Guide du 18 septembre 2019
Pyramide Distribution / Mars Films / Twentieth Century Fox France

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU ★★★★☆
De Céline Sciamma

L’essentiel
Céline Sciamma raconte avec une infinie délicatesse une histoire d’amour impossible, sublimée par Adèle Haenel et Noémie Merlant.

Mai 2019 restera à part dans la carrière de Céline Sciamma. Douze ans après son premier long métrage, Naissance des pieuvres, découvert à Un certain regard, elle a connu sa toute première sélection en compétition cannoise avec Portrait de la jeune fille en feu. Un baptême toujours stressant mais qui s’est déroulé ici de la plus radieuse des façons, l’accueil enthousiaste de la projection officielle ayant trouvé un écho idoine dans celle réservée à la presse. Cerise sur le gâteau, la cinéaste a même reçu le fameux coup de fil du samedi 13 heures, jour de palmarès, lui indiquant de revenir fissa à Cannes pour recevoir sa récompense.
Thierry Cheze

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PREMIÈRE A ADORÉ

AD ASTRA ★★★★☆
De Bruno Dumont

On pourrait envisager la filmographie entière de James Gray comme une reformulation de l’œuvre de Francis Ford Coppola. De Little Odessa à The Immigrant, il aura passé les vingt premières années de sa carrière, et ses cinq premiers films, à réfléchir et réinvestir les thématiques du Parrain (l’immigration, les héritages impossibles, la famille qui protège et étouffe...) en les ramenant à une dimension moins épique, plus modeste et intime. Avec The Lost City of Z, il quittait l’ombre des Corleone pour s’attaquer à Apocalypse Now – le voyage, la remontée du fleuve, l’énigme existentielle, le face-à-face avec soi-même au bout du chemin. Ad Astra, sa première incursion dans le registre de la science-fiction, poursuit l’entreprise du précédent film et remixe lui aussi le souvenir de l’odyssée vietnamienne de Coppola.
Frédéric Foubert

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UN JOUR DE PLUIE À NEW YORK ★★★★☆
De Woody Allen

On a bien cru qu’on ne le verrait jamais. Suite au mouvement #MeToo et à la résurgence des accusations de Dylan Farrow contre son beau-père Woody Allen, Amazon Studios, producteur et distributeur des trois derniers opus du réalisateur, avait choisi, début 2018, d’annuler purement et simplement la sortie d’Un jour de pluie à New York aux États-Unis. Le reste du monde – enfin, celui qui avait acheté les droits du film – n’était cependant pas concerné par cette décision dictée par une forme de prudence, elle-même conditionnée par un contexte américain très particulier. En France, Mars Films, distributeur régulier des films du réalisateur depuis dix ans, a sagement attendu que les choses se tassent un peu pour travailler la sortie. À l’arrivée, on ne peut que se réjouir de ce petit retournement de situation.
Christophe Narbonne

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TROIS JOURS ET UNE VIE ★★★★☆
De Nicolas Boukhrief

L’ouverture de Trois Jours et une vie est saisissante : dans un Scope renversant (« carpenterien »), Boukhrief pose son décor. Une forêt dense et profonde qui ressemble à un décor maléfique de conte de fées. Et puis, la caméra et l’action descendent au niveau des hommes et on découvre un petit village des Ardennes, ses habitants, sa topographie. Et cet enfant qui va vivre son pire cauchemar.
Gaël Golhen

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L’AUTRE CRISTOBAL ★★★★☆
D’Arland Gatti

On savait déjà que la révolution cubaine avait permis au début des années 60 ce somptueux objet cinématographique qu’est Soy Cubade Mikhail Kalatozov, coproduction russo-cubaine censée représenter la patrie de Castro à Cannes. Et voici que débarque sur nos écrans ce Cristobalréalisé quasiment au même moment (1962) par le Français Armand Gatti avec également l’aide de l’institut du cinéma cubain. Il en résulte une fable visionnaire en noir et blanc où le suicide d’un dictateur d’un pays imaginaire transformé en volatile va avoir des répercussions jusqu’au Paradis. En héros « donquichottesque », Jean Bouise trouvait ici son premier rôle. Et dans des décors hallucinés et un ton synchrone avec le surréalisme bunuelien, L’Autre Cristobalest plus qu’une curiosité, c’est une épopée poétique absolument démente.
Thomas Baurez

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PREMIÈRE A AIMÉ

LUCKY DAY ★★★☆☆
De Roger Avary

Red, un perceur de coffres à la coule, sort de prison pour retrouver sa compagne et sa fille. Mais Luc, un tueur psychopathe français adepte des armes lourdes, est sur sa trace. Tarantinade plutôt divertissante à la recette bien connue (casting surbrillant, ultraviolence, tentative continue de battre le record de prononciation du mot « fuck » et surf music), Lucky Day ressemble toutefois plus au nouveau film du réalisateur de Killing Zoe qu’au grand come-back du réalisateur de l’immense Les Lois de l’attraction. On attendait le nouveau film de Roger Avary avec énormément d’impatience. Mais ce jeu de massacre décontracté (dont la désinvolture rappelle celle de Shane Black) et truffé de références françaises (Charles Aznavour et Yves Montand sur la playlist) aurait mérité plus de rigueur.
Sylvestre Picard

