Captain America 2 Le Soldat de l'hiver
Marvel

A la sortie du Soldat de l'hiver, Première avait rencontré l'interprète de Steve Rogers.

Alors qu'Avengers Endgame est le film événement du moment au cinéma -et que Cap' y tient une nouvelle fois un rôle central-, TF1 diffusera ce week-end Le Soldat de l'hiver, épisode important de la franchise sorti en 2014 au cinéma. Première avait rencontré Chris Evans, l'interprète du super-héros, à l'époque, et vous propose pour patienter jusqu'à dimanche de (re)passer quelques instants en sa compagnie.

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Quel est l’enjeu de ce nouvel épisode pour Cap ?
Ce mec est un chien de berger, il lui faut une mission. Le problème qu’avait Steve Rogers dans le premier épisode était qu’il n’avait pas le physique de ses ambitions, à savoir aller castagner du nazi. Maintenant qu’il est devenu Captain America, il se pose des questions : qui sont les bons ? Qui sont les méchants ? La fin justifie-t-elle toujours les moyens ? Dans les années 40, en pleine Seconde Guerre mondiale, le mal était clairement identifiable. Aujourd’hui, la frontière n’est plus aussi nette.

Le film, qui se déroule de nos jours après la longue hibernation de Cap, joue la carte du poisson hors de l’eau. C’est un peu comme si on larguait Gary Cooper dans notre monde...
La grosse différence avec l’époque d’où il vient, c’est l’accès que nous avons à l’information. De nos jours, il est beaucoup plus facile d’être un criminel. D’où le débat sur les libertés individuelles. Jusqu’à quel point faut-il développer la surveillance ? Quelle valeur a votre droit à la vie privée ? Où faut-il placer le curseur ? Je n’ai bien sûr pas de réponses à ces interrogations. Dans le film, il y a un passage où l’on entend que le S.H.I.E.L.D. (l’agence gouvernementale pour laquelle travaille Captain America) prend le monde tel qu’il est et non comme on voudrait qu’il soit. Steve, lui, a beaucoup de mal à comprendre ça car il a des valeurs et des idéaux hérités d’une autre époque, quand les choses étaient plus simples et qu’on ne pouvait pas aller sur Internet pour apprendre à fabriquer une bombe, par exemple.

Joe et Anthony Russo revendiquent des influences telles que Les Trois Jours du Condor (Sydney Pollack, 1975), Les Hommes du président (Alan J. Pakula, 1976) et autres thrillers des années 70. Plutôt inattendu pour un film de superhéros, non ?
Sauf que Cap est un superhéros très « humain » : il ne lance pas d’éclairs, il ne vole pas, il a des pouvoirs assez basiques. Ce ton plus réaliste colle donc parfaitement. Et puis ce qui fait la force des productions Marvel, c’est qu’elles se suivent mais ne se ressemblent pas. Chacune a son identité propre et celle-ci penche clairement du côté des grands thrillers politiques des seventies. D’où la présence de Robert Redford au générique...

Notre review de Captain America, le soldat de l'hiver

Quelle comparaison feriez-vous entre cette suite et le premier film ?
Le problème avec les origin stories, c’est qu’il y a tant d’infos à caser que vous ne pouvez pas vraiment aborder les dilemmes du protagoniste. Dans Avengers (Joss Whedon, 2012), il y avait tellement de personnages qu’on n’avait le temps d’en découvrir aucun. Là, il y a un magnifique méchant – le Soldat de l’hiver du titre –, mais le plus intéressant, il me semble, c’est qu’on entrevoit un peu plus le conflit intérieur qui ronge Cap. Son abnégation est telle qu’il a tendance à tout encaisser, à ne pas montrer qu’il souffre. Du coup, avec ce film, c’est sympa de le voir remettre en question les ordres qu’on lui donne.

Son costume a changé...Oui, désormais, on a le costume « furtif ». Il est plus sombre, moins flashy.

