Toutes les critiques de Les amours d'Astrée et de Céladon

Les critiques de Première

  1. Première
    par Olivier de Bruyn

    Aïe ! On doit à Eric Rohmer, depuis un demi-siècle, un nombre conséquent de fictions majeures dopées à la subtilité psychologico-morale. Amoureux érudit de la culture nationale, le cinéaste adapte aujourd'hui Honoré d'Urfé et signe une fiction désarmante qui respecte les délires bucoliques du littérateur du XVIIe siècle.Certaines scènes serviraient d'excellents arguments pour un film X campagnard et arrachent in extremis un sourire. Mais tout ceci est-il volontaire? Il y a peu, l'immense Jacques Rivette se prenait un tantinet les pieds dans le tapis académique avec sa nouvelle adaptation balzacienne. Rohmer l'imite, en pire.

Les critiques de la Presse

  1. Télérama
    par Louis Guichard

    Il faut remonter à La Collectionneuse (1967) pour trouver chez Rohmer un tel rayonnement du corps. Et c’est la première fois dans son œuvre que la sensualité déborde à ce point le verbe et la volonté, selon un crescendo épidermique qui dit à la fois le triomphe des sentiments et leur défaite.

  2. Le Monde
    par Isabelle Regnier

    A 87 ans, Rohmer prouve qu'il n'a rien cédé de son amour pour l'idéal et signe un film inattendu, mais plein d'échos de son oeuvre passée, et tout entier vibrant d'un érotisme troublant. Une ode à l'art, et à la vie.

  3. Elle
    par Florence Ben Sadoun

    Etes-vous prêts à entrer dans un conte de fées magiquement mis en images par le maître conteur du cinéma français? Il faut se laisser faire par l'écriture si particulière d'Eric Rohmer qui nous emmène dans une forêt merveilleuse au temps des druides, où la si jolie bergère Astrée et le berger Céladon au visage d'ange s'aiment d'un amour pur.

  4. Paris Match
    par Christine Haas

    Entre druides, nymphes séductrices et pâtres grecs, Eric Rohmer livre une adaptation enchantée de la chanson de geste d'Honoré d'Urfé, où il a trouvé matière à disserter sur la fidélité. Sur un rythme lent, avec beaucoup d'élégance, il explore l'érotisme subtil de cette folle histoire d'amour et projette ses propres préoccupations éthiques.

  5. Télérama
    par Aurélien Ferenczi

    Comme tous les vieux profs de lettres classiques, Eric Rohmer a des marottes : celle, par exemple, de réunir chaque année les plus jolis élèves d’hypokhâgne pour une représentation dans le préau, immortalisée sur film.

  6. Le JDD
    par Danielle Attali

    Rohmer, envers qui on éprouve une certaine tendresse, met en scène un roman d'Urfé qui aurait dû rester dans l'oubli. Un film étrange, anachronique et surréaliste.

