The Midnight Sky
Netflix

Michael Clayton, O'Brother, Paul Newman, The Midnight Sky... George Clooney revient sur sa riche carrière.

À l’occasion du London Film Festival, George Clooney a donné une conférence (virtuelle, évidemment) sur sa carrière et son prochain film, The Midnight Sky, prévu pour dans quelques semaines sur Netflix. Il y jouera Augustine, scientifique solitaire basé en Arctique, qui tente l’impossible pour empêcher l'astronaute Sully (Felicity Jones) et son équipage de rentrer sur Terre. Car il sait qu’une mystérieuse catastrophe planétaire est imminente… Morceaux choisis de cette conférence riche en anecdotes.

The Midnight Sky
« Je n’avais pas lu le livre sur lequel est basé le scénario. Les gens de Netflix m’ont envoyé le script pour me proposer de jouer dans The Midnight Sky. J’ai adoré et j’ai trouvé que c’était un bon rôle pour moi. Mais je me me suis vite dit que je devais tenter de le réaliser le film. J’avais mon idée, et j’avais déjà tourné dans deux films qui se déroulent dans l’espace, avec Alfonso Cuarón (Gravity) et Steven Soderbergh (Solaris), donc je savais à quel point c’était compliqué. Mais The Midnight Sky me semblait être une vraie histoire très intime sur ce que l’humanité est capable de s’infliger. Et je trouvais que c’était aussi une belle fable sur la rédemption, peut-être l’histoire ultime sur ce sujet. Donc j’ai poussé pour qu’on tourne en 65mm, histoire qu’on puisse être diffusé sur des écrans géants dans les salles. Vous avez dû le regarder sur un écran d’ordinateur minuscule, non ? Sur votre télé ? Oh, je me sens tellement mieux (Rires.) Bref, les gens de chez Netflix nous ont laissé faire le film qu’on voulait faire. Mais ce n’était pas simple, comme vous pouvez l’imaginer (…) On a commencé le tournage en Islande, et c’était particulièrement dur. Il faisait moins 40 degrés et il y avait des vents à plus de 110 km/h. C’était dur physiquement. Et après, on est allé près de Londres pour tourner mes scènes, pendant qu’on construisait les autres décors. On était au milieu de tout ça quand Felicity Jones m’a appelé : « Je suis enceinte ». Super nouvelle, mais ça compliquait les choses ! Elle voulait quand même faire les scènes où elle devait être accrochée à des câbles, mais j’ai refusé, on ne fait pas ça avec une femme enceinte. On a tenté de tourner tout ça en remplaçant numériquement son visage, ce qui était très bizarre. Et au final, on a discuté ensemble et on lui a dit : « Tu sais, si des gens partent dans un vaisseau pendant deux ans en direction d’une autre planète, il y a des chances qu’ils fassent l’amour. Et que quelqu’un tombe enceinte ». Et ça a tout changé. Scénaristiquement, ça a même été un vrai bonus pour nous ».

La scène finale de Michael Clayton
« Ce n’était pas dans le script du tout. On s’est mis à discuter de la fin avec Tony Gilroy, et on avait en tête celle du Lauréat : ils montent au fond du bus et sont tout contents de ce qu’ils viennent de faire. Là, normalement, il y a un fondu au noir et le générique. Mais dans le film, on reste sur eux. Longtemps. Et tout doucement, ils commencent à réaliser que c’est leur nouvelle vie. C’était magnifique. Donc Tony et moi avons développé la même idée pour Michael Clayton. Sauf qu’on tournait en plein coeur de Manhattan, au milieu de la journée. Mais on n’avait pas préparé le plan, on ne savait pas exactement ce qu’on allait faire. En temps normal, tu ferais fermer la rue et toutes les voitures autour seraient conduites par des figurants. Pas ici. On avait juste un taxi mais équipé d’énormes lumières sur le toit pour l’éclairage. Moi j’étais à l’arrière, totalement éclairé, pendant qu’on roulait. Et je ne devais pas bouger pas d’une oreille. Mais des tas de gens dans leurs voitures à côté me reconnaissaient, et ils se collaient à nous en criant : « Hey George ! Regarde par ici ! Je veux te prendre en photo ! Hey, George Clooney ! » C’était comme ça tout le temps de la scène, et moi j’essayais juste de ne pas me marrer ! Ce qui est génial avec ce plan, c’est que si tu le mets au début du film, c’est la scène d’ouverture la plus ennuyeuse de l’histoire du cinéma. Mais comme on a vécu toute cette histoire avec Michael Clayton, chacun se rejoue le film en me regardant, et chaque spectateur a sa propre interprétation : est-ce qu’il se sent enfin libre ? Est-ce qu’il a gâché sa vie ? Ça fonctionne parfaitement. »


Paul Newman
« J’ai été très influencé Paul Newman. C’était quelqu’un de vraiment très drôle, on s’est beaucoup marré vers la fin de sa vie. J’ai réalisé un film qui s’est totalement planté, Jeux de dupes. Vraiment un gros flop, critique et public. Il pilotait toujours à l’époque et il avait planté une voiture de course. Donc il a pris une photo de la bagnole complètement démolie, et il l’a superposée à l’affiche de Jeux de dupes. Il m’a dit : « Je conduisais ta voiture » (Rires.) Il avait vraiment un super sens de l’humour (…) On devait tourner N’oublie jamais (The Notebook en VO) ensemble. On nous avait envoyé le script, on l’a lu et on s’est dit qu’on devait le faire. Je l’aurais donc joué lui, jeune. On est allé chez Warner Bros., c’était décidé, ça allait être super. Et puis je suis rentré chez moi, et j’ai revu L’Arnaque ou Butch Cassidy et le Kid, je ne sais plus. Et c’était un des mecs les plus beaux et élégants de tous les temps, avec ses yeux bleu vif. Il avait environ mon âge de l’époque, à peu près 35 ans. On s’est retrouvé pour dîner, et je lui ai dit : « Je ne peux pas te jouer, tout le monde sait de quoi tu avais l’air, et je ne te ressemble pas du tout ! Ce serait dingue ». On voulait tourner ce film parce qu’on avait vraiment envie de travailler ensemble. Mais ce n’était pas le bon projet. Finalement, Ryan Gosling et James Garner ont fait N’oublie jamais, mais des années plus tard. »

Sa carrière d’acteur
« Les frères Coen veulent à chaque fois que je joue un idiot. Ils veulent se moquer de moi, et je trouve ça très marrant. Steven Soderbergh aime s’amuser avec les stéréotypes, alors qu’Alexander Payne et Jason Reitman jouent avec la perception que les gens ont de moi. C’est toujours amusant, même si c’est délicat. J’ai souvent entendu : « Oh, tu ne fais que te jouer toi-même ». Mouais... J’ai eu la chance de pouvoir travailler avec des réalisateurs immensément talentueux, et plus encore, des gens formidables. J’ai beaucoup appris d’eux. J’ai eu une carrière intéressante, faite de succès incroyables et d’échecs immenses, aussi bien en tant qu’acteur que réalisateur. Et paradoxalement, ça m’a évité d’être étiqueté. Je n’ai jamais été un grand action guy ou un grand acteur comique. Ça m’a permis de tenter des choses, de prendre des rôles et des films très variés. »

O’Brother
« Je n’arrive pas à croire que ce film est sorti il y a vingt ans, j’ai l’impression que c’était hier. Je suis en train de tourner Les Rois du désert et je reçois un coup de fil de Joel et Ethan : « T’es où ? » « En Arizona » « On peut venir ? » Je ne les avais jamais rencontrés et Fargo venait de sortir. Ils étaient des dieux ! J’avais du mal à réaliser qu’ils m’apportaient leur prochain script et qu’ils me proposaient le rôle d’Everett McGill. J’étais très nerveux quand je suis arrivé à Jackson, dans le Mississippi, pour le tournage. Pour mon premier jour, je jouais la scène où je suis assis par terre en train de manger du maïs avec Tim Blake Nelson. Et John Goodman, avec qui j’avais travaillé des années avant sur la série Roseanne, est sur le point de mettre un coup sur la tête avec un bâton. Mais je jouais le truc comme un idiot, parce que ces trois gars sont les mecs les plus débiles du monde. C’était ma première prise, et Joel et Ethan sont venus me voir. J’ai appris plus tard que ça n’arrive jamais, ils ne sont pas du genre à te donner des conseils. Ils se marrent plutôt derrière la caméra ! Donc Joel arrive et me dit juste : « Tu sais George, Everett est certain d’être un type très malin ». Oh, OK. Je n’avais pas du tout le bon angle. Et à partir de ce moment-là, j’avais pigé. Tout est devenu facile. Ce sont des réalisateurs vraiment intelligents, et d’incroyables scénaristes. Des maîtres. »