LUGNE-POE.

Aurélien Lugné-Poë est né à Paris le 27 décembre 1869. Attiré assez tôt par le milieu artistique, il intègre le Conservatoire de Paris à l’âge de 19 ans.Il fait ses premiers pas sur les planches dans le Théâtre Libre d’André Antoine, troupe essentiellement focalisée sur le naturalisme. Mais Aurélien Lugné-Poë est un éternel curieux, avide d’apprendre, de tenter et de découvrir. Il quitte alors la troupe d’Antoine en 1890 et rejoint le Théâtre d'Art de Paul Fort. Il dirige pendant deux années (1891 à 1893) le Nouveau Théâtre, faisant découvrir aux spectateurs français des auteurs nordiques et scandinaves.En mars 1893, le metteur en scène finit par fonder sa propre troupe, La Maison de l’Œuvre ou Théâtre de l'Œuvre, en collaboration avec Camille Mauclair, Maurice Maeterlinck et Édouard Vuillard. Il y fera connaître le mouvement symboliste qui, de part ses caractéristiques-mêmes (jeu dépouillé, déplacements lents, voix neutre, suggestions remplaçant l’illustration au niveau des décors…), s’oppose fermement et clairement au naturalisme prôné par Antoine. Le théâtre ferme en 1899, mais, entre-temps, Poe met en scène, sans relâche, ses auteurs de prédilection, encore peu connus en France à l’époque comme Gerhart Hauptmann, August Strindberg et Henrik Ibsen.Sa générosité artistique ne se limite pas à rendre célèbres des auteurs étrangers. Il participe même à lancer les carrières de plusieurs acteurs, auteurs et autres artistes français talentueux tels que Romain Rolland, Maurice Maeterlinck, Georges Bataille et Paul Claudel et surtout Alfred Jarry en l’honneur de qui, il met en scène la pièce Ubu Roi le 10 décembre 1896 avec Firmin Gémier. Outre l’opportunité offerte à Poë d’expérimenter l’hyperthéâtralité, l’œuvre, tant dans son écriture que dans sa mise en scène prodigieusement novatrice, fait encore aujourd’hui figure de référence.La fermeture du théâtre n’empêche en rien son activité qu’il poursuit à Paris et à l’étranger en mettant en scène des pièces de Shakespeare, André Gide, Oscar Wilde, Émile Verhaeren et bien d’autres.Il reprend les rênes du Théâtre de l'Œuvre en 1912 qui correspond à l’année de sa réouverture et ce, pour deux ans. La même année, il monte L'Annonce faite à Marie de Paul Claudel qui connaît un grand succès.Entre 1919 et 1929, il continue à travailler dans la Maison de l’Œuvre et ne cesse d’ouvrir les portes du public à des auteurs injustement méconnus tels que Jean Sarment, Fernand Crommelynck, Armand Salacrou… En artiste complet, il s’attaque également à l’écriture avec notamment ses propres mémoires (la Parade 1930-1936), un essai sur Henrik Ibsen et quelques critiques dramatiques. Artiste sans concessions, sarcastique et provocateur, il sera fortement critiqué mais unanimement considéré, avec André Antoine, comme le symbole du renouveau du théâtre parisien de la fin du XIXe siècle.