Toutes les critiques de Tunnel

Les critiques de Première

  1. Première
    par Eric Vernay

    Vite, toujours plus vite. Arboré par la Corée du Sud depuis trente ans, ce leitmotiv économique n’est pas sans risques. En témoigne la tragédie du Sewol, ferry surchargé dont le naufrage a coûté la vie de plus de 300 personnes en 2014. La déshumanisation de ce capitalisme effréné a récemment inspiré un film de zombies (Dernier Train pour Busan). Kim Seong-hun choisit l’option plus réaliste du film catastrophe. Un automobiliste se retrouve brutalement enseveli sous un tunnel. L’accident déclenche un tsunami émotionnel entretenu par les médias. Mais à mesure que l’opération de sauvetage s’éternise – très coûteusement – vient sourdre une cruelle question : la vie de cet unique survivant mérite-t-elle d’être sauvée ? Le réalisateur de Hard Day répond par une satire politique efficace (bien que peu subtile), tout en ruptures de tons, mais surtout par l’empathie qu’il parvient à susciter pour son héros captif, jouant avec brio de la gestion de l’espace exigu, à la fois visuellement (gros plans étouffants) et acoustiquement (chaque caillou a sa note). Aussi impressionnantes que sporadiques, les scènes d’action semblent presque secondaires. Le cinéaste leur préfère les détails d’apparence plus anodine : ici, la présence incongrue de fluides corporels dans le cadre policé d’un blockbuster, là, un tapis roulant obligeant l’épouse du héros à marcher à reculons pour visionner le journal télévisé – avec l’idée d’une vie désormais condamnée au surplace. Une puissante fable humaniste.