  7. Fluctuat

    S'il est toujours difficile de s'emparer de l'actualité d'Eric Rohmer, il fallait pourtant bien nous plier au jeu pour Les Amours d'Astrée et de Céladon. Une partie pas gagnée mais qui nous faire dire malgré tout la beauté unique d'une oeuvre qui dans le paysage de nos sorties hebdomadaires risque de s'imprimer durablement.
    - Exprimez-vous sur le forum Les Amours d'Astrée et de CéladonEcrire sur l'actualité d'Eric Rohmer n'est pas chose facile. On demanderait presque un temps mort, de ne parler du film que plus tard, après un moment de réflexion ou d'agencement des idées. Il faut pourtant aussi savoir se plier à la contrainte, tenter une réaction, oser se confronter sans recul, dans l'immédiateté la plus totale. Réagir ainsi à un nouveau film d'Eric Rohmer permet peut-être d'en dire autre chose que ce que le temps de l'analyse autorise. On se resitue à valeur égale de ce que l'actualité, chaque semaine, nous débite comme nombre invraisemblable de films. Paysage dans lequel, ce dernier Rohmer, Les amours d'Astrée et de Céladon, fait figure de comète, pas même d'événement, plutôt d'aberration, au sens non péjoratif du terme. Car moins qu'inattendue, cette actualité rohmérienne s'impose par sa beauté et sa singularité inouïes, elle ne ressemble à rien d'autre qu'à un film de Rohmer tout en jurant incroyablement avec ces voisins en salles au même moment.Il faudra d'abord passer par-delà les a priori pour voir Les amours d'Astrée et de Céladon. Moins qu'une question d'acclimatation, il faut en accepter la volonté, le parti pris d'une richesse incommensurable. Celui d'un dépouillement et d'une certaine approche du réalisme qui a toujours été au coeur du système de Rohmer. Adapté de l'Astrée d'Honoré d'Urfé (1567-1625), le film narre, à l'époque gauloise, les amours compliquées entre la bergère Astrée et le pâtre Céladon, qui par la force d'un malentendu et de la jalousie sont séparés. L'une croyant l'autre mort noyé, suicidé après que les mots de sa belle l'aient poussé dans la rivière. L'un se terrant caché dans la forêt, n'osant revoir sa bien aimée pour respecter sa parole, un serment lancé après que celle-ci se crut trahie par son amant. Céladon est recueilli par des nymphes et un druide, qui après de longs entretiens l'aident à retrouver sa belle à renfort de stratagèmes qui iront jusqu'à le faire passer pour une femme. Moment intense et clé d'une scène finale où Rohmer bouleverse les conventions inventées par Urfé.Il faudrait évidemment plus que quelques lignes pour résumer le récit, ce qui donnerait lieu à une longue description du film que nous voulons éviter pour en garder un peu le secret et la teneur. Si Les amours d'Astrée et de Céladon est un ravissement, c'est d'abord parce qu'il enchevêtre de façon aussi limpide que complexe la nature de son sujet et la manière de le filmer. Dans la carrière d'Eric Rohmer, les adaptations historiques ne manquent pas (Perceval le Gallois, L'Anglaise et le duc, Triple agent). Sauf qu'il y a toujours eu chez lui une idée de la reconstitution, une idée voulant que puisque la réalité photographique d'une époque ne peut être reproduite, il faut en passer par un travestissement situant sa représentation à un autre niveau que celui de la pure vraisemblance. Ce qui, au fond, même dans ses films contemporains, a toujours été le cas. Le cinéma d'Eric Rohmer, qu'il nous parle du présent ou du passé, n'est jamais dans l'actualité, il a toujours un point de vue décalé qui lui donne sa valeur. Ainsi, Les amours d'Astrée et Céladon, où des acteurs évoluent en tuniques flambantes neuves de réalisme dans de sublimes décors bucoliques et verdoyants, tout en récitant leur texte avec une tonalité théâtrale, ne change rien au système rohmérien. Il s'agit de prendre la réalité d'une époque pour construire une théorie des choses par le moyen des dialogues.Cette théorie, ici, se construit autour de l'amour, bien sûr, mais dans une perspective proprement métaphysique et artistique. Le film s'organisant comme un habile procédé discursif où la fiction est ponctuellement remise en perspective par rapport à l'image, la peinture en particulier. En effet, Rohmer, qui a toujours dans ses films disséminés quelques tableaux, ouvre avec Les amours d'Astrée et de Céladon une nouvelle voie, plus explicite peut-être, à son cinéma. Tout au long du film, des peintures et des sculptures sont montrées ou citées (nicolas poussin notamment). L'aspect pictural du film lui-même, qui n'a jamais été aussi ouvertement perceptible chez Rohmer (certains plans sont de purs tableaux d'une beauté souveraine, notamment à la fin avec un sein dévoilé), permettant ainsi de contribuer à la construction du récit qui fait évoluer l'histoire dans un entrelacement constant entre l'image et son commentaire (de manière presque pédagogique). Outre l'image, dont Rohmer pervertit joyeusement les conventions du réalisme en faisant du portrait d'Astrée portée par Céladon une photographie (car on doute d'une peinture aussi réelle), le film se parsème de considérations philosophiques sur l'amour. D'un côté l'absolu, la pureté infinie des amants, de l'autre profane, presque païenne. A ce discours, s'ajoute celui sur la nature des dieux, ou de Dieu, et de leurs symboles.Bien sûr il y a d'autres dimensions à atteindre devant Les amours d'Astrée et de Céladon, ce film où le simple bruissement du vent dans les feuilles d'un arbre confine à une beauté extatique inégalée. On pourrait dire par exemple que le film s'invente par un savant suspens où les attentes les plus classiques se renouvèlent au prix d'une approche épurée mais d'une densité folle. Il faudrait aussi tout un livre pour parler de chacune de ses parties construites au fil d'une dialectique d'une parfaite homogénéité. Ou encore, dire combien la beauté d'Astrée (Stéphanie Crayencour) et Céladon (Andy Gillet) est si stupéfiante que ses acteurs nous transpercent en devenant des modèles aussi intemporels que les toiles qui parsèment l'histoire de l'art. C'est que Rohmer signe là une oeuvre d'une jeunesse sidérante, d'une vitalité et d'une élégance rares autant qu'uniques. Les amours d'Astrée et de Céladon transporte un moment de littérature dans notre présent et provoque un électrochoc vertigineux sur notre imaginaire. Il réussit le pari insensé de révéler le passé par son présent tout en étant nulle part ailleurs qu'au coeur des choses. On n'est pas prêt de s'en remettre.Les Amours d'Astrée et de Céladon
    De Eric Rohmer
    Avec Stéphanie Crayencour, Andy Gillet, Cécile Cassel
    Sortie en salles le 5 septembre 2007Illus. © Rezo Films
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