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Une improbable sitcom dans l'Amérique profonde, pas facile à vendre en France.

Après avoir pris la relève de Charlie Sheen dans Mon Oncle Charlie, Ashton Kutcher joue encore les ados attardés dans The Ranch, une nouvelle sitcom, qui a débuté sur Netflix la semaine dernière. L'acteur de 38 ans y retrouve son vieux pote de That 70's Show, Danny Masterson. Dix ans après, ils n'ont toujours pas grandi et incarnent deux frangins, qui vivent dans le ranch de leur père.

Kutcher incarne Colt, un joueur de football américain talentueux, qui a raté une carrière de joueur professionnel et qui revient dans la ferme familiale, 15 ans après l'avoir quitté. Il y retrouve son grand frère, Jamison, qui est resté pour aider son vieux père à faire tourner la boutique. Beau est un fermier usé du fin fond du Colorado, ronchon, et désagréable. Un ours mal léché, qui a fait fuir son épouse et qui doit désormais réapprendre à travailler, et surtout à vivre, avec ses deux fils.


Sur la forme, rien de neuf sous le soleil de l'Ouest américain. A première vue, The Ranch est une grosse série familiale un peu datée, qui fleure bon les années 1990 (voire les années 1980), avec son vieux paternel bougon, ses blagues potaches entre frangins, son esprit bon enfant et pire que tout, ses affreux rires enregistrés (qui piquent quand même sérieusement les oreilles). On voit déjà venir les prises de tête horriblement convenues, qui se régleront dans un gros câlin ; la vieille histoire d'amour du Kutcher lycéen (avec l'ancienne bombe de 24, Elisha Cuthbert) qui reprend vie lentement mais sûrement ; la chaude ambiance du bar du coin où il fait bon boire un coup...

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Oui, il y a tout ça dans The Ranch. Mais il y a aussi un peu plus. Sur le fond, cette sitcom hyper-conventionnelle réussit à étonner. Déjà, par son ton plus irrévérencieux qu'il n'y paraît. On n'est pas dans Notre Belle Famille. Ici, on dit "Fuck" quand on a envie (merci Netflix). On n'hésite pas à montrer un peu de cul, à picoler comme des trous et à tacler les politiques... surtout les Démocrates. Car oui, The Ranch est une "red-state sitcom". Comprenez une sitcom qui vote républicain. Une sitcom qui dépeint l'Amérique profonde d'aujourd'hui. Et à observer, elle a quelque chose d'assez fascinant.

On avale The Ranch comme une espèce de documentaire humoristique sur cette Amérique rurale des grands espaces, héritière de la conquête de l'Ouest. Celle qui attend avec impatience l'ouverture de la chasse, qui adore les armes, qui s'enfile bière sur bière (et jamais de light), qui mate du foot US le dimanche à la télé, qui n'écoute que de la musique country et qui porte des santiags et des blue jeans... Evidemment, vu de France, c'est un peu compliqué de s'identifier à cet Américain moyen de l'Amérique des cowboys, assez peu représenté dans les séries en général. D'ailleurs, même aux USA, The Ranch a un peu de mal à parler aux téléspectateurs des grandes villes de la côte Est ou de la côte Ouest.

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Mais au bout du compte, c'est un show surprenant, plutôt couillu, qui arrive régulièrement à nous arracher un ou deux éclats de rire, et qui finit par devenir attachant. Malgré tous ses défauts (et ils sont nombreux), The Ranch dit des choses sur la vie actuelle des éleveurs du fin fond des Etats-Unis, leurs difficultés d'adaptation et leurs gros problèmes financiers (les mêmes que chez nous). Elle dessine aussi quelques personnages forts en gueule, à commencer par l'énorme Sam Elliott (de Justified), dont la moustache "so far west" crève l'écran. Pas de quoi révolutionner le monde des sitcoms, mais une amusante plongée pittoresque au coeur de la campagne américaine, qui va vous donner envie d'écouter de la musique country !

The Ranch, avec Ashton Kutcher, Danny Masterson, Debra Winger et Sam Elliott, sur Netflix depuis le 1er avril 2016. 10 épisodes sont déjà en ligne et 10 autre suivront cet automne.