Dans le roman Cinquante nuances de Grey, Christian Grey est difficile à rencontrer : quand on s'assoit autour d'une table dans la vraie vie avec son interprète Jamie Dornan, devenu en un film le cover boy le plus convoité de la planète cinéma, c'est forcément avec une dizaine d'autres journalistes et le combat pour poser ses questions est rude. Heureusement, le consensus s'est vite fait : on est à peu près tous là pour parler sexe. La preuve.Qu’est-ce qui vous a intéressé dans Christian Grey ?Je n’ai jamais rencontré quelqu’un comme lui. En un sens, c’est un être surnaturel, un peu comme un super-héros. Une personne comme Christian Grey n’existe pas. Donc c’était un peu difficile. Il n’y a pas beaucoup de mecs qui ont accompli ce qu’il a fait à 27 ans. J’ai été interviewé par quelqu’un qui ne croyait à rien dans le livre. C’est vrai : c’est un fantasme à très haut niveau. C’est intéressant à explorer.Comment on se prépare à être un sex role model ?On ne peut pas s’y préparer mentalement. On fait avec. Si les gens trouvent que c’est sexy et que vous y avez contribué, alors c’est cool. Mais on ne peut rien faire pour s’y préparer.Et pour les scènes de sexe ?Je ne pense pas que quiconque soit complètement à l’aise avec ça. Enfin, personne que je connais. (rires) Et je ne suis pas hyper à l’aise avec leur corps ou quand ils se mettent nus. (re-rires)Pourquoi Grey est-il écrit comme le fantasme féminin ultime ?Je crois que c’est son côté "je contrôle tout"… Je pense qu’il y a plus de femmes que l’on croit qui (il rigole) qui veulent être contrôlées comme ça. Mais il n’y a pas que ça. Grey est un fantasme parce que c’est une figure de pouvoir indicible. Le pouvoir attire. Peu de gens ont autant de pouvoir que lui et je crois que les femmes aiment ça. Erica (E.L. James, l’auteur) le décrit comme l’épitomé de la beauté masculine. La plupart des femmes vont réagir en disant "Ca a l’air bien…" Mais pour moi, ça n’existe pas. L’épitomé -ça ne veut rien dire. C’est un fantasme. Ca n’existe pas. Et je ne suis pas cet épitomé. Quels ont été les différends entre Sam et l’auteur du roman concernant le tournage ?Il y a eu des différends ?Oui, des différences de vision…Ouais. Je veux dire… Quand on fait un film, ce n’est pas la vision d’une personne contre une autre. Des centaines de personnes sont impliquées dans la création du film, des cadres du studio à l’opérateur caméra, du superviseur du script au scénariste. Il y a forcément des différences d’opinion parce qu’on est tous humains et passionnés par ce qu’on fait. A l’arrivée on a fait un film qui satisfait tout le monde.>>>Notre critique de Cinquante Nuances de Grey : moins cul mais moins con que le livreBon, on revient aux scènes sado-maso ?On dirait vraiment qu’Erica a déterré un sale petit secret. Le monde du SM est important. Très important. Ce genre de truc arrive dans n’importe quelle putain de ville, après tout. Même si vous ne le connaissez pas, il existe. Elle a juste un peu grossi le trait. Je ne crois pas que ce soit mauvais. Peut-être qu’elle a initié des gens à ce genre de choses… Encore une fois, ce n’est pas mauvais. Personne ne se fait assassiner. Il n’y a rien d’illégal. Personnellement je ne pratique pas mais je comprends ceux qui le font.Comment avez-vous réagi avec les accessoires SM ?"Par quel bout on le prend ?" (rires)C’est une histoire d’amour ?Oui. Totalement, absolument, au-dessus de tout, je crois que c’est une histoire d’amour. Dans un sens très classique. Les gens parlent de contes de fée, de cette haute idée de l’amour. Avec un aspect shakespearien, des amants « nés sous des étoiles contraires », qui ne devraient pas être ensemble mais qui sentent qu’ils doivent changer pour l’être.Que pensez-vous du classement R aux USA ?On a toujours su que ça allait être classé R. C’est marrant que ça choque les gens. On a essayé de se débarrasser de l’étiquette de mommy porn, pour faire une vraie histoire d’amour.Vous pensez que le film va être reçu différemment en Europe et aux USA ?Je crois que les Européens sont beaucoup plus ouverts d’esprit. C’est un fait. Mais énormément de gens ont lu le livre aux States et en Asie. Il ne s’est pas vendu que dans des pays ouverts d’esprit.Vous étiez familier avec le BDSM ?Pas du tout. Mais je savais que ça existait, hein. Mais ce que montre le film n’a jamais été montré dans du mainstream. On a vu des bouts, par exemple chez Tarantino… On avait un spécialiste du BDSM, Liam, sur le plateau. Une nuit je suis allé avec lui dans sa pièce du plaisir, je l’ai vu faire avec un de ses Soumis… C’était intéressant.Comment était votre relation avec Dakota ?J’ai fait un screen test avec elle, je passais en dernier , je crois qu’elle en avait fait plein toute la journée. Elle devait être fatiguée à force… Ce n’est pas comme si on était dans ce film que parce que l'alchimie est bonne. Il y a trop d’enjeux. Universal a mis beaucoup de fric là-dedans. C’est un putain de gros film. Vous jouez quand même des scènes de sexe ensemble. Comment on brise la glace ?Heureusement, on a tourné les scènes de sexe à la fin, quand on avait passé beaucoup de temps ensemble. On s’entendait bien, on savait se faire rigoler. Au film du temps on avait bâti une relation de confiance. Ce n’est pas comme si on nous avait mis dans un coin en nous disant de nous lâcher. Les scènes étaient chorégraphiées. L’équipe était réduite : il y a toujours plus de monde que d’habitude quand tu fais l’amour.En fin de compte, ça fait quoi de jouer dans un film écrit par une femme et réalisé par une femme, que toutes les femmes vont voir ?Beaucoup de femmes ont lu ce livre, et, bon, si tu es un garçon… Si tu es gay tu peux avoir envie de le voir. Les femmes ne vont pas au cinéma par elles-mêmes… Vous savez que les femmes peuvent être très convaincantes. Il y a plein de mecs qui font tout ce que leur demande leur femme. Alors, vous voyez, si elle dit « emmène-moi voir ce film à la Saint-Valentin où tu n’y auras pas droit », eh bien bonne chance pour lutter contre cet argument. Mais les mecs devraient aller voir le film parce que peut-être que quand ils rentreront à la maison il y aura une récompense (il rit).Bande-annonce de Cinquante nuances de Grey, en salles depuis le 11 février :