Affiches Films à l'affiche semaine du 16 avril 2025
Warner/ Le Pacte/ Universal

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
SINNERS ★★☆☆☆

De Ryan Coogler

L’essentiel

Malgré l’aura de Michael B. Jordan et quelques belles idées de cinéma, le trip historique et fantastique du réalisateur de Black Panther souffre de son propos confus.

Avec Sinners, Ryan Coogler retrouve Michael B. Jordan, son acteur fétiche, qui incarne ici deux frères jumeaux gangsters de retour dans leur Mississipi natal du début des années 1930, après avoir combattu lors de la Première Guerre Mondiale puis fait fortune à Chicago. Le Sud raciste de la prohibition est ici parfaitement reconstitué, Michael B. Jordan éclabousse l’écran de son aura et Coogler filme les champs de coton et les corps avec passion dans un format IMAX qui en met plein la vue. Mais, quand au bout d’une grosse heure d’exposition le film bascule dans une séquence onirique un peu ringarde, sa jolie partition commence à enchainer les fausses notes. Entre Une nuit en enfer et UsSinners s’interroge sur le pacte avec le diable que ses personnages doivent conclure pour s’élever. Loin de porter le propos de Coogler, la dimension fantastique de Sinners amène surtout de la confusion, jusqu’à sa scène scène post générique au sens carrément opaque. Ryan Coogler voulait réconcilier ses origines de jeune auteur primé à Sundance (avec Fruitvale Station), avec sa stature de hit maker capable de faire parler sa patte dans les plus grosses franchises (Marvel et Rocky). Une tentative de compromis qui aboutit hélas à un film hybride mal maitrisé.

Edouard Orozco

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

LE MELANGE DES GENRES ★★★★☆

De Michel Leclerc

Dans une époque où on nous rabâche qu’on ne peut plus rien, voilà un film qui tranche. Parce que Michel Leclerc, s’empare d’un sujet de société clivant, Metoo, précisément sans finasser, dans les pas de Simone, une flic conservatrice qui s’infiltre dans un collectif féministe, « Les Hardies », soupçonné de complicité dans le meurtre d’un mari violent par sa femme. Et qui, alors que ses membres la surprennent… sortant de son commissariat, invente, pour sauver sa couverture, qu’elle sortait d’un dépôt de plainte pour agression sexuelle… Il n’y a sur le papier que des coups à prendre dans l’idée de faire d’un faux témoignage sur des VSS un rebondissement scénaristique. Sauf que Leclerc n’est ni un kamikaze, ni un provocateur. Et qu’il ne fait ici que prolonger ce que constitue le cœur de son cinéma depuis Le Nom des gens. Cette manière de parler d’engagement par le prisme d’une espièglerie qui dédramatise les choses sans les nier. Car ce que raconte ce scénario finement ciselé, c’est l’impact de Metoo chez les femmes comme chez les hommes. Les certitudes qu’il a renforcées ou balayées. Les réactions épidermiques comme à fragmentation lente qu’il a suscitées. Un film inconfortable mais jamais dérangeant. Une manière de ne pas réduire une question essentielle à des cris d’orfraie entre progressistes et réacs. Un film qui fait un bien fou.

Thierry Cheze

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LETTRES SICILIENNES ★★★★☆

De Fabio Grassadonia et Antonio Piazza

Après les remarqués Salvo et Sicilian Ghost Story, le duo de cinéastes Fabio Grassadonia et Antonio Piazza conclut ici sa trilogie consacrée à la mafia sicilienne. Tiré de l’histoire vraie de Matteo Messina Denaro, arrêté en 2023 après trente ans de fugue, le récit se focalise sur un homme politique nommé Catello, qui sort de prison et se voit approché par les services secrets italiens afin de piéger son propre filleul Matteo, le fameux chef mafieux recherché. Lettres siciliennes a la bonne idée de montrer comment cette cavale, plutôt que de constituer une aventure épique, fait écho à des sentiments de déchéance généralisée et d’absurdité morale au cœur d’une Sicile qui apparaît comme un territoire jonché de ruines et vidé de toute grandeur d’âme. Entre onirisme et pesanteurs familiales, les cinéastes dépeignent avec beaucoup d’inspiration stylistique les ravages du narcissisme. En état de grâce, Toni Servillo et Elio Germano donnent parfaitement corps à ces personnages solitaires prisonniers d’une fatalité contre qui l’éclatant soleil sicilien ne peut rien.

Damien Leblanc

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PREMIÈRE A AIME

RAPIDE ★★★☆☆

De Morgan S. Dalibert

Une jeune femme (un super premier rôle pour Paola Locatelli) accro à la vitesse rêve de piloter des Formule 1 et s’engage dans une école pour futurs pilotes de course. Si vous avez deux sous de jugeote, vous savez à peu près comment tout cela va se dérouler et va finir. Et pourtant, Rapide fonctionne à plein. La réussite du film réside simplement dans son efficacité. Son héroïne veut assumer sa trajectoire sans être aimable, sans tricher, comme le film tente de ne pas tricher. Imaginez une production Besson mais dépouillée de tous ces tics beaufs, genre les mafieux, les flics et les sex workers, pour ne conserver que le plaisir d’un bon film de sport automobile.

Sylvestre Picard

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COMMENT DEVENIR RICHE (GRÂCE A SA GRAND- MERE) ★★★☆☆

De Pat Boonnitipat

Le plus gros succès thaïlandais de 2024 débarque en France et on ne saurait trop vous conseiller d’aller à sa découverte tant celui- ci échappe en permanence à ce qu’on pense qu’il est. On y suit un jeune homme qui, sachant sