Gerard Butler dans Dragons
Universal

Quinze ans après l'original, le réalisateur revient avec une adaptation live-action de son Dragons. Techniquement irréprochable mais artistiquement un peu vide, ce remake plan par plan interroge : peut-on recréer la magie sans l'animation ?

Quinze ans après avoir co-réalisé l'un des plus beaux films d'animation DreamWorks, Dean DeBlois revient seul aux commandes (sans Chris Sanders) pour une réappropriation en live-action de son Dragons. Pourquoi pas. Mais dès les premières images, la démarche interroge : à quoi bon transposer dans le réel ce qui fonctionnait si bien dans l'imaginaire animé ? La réponse peine à émerger des brumes de ce remake consciencieux mais dépourvu d'âme.

C'est bien le paradoxe de cette nouvelle version : techniquement irréprochable, visuellement léchée, elle reproduit avec une fidélité maniaque la structure narrative de l'original, ses grands moments d'émotion et ses envolées spectaculaires. Comme si DeBlois, conscient d'avoir signé un trésor, n'avait osé y toucher qu'avec des gants blancs. Le résultat évoque les films générés par IA ou les restitutions 3D d'œuvres d'art antiques : jolies, soignées, mais totalement vidées de leur souffle originel.

L'émerveillement du premier film, cette capacité à transformer ce grand récit d’apprentissage en grande aventure poétique se dilue totalement dans le passage au live-action. Les séquences de vol, autrefois portées par la grâce de l'animation et la partition de John Powell, deviennent de purs exercices de virtuosité numérique. Elles sont impressionnantes, mais n'ont pas la magie qui faisait que l'on croyait vraiment voir Harold et Krokmou danser dans les nuages.

Dragons live action 2025
DreamWorks/Universal

Mason Thames, pourtant convaincant dans Black Phone, peine à exister ou à faire oublier la voix attachante de Baruchel dans l’original. Il est prisonnier d'un exercice de style qui ne lui laisse aucune marge de manœuvre, aucun espace pour réinventer le personnage. Même constat pour Nico Parker elle aussi contrainte de rejouer beat par beat les scènes d'Astrid sans pouvoir y apporter sa touche  personnelle.

Seul Gerard Butler parvient à insuffler une nouvelle dimension à son Stoïck. Touchant, violent, tendre ou menaçant, il est l’atout de ce film sinon trop sage. 

Le plus troublant reste au fond cette impression de déjà-vu permanent. Chaque plan, chaque réplique, chaque rebondissement résonne comme un écho affaibli de l'original. DeBlois et ses équipes ont beau déployer des trésors d'inventivité technique - les dragons sont magnifiques, l'île de Beurk magnifiquement reconstituée -, ils ne parviennent jamais à justifier pourquoi cette histoire méritait d'être racontée une seconde fois. On pense à un moment au Psycho de Gus Van Sant, autre remake copycat d'un chef-d'œuvre. Au moins, GVS posait-il la question de la reproductibilité de l'art. Ici, aucune interrogation méta ou existentielle. Juste la volonté de faire du neuf avec du vieux, dans l'espoir qu’une nouvelle génération s’empare de cette histoire…

Reste un honnête divertissement familial, porté par un savoir-faire indéniable et quelques moments d'émotion sincère. A force de vouloir capturer la magie du premier film, DeBlois a fini par l'emprisonner dans un écrin trop sage, trop froid. Cette fois-ci Krokmou a raté son envol.


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