The Gazer de Ryan J. Sloan
UFO

Une femme percevant le temps de manière déformée se perd dans un dédale parano. Un premier film prometteur, habité par la présence inquiète d’une actrice étonnante, Ariella Mastroianni

C’est un premier long fauché, venu de la Côte Est des USA, réalisé par un inconnu (Ryan J. Sloan se présente comme un électricien du New Jersey), tourné à l’arrache le week-end, quand lui et son actrice et co-scénariste Ariella Mastroianni (aucun lien) avaient un peu de temps et d’argent devant eux. Le tout en 16mm, granuleux à souhait – un genre en soi. The Gazer raconte l’histoire de Frankie, une jeune femme souffrant de dyschronométrie, maladie dégénérative qui l’empêche de percevoir correctement le temps et la plonge régulièrement dans des pertes de conscience. Eloignée de sa fille suite à la mort mystérieuse du père de celle-ci, enchaînant les petits boulots, Frankie va bientôt se retrouver paumée dans une énigme labyrinthique… La dyschronométrie du personnage lui interdit par ailleurs d’utiliser des smartphones, et l’oblige à se promener partout avec un vieux walkman sur lequel elle a enregistré des balises auditives l’aidant à garder le contrôle. Ce gimmick tient lieu de manifeste analogique pour le réalisateur, qui paye ici son tribut aux thrillers paranos des 70’s type Conversation secrète ou Blow Out – et aussi un peu à Memento. Dans les scènes oniriques qui trouent le récit, c’est à Lynch et Cronenberg qu’on pense, mais cette avalanche de références n’empêche jamais le film de tenir debout, grâce à un suspense policier vraiment bien construit, jamais prétexte ni passéiste. Le monde que Ryan J. Sloan dessine est unique, entêtant, un New Jersey jamais vu, fléché par les trous noirs sensoriels et habité par la présence inquiète d’une actrice étonnante.

De Ryan J. Sloan. Avec Ariella Mastroianni, Marcia Debonis, Renee Gagner… Durée 1h54. Sortie le 23 avril 2025


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