussaini) et leurs deux enfants. Midnight traveler raconte ce périple de trois ans vers l’Europe occidentale. Un documentaire à la première personne du pluriel puisque filmé par ses protagonistes au smartphone. Pour témoigner de l’enfer du quotidien, entre brimades, intimidations, camps aux conditions insalubres, démarches administratives kafkaïennes... Pour essayer de rendre la vie aussi normale que possible à leurs deux enfants. Mais aussi pour se sentir vivant, en continuant à exercer leur métier. Le résultat est passionnant. Parce que ces cinéastes ne se censurent pas plus qu’ils ne se font de cadeaux, comme dans cette scène où agacée par une remarque qu’elle juge inappropriée de Hassan sur une ado, Fatima le lui fait remarquer vertement et insiste pour qu’il cesse de filmer. Parvenir à un film de 90 minutes avec autant de rushes et un récit aussi douloureusement intime tient de la gageure. Hassan Fazili y parvient en étant capable de questionner avec sa femme leur position d’artiste dans ce capharnaüm et d’offrir des moments de poésie avec quelques flocons de neige saisis au vol ou de joie avec sa fille dansant sur They don’t care about us. Comme pour refuser avant tout de s’apitoyer sur son sort.