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Quand un petit génie évoque un génie tout court, on atteint les hautes sphères de l'analyse filmique.Richard Kelly, 39 ans, réalisateur du cultissime Donnie Darko (2001), vient de publier une analyse de Gone Girl sous forme d'hommage au talent de David Fincher, une sorte d'essai de presque 5000 mots dédiés à sa dévotion à son aîné dans lequel il compare son dernier film à l'ultime long métrage de Stanley Kubrick, Eyes Wide Shut.Ce long texte en trois parties rédigé par Richard Kelly et intitulé A Study of Psychopathy in the Heteronormative Patriarchal Occult, est accessible en intégralité sur son tumblr. Richard Kelly débute son analyse par sa rencontre avec le travail de Fincher, notamment à l'époque de ses réalisations pour des clips musicaux, et l'influence que Fincher a pu avoir sur son propre futur de cinéaste. Puis Kelly dresse un parallèle entre Gone Girl et Eyes Wide Shut, et plus précisément sur la figure de l'homme dans la société contemporaine et l'idée même du mariage aujourd'hui, avant de revenir aux louanges du réalisateur de Seven et de louer le travail d'adaptation du roman.Extraits."Et tout a commencé avec un clip d'Aerosmith.C'était à Midlothian, en Virginie. On était quelque part en octobre 1990. Je venais de rentrer de mon entraînement de foot et j'étais vautré sur mon canapé devant MTV. C'était comme une routine dans mon quotidien. (...) J'adorais regarder la vidéo qu'il avait réalisée pour Janet Jackson, mais celle que je pouvais vraiment mater en boucle, c'était celle de Aerosmith pour Janie's Got a Gun."Il y a très peu de vrais magiciens du cinéma, mais David Fincher appartient clairement à cette courte liste au même titre que Stanley Kubrick. La sortie de Gone Girl est plus qu'un événement. Elle se vit comme un soulagement bienvenu. Une date que nous attendions depuis bien longtemps et qui méritait cet essai en trois parties, rempli de spoilers et comprenant 4741 mots que j'ai écrit pour Talkhouse Film (Dieu vous bénisse si vous lisez encore)."Ce dixième long métrage de Fincher est fascinant, délicieusement conçu et spectaculairement divertissant. Il marche sans arrêt sur la corde raide au-dessus de tous les "pièges" possibles et imaginables du genre, mais il parvient toujours à s'élever au-dessus de tout et à créer l'expérience cinématographique la plus unique qui soit. Gone Girl est le film que nous avons attendu, et le film que nous méritions cruellement."Après avoir lu le roman de Gillian Flynn, quelques mois avant de voir le film, il est devenu clair pour moi que la version filmée de Gone Girl deviendrait - entre des mains aussi habiles que celle de Fincher - une sorte d'âme-sœur à l'odyssée sexuelle incomprise de Stanley Kubrick sorti il y a quinze ans. Le bandeau est maintenant descendu et la laideur est bien visible."Que ce soit Gone Girl ou Eyes Wide Shut, les deux films sont profondément tordus. Ce sont deux thrillers érotiques maniaco-satiriques. (...) Surtout, les deux films montrent parallèlement comment des mariages brisés ne peuvent être réparés par quelques rituels ou autres sacrifices savamment calculés."En plus, les deux films déconstruisent totalement l'image patriarcale, ce monde lisse en surface et très "hétéronormatif", avec l'introduction d'un intérêt psychotique et dangereux à vouloir le maintenir et le préserver plutôt que de passer à autre chose."Avant de donner un dernier conseil : "Pssst... le mot de passe est : Fidelio Rainbow. Venez voir si vous osez explorer en profondeur deux des films les plus provocants jamais réalisés sur le mariage."La bande-annonce de Gone Girl, actuellement en salles :