Combien de temps vous faut-il pour le revêtir ?
Je sais bien que vous aimeriez que je vous dise que c’est un enfer, mais ça va, c’est gérable. Il y en a pour sept minutes à l’enlever. Le problème, c’est quand je vais aux toilettes car il faut tout retirer. J’imagine que les superhéros ne font pas pipi.

À quel point vous reconnaissez-vous dans le personnage ?
Les acteurs n’ont pas de superpouvoirs mais ont un certain pouvoir qui implique des responsabilités. On ne soigne pas le cancer, c’est sûr, mais en tant que personnalités publiques, on se doit d’avoir une éthique. Et il n’est pas toujours facile de poser les limites. Où commence votre liberté ? Que devez-vous aux fans ? Twitter et les moyens de communication modernes ont changé les règles du jeu. Il me semble qu’il était plus simple d’être acteur il y a trente ans. Aujourd’hui, il faut faire beaucoup de concessions. La question est : jusqu’à quel point ?

Que représente Cap aux yeux des Américains ?
Ca, c’est bien une question de journaliste étranger ! (Rire.) Son nom est Captain America et son costume reprend les couleurs de la bannière étoilée, mais on peut trouver des gens comme Steve n’importe où. Ses qualités – ce sens du bien, du sacrifice – ne sont pas l’apanage des Américains.

Chris Evans parle de sa scène d'action préférée en Captain America

Vous avez signé pour six films au total, n’est-ce pas ?
Oui, et j’en suis à la moitié. Ca n’a pas été évident de m’engager sur une aussi longue période. J’ai beaucoup hésité. Le truc, c’est que c’est à vous de vous adapter au calendrier des films et non l’inverse. Et puis il y a aussi le changement de style de vie qui va avec. Mais on s’y fait. Quand les films sortent, il faut serrer les fesses et surfer sur la grosse vague.

Quels sont vos projets ?
Je vais m’essayer à la réalisation en tournant un film romantique. J’aime les dialogues, surtout quand c’est filmé de façon intimiste, un peu comme dans le Blue Valentine de Derek Cianfrance, qui vous donne l’impression d’être au plus près des personnages telle une mouche sur le mur. J’adore aussi Before Sunrise (de Richard Linklater). C’est l’un de mes films préférés. Et puis le cinéma de Neil LaBute.

Soit l’exact contraire de Captain America.
C’est toute la beauté du cinéma, non ?

Qu’est-ce que vous appréhendez le plus dans ce passage derrière la caméra ?
De me rendre compte que je ne suis pas doué ! Ça va être un exercice d’humilité. Je me rappelle toutes les déceptions que j’ai eues en tant qu’acteur. Vous voyez le produit fini et vous vous dites que le scénario que vous avez lu n’avait rien à voir avec le résultat. Mon problème, c’est que j’aime tout ce que je lis. Mon agent est sans arrêt en train de me dire que je ne peux pas tout faire, mais c’est plus fort que moi : je vois toujours le bon côté des choses et, ensuite, je réalise que je devrais choisir mes projets plus soigneusement ! Du coup, je suis assez excité à l’idée d’avoir un peu plus de contrôle en étant réalisateur.

Après ce volet de Captain America, reste-t-il encore quelque chose que vous aimeriez que Cap accomplisse ?
Ca va vous paraître bizarre, mais j’aimerais bien le voir se planter. Ce mec cherche tellement à faire ce qui est bien, ce qui est juste... Son combat, c’est de donner le meilleur de lui-même, et s’il n’y arrive pas, il s’en veut à mort. Or l’erreur est humaine et ce serait bien de voir chez Cap une trace d’immaturité, d’irresponsabilité ou d’ego.

En avez-vous parlé à Joss Whedon ?
Non. Il faut laisser Joss faire ce que Whedon sait faire car, comme le succès de Avengers l’a prouvé, il maîtrise assez bien son sujet... (Rire.)
Interview Thomas Berger