Toutes les critiques de Master and Commander : de l'autre côté du monde

Les critiques de Première

  1. Première
    par Christophe Narbonne

    Ceux qui attendent de Master and commander un blockbuster spectaculaire vont être servis. (...) La grosse logistique hollywoodienne est bien au rendez-vous. ceux qui attendent un minimum de profondeur -psychologique, pas abyssale- en auront aussi pour leur argent.

  2. Première
    par Jean-François Morisse

    Ils sont rares ces films qui résonnent comme une ode à la mer. Master and Commander peut se targuer d’être de ceux-là. La mer y est filmée de façon experte, magistrale et la performance de Peter Weir (on lui doit Le cercle des Poètes disparus, Truman Show ou l’excellent Etat Second) surprend agréablement. C’est avant tout un spectacle, l’intrigue étant en fait assez secondaire voire légère mais aussi un voyage dont on ressort enthousiaste et étonné ce qui suffit en fin de compte pleinement.

Les critiques de la Presse

  1. Fluctuat

    Master and commander est un film d'un autre temps. Davantage qu'un retour en arrière ou l'éventuel maniérisme d'un genre que l'on voudrait faire renaître, c'est du cinéma qui nous vient d'ailleurs, non d'Hollywood où s'écrit chaque jour l'Histoire de l'Amérique et désormais du monde, mais presque d'un lointain souvenir. Plus qu'un fracassant film d'aventures tel que l'on n'espérait plus en revoir, c'est une immersion sauvage et vivante au coeur de la bataille, celle de la lutte des hommes à la conquête du monde, des idées, de la liberté.
    Reprenant avec quelques libertés l'un des romans de la saga maritime de Patrick O Brian, Master and commander - De l'autre côté du monde décrit le combat acharné, en 1805, entre un navire de la Royale Navy dirigé de main de maître pas le capitaine Jack Aubrey (Russell Crowe) face à l'Acheron, frégate de corsaires français à la botte de l'armée napoléonienne. Le changement de nationalité de l'ennemi (américain dans le roman, et donc français à l'écran), s'il paraît à peu près évident dans la logique de production d'un film soutenu par trois grands studios hollywoodiens, ne ruine en rien la véracité historique et l'extrême richesse de ce récit épique, valeureux, et d'une force inouïe.Film d'une rigueur néanmoins défaite de la plupart des actuels archétypes de studio, Master and commander illustre la chasse implacable d'un homme qui, de manière quasi obsessionnelle, n'hésite pas à mettre en danger son navire et ses hommes pour l'honneur et la défaite de l'ennemi. Plus qu'une quête personnelle, ce qui est en question est une vision du monde, entre une peinture de l'homme face aux éléments et - au-delà de la conquête et des querelles - une représentation de l'Histoire, arc-boutée entre superstitions et pensées issues des Lumières. Par le détour de cette grande saga maritime, Weir invite à une réflexion sur la filiation et la dette. En miroir d'une histoire qu'on enterre festivement chaque jour, Master and commander nous ramène violemment en arrière sans ambages. Ici les sergents sont encore des enfants parce qu'ils sont fils d'amiraux ou autres capitaines. La hiérarchie est monarchique, nette, coupante et peu discutable. Pour que le peuple marche avec confiance, il lui faut lire dans le regard de son chef une foi inébranlable, quitte à le suivre jusqu'à la mort, dans le sang des armes blanches et boulets de canon. Film rude où l'éducation se fait le sabre au poing plus que le calame à la main, il nous délivre sans pointillés et avec passion la folie et la grandeur des hommes dans ses luttes acharnées.Entre des batailles saisissantes où rarement ont été filmés avec autant de force les fracas destructeurs et massifs de l'impact d'un obus ou d'un abordage, et une plage calme recelant la plénitude du précieux plaisir de la découverte, se dévoile un monde d'hommes virils baigné d'une métaphysique largement inspirée d'Herman Melville. Le beau personnage du chirurgien Stephen Maturin (Paul Bettany), avec qui Jack Aubrey partage les trésors de la musique, relaie les idées d'une science encore balbutiante et permet d'intégrer au récit, avec finesse, les bouleversements latents qui alors s'empreignent de l'héritage de la fin du XVIIIème.Fresque réaliste où aucun détail n'échappe à l'oeil de Peter Weir, le film dégage, dans un style d'incorruptible où la mise en scène et l'esthétique n'ont pas lésiné sur la dépense (luxe des décors, costumes, etc), l'inoubliable parfum d'un temps où l'exploration du monde conservait encore sa part de secret. Spectaculaire, passionnant, saisissant, Master and commander est une oeuvre aussi inattendu qu'inespéré. Le talent du cinéaste australien, dont il pouvait paraître difficile d'attendre de nouveau quelque chose après qu'il eut signé une ineptie telle que Le cercle des poètes disparus (célébration douteuse et naïve de la poésie comme méthode d'épanouissement et voie vers la liberté servie par le mielleux et dégoulinant Robin Williams), est étonnant. Autant dans d'époustouflantes scènes d'actions qui préfèrent privilégier l'idée de la violence au combat plutôt que sa lisibilité en fragmentant l'espace, que dans de sublime scènes extérieures, qui captent l'horizon et les paysages comme autant de plans définissant le coeur des hommes, où la nature est la compagne indomptable dans laquelle ils se confondent, Weir fait preuve d'une lucidité et d'un regard d'esthète. Jouant sur cette dualité toute maritime entre le calme et la tempête, tout en multipliant et déplaçant les motifs, le rythme que procure le film est à l'image de ce parcours dialectique. Entre confusion et contemplation, action et inaction, oubli nécessité par l'urgence de la survie et ennui, entre la mer et la terre, les anglais et les français, le capitaine (homme d'action et fin stratège) et le chirurgien (homme de science et philosophe), tout y est en opposition, et donc profondément humain.Master and commander est l'oeuvre d'un homme qui aime regarder vers l'horizon et tente de se souvenir de ce qu'était un monde qui croyait bien au-delà de lui-même. Un film qui ne s'accommode pas de la limite et tend au dépassement, qui veut croire, encore, à tout prix. Il nous dit que Dieu n'est peut-être pas mort, pas tout de suite, que tant qu'il y aura du cinéma, il y aura toujours la possibilité d'en évoquer la mémoire, même par mille et un détours. Qu'il est toujours possible de transmettre à ses enfants nos vieux rêves, nos récits et de les vivre, même si ce n'est plus qu'en images.Master and commander : de l'autre côté du monde
    Un film de Peter Weir
    D'après un roman de Patrick O Brian.
    Scénario de Peter Weir et John Collee.
    Avec : Russell Crowe, Paul Bettany, James D'Arcy, Edward Woodball, Chris Larkin.
    Sortie nationale le 31 décembre 2003
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    - Le site officiel du film