NOUS, LE PEUPLE 
★★★☆☆
De Claudine Bories & Patrice Chagnard

Après les passionnants Les Arrivants (sur les demandeurs de droit d’asile) et Les Règles du jeu(sur des demandeurs d’emploi), le duo Bories-Chagnard poursuit son état des lieux acéré de notre pays en s’intéressant à la crise de la démocratie. Tourné avant le début du mouvement des Gilets jaunes, ce documentaire prend un relief particulier aujourd’hui. On y suit trois groupes d’une association d’éducation populaire (des détenus, des lycéens, des femmes immigrées) unissant leurs idées pour écrire une nouvelle Constitution et apporter le fruit de leur travail à l’Assemblée nationale. Nous, le peuple raconte avec la même justesse leurs échanges passionnés et la difficulté d’être pris au sérieux par la représentation nationale. Un grand film sur la parole mais aussi le sentiment blessant d’une écoute impossible. Une oeuvre essentielle pour comprendre les tensions de la société française.
Thierry Cheze

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

LE CHARDONNERET ★★★☆☆
De John Crowley

Pas évident, Le Chardonneret, à plus d’un titre : pas évident de résumer l’épais bouquin de Donna Tartt et pas évident non plus de l’adapter au cinéma. John Crowley, d’habitude plutôt doué (Boy A qui a révélé Andrew Garfield, le tendre et coloré Brooklyn avec Saoirse Ronan) s’y est cassé les dents. Le Chardonneret est le récit étalé sur quinze ans de la vie de Theo, treize ans, qui vole un tableau de maître au MoMa après un attentat où sa mère trouve la mort. Adopté par une famille bourgeoise, Theo va devenir antiquaire (et faussaire), après un détour chez son père au milieu du désert… Oui, d’accord, on se prend les pieds dans ce résumé, mais à notre corps défendant, le film aussi : c’est très romanesque, peut-être très cohérent sur le papier mais à l’écran, c’est d’une longueur infinie, et on ne sait absolument pas où tout cela nous mène. Ni à quoi Le Chardonneret rime. Reste une belle parenthèse au milieu du film, où le héros vit une adolescence onirique au milieu du Nevada, dans un village fantôme shooté par Roger Deakins au son de New Order.
Sylvestre Picard

LES FLEURS AMÈRES 
★★☆☆☆
D’Olivier Meys

Ce premier long métrage d’Olivier Meys propose une vision inédite sur l’immigration chinoise. Dans le nord-est de la Chine, le Dongbei, région longtemps prospère, Lina rêve d’un futur plus radieux pour sa famille. Elle entend dire que ses compatriotes, très appréciées pour leur mandarin parfait, trouvent facilement un travail de nourrice à Paris auprès de familles chinoises. Elle s’envole alors vers la capitale française. Mais rien ne va se passer comme prévu. Sans jamais être didactique, porté par la grâce de son interprète principale (Qi Xi, vue dans Misteryde Lou Ye), Les Fleurs amères montre la descente aux enfers des migrants : esclavage moderne, précarité extrême, exploitation, prostitution. On regrette néanmoins que le récit soit enfermé dans un corset de dignité qui empêche, certes, le film de tomber dans le mélo, mais aussi l’émotion de naître.
Sophie Benamon

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

MA FOLLE SEMAINE AVEC TESS ★☆☆☆☆
De Steven Wouterlood

Adaptation d’un livre pour la jeunesse, ce premier film raconte un été pas comme les autres. En vacances sur une île néerlandaise, Sam, 11 ans, rencontre Tess, boule d’énergie animée de mystérieuses intentions, notamment envers un couple à qui elle a fait « gagner » un séjour sur l’île. Ah, l’été, le soleil, la plage, les premiers émois amoureux... Littérature et cinéma regorgent de fictions dédiées à ce moment particulier de l’existence propice au lâcher-prise et à la quête de sensations nouvelles. Autant le dire d’entrée : Ma folle semaine avec Tess ne révolutionne pas le genre. La voix off explicative, le garçon maladroit, la fille intrépide, la présence faussement menaçante, les scènes de transition cocasses sont tous là, prêts à l’emploi. Vraiment pas folle, l’échappée.

Christophe Narbonne

EDITH, EN CHEMIN VERS SON RÊVE 
★☆☆☆☆
De Simon Hunter

En Angleterre, la vie commence à 80 ans. Le cinéma britannique n’aime rien tant que mettre ses personnes âgées au centre d’aventures rocambolesques. Pour rendre hommage à leur reine sans doute... Ainsi, après la bande de retraités d’Indian Palace partis finir leur vie en Inde, voici Edith, une octogénaire qui a sacrifié la sienne à son mari acariâtre. À la mort de ce dernier, elle décide enfin d’entreprendre un rêve fou : l’escalade du mont Suilven en Écosse. Le film célèbre l’union des contraires entre cette ancienne pétrie de traditions et un jeune homme incertain sur son avenir. Si l’histoire reste très classique et offre peu de surprises, cette réconciliation des générations sur fond d’épreuve physique apporte un apaisement... dont a grandement besoin l’Angleterre déchirée par le Brexit !
Sophie Benamon

DE SABLE ET DE FEU 
☆☆☆☆☆
De Souheil Ben-Barka

Au début du XIXe siècle, un aventurier et inventeur espagnol est chargé par le roi de renverser un sultan en se faisant passer pour un prince arabe. Il croisera en chemin une séduisante aristocrate anglaise, amenée elle aussi à connaître un destin hors normes. Serait-ce la troublante ressemblance de l’acteur principal, Rodolfo Sancho, avec Michaël Youn (quand il est barbu) ? La musique guimauve omniprésente qui surligne les envolées mélodramatiques ? Le côté dépliant touristique de chaque décor (le film a bénéficié du soutien du Maroc) ? Les fondus enchaînés d’un autre âge ? De sable et de feu est à l’image de son titre : d’un ridicule et d’un pompier presque savoureux qui le font involontairement ressembler à une parodie de Lawrence d’Arabie transposée au Maghreb.
Christophe Narbonne

 

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