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Les critiques de Première

  1. Première
    par Gael Golhen

    L’histoire vraie de Yoann Barbereau est une épopée folle qui, de cellules russes crasseuses aux forêts estoniennes en passant par les dorures de l’ambassade de France à Moscou s’étire sur des milliers de kilomètres. Un soir de février 2015, ce directeur de l’Alliance Française d’Irkoustk est embarqué par le FSB. On l’accuse (à tort) d’avoir diffusé des images pédopornographiques. Bien décidé à ne pas croupir en taule, Barbereau tente de quitter la Russie par ses propres moyens. L’identité trouble, l’injustice, la survie et l’aventure sont autant de thèmes qui nourrissent les thrillers d’action élégants de Jérôme Salle (depuis Anthonny Zimmer jusqu’à Largo Winch). Cette cavale homérique légèrement remaniée était un exercice taillé sur mesure. Etonnamment, le cinéaste fait preuve d’extrême retenue, et privilégie une mise en scène minimaliste, pour se concentrer sur les émotions du protagoniste. Le spectateur est collé au héros dans le coffre d’une bagnole ou dans une chambre aveugle de la banlieue moscovite, scotché à ses baskets dans un supermarché ou pendant une course-poursuite à Moscou. Le film ne révolutionne pas le genre et s’avère distrayant, haletant parfois. Mais dans ce voyage au bout de l’absurde, en allégorie de la vertu traquée, Gilles Lellouche compose un de ces personnages qu’il aime tant. Au cinéma, il est fait pour avoir des ennuis. Sa physionomie inquiète et ses ressources physiques en font une victime idéale, capable de tout encaisser pour mieux triompher. Ici, il se transforme sous nos yeux et passe de l’intello sympathique à la machine de survie, quelque part entre Edmond Dantès (la soif de vengeance en moins) et Jason Bourne.