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Dans Histoires secrètes de la télé-réalité (diffusé le 5 septembre à 20h55), Canal+ enquête sur la genèse d’un genre qui a changé notre télévision. Retour sur la naissance d’un phénomène par Télé 7 jours.

A l’origine, la survie dans une île Il faut traverser la Manche pour retrouver l’inventeur du concept, Charlie Parsons. En 1988, ce Britannique produit un documentaire qui filme quatre individus vingt quatre heures sur vingt quatre pendant 10 jours sur une île coupée du monde. Le but : survivre. L’émission fait un sacré bide, son créateur décide d’en faire un jeu, "Survive" : seize anonymes passent des épreuves sur une île pendant 15 jours. Lors du conseil, chaque participant vote pour en éliminer un autre. Ça vous rappelle quelque chose ? Bref, c’est l’ancêtre de Koh-Lanta. Imaginée en 1994, l’émission est diffusée pour la première fois le 13 septembre 1997, sur la chaîne suédoise SVT. Un carton ! Les USA l’acquièrent, puis le Japon, l’Australie, l’Inde et la France.Big Brother, d’après une expérience scientifiqueVous souvenez-vous de Biosphère 2 ? En 1994, des chercheurs américains s’enferment dans une serre censée reconstituer l’environnement terrestre. De quoi titiller l’imagination des frères Römer, deux Néerlandais travaillant alors pour John de Mol, patron d’Endemol : "On pourrait peut-être en faire de la télé…" Les trois hommes élaborent le concept : dans une maison, des candidats enfermés, filmés et écoutés non-stop durant plusieurs semaines. Big Brother est né. Mais les chaînes sont tiraillées entre le côté révolutionnaire du projet et son aspect immoral. Une petite chaîne câblée des Pays-Bas, Veronica, ose le diffuser le 16 septembre 1999. Deux candidats partagent un moment d’intimité en direct et les audiences explosent. La part de marché passe de 6% à 75% ! Le format s’exporte dans le monde entier, avec plus de 70 millions de téléspectateurs en 2000-2001. Mais un pays fait de la résistance : la France.En France, la guerre des chaînesTrop sulfureux ! Ici, on ne veut pas de Big Brother. "Ce n’est pas la télévision telle que nous devons l’envisager," déclare Etienne Mougeotte, directeur de l’antenne de TF1, en mars 2000. Un pacte secret entre la Une et M6 est même conclu pour faire barrage à la télé réalité. Mais c’est une partie de poker menteur car, de son côté, M6 négocie déjà l’achat de Koh-Lanta. TF1 l’apprend, augmente la mise, et acquiert le format. Fin 2000, la six riposte, achetant une version édulcorée, sur le papier, de Big Brother, Loft Story, pour 11 millions d’euros. De quoi "casser le deal" selon Patrick Le Lay, alors PDG de TF1. Mais les résultats sont là : 6 millions de téléspectateurs chaque jour, 8 millions pour la finale et plus de 46 millions d’euros récoltés par M6 ! Si Le Lay fustige le programme, il sent que l’empire TF1 vacille et négocie en secret un contrat avec Endemol. Estimé à plus de 500 millions d’euros et signé le 10 juin 2001, il donne à la chaîne un droit de premier regard sur tous les projets de la société de production.On connaît la suite : Star Ac, Nouvelle Star, L’Ile de la tentation, Secret Story… Plus de 1 900 candidats et 20 millions de SMS envoyés chaque année… rien qu’en France ! En créant Big Brother, John de Mol pensait changer la télé pour cinq à dix ans en créant. Une légère sous-estimation !Quel avenir ?Les producteurs songent à une seule et même émission diffusée sur les cinq continents. Aux USA, la polémique enfle avec Stars Earn Stripes (Des stars gagnent leurs galons), où des célébrités "jouent" à la guerre, avec des risques bien réels. Neuf prix Nobel de la paix ont demandé sa suppression, estimant "abominable qu'une grande chaîne de télévision (NBC, ndlr) présente une émission faisant de la guerre quelque chose de glamour."Jérémy Parayre du magazine Télé 7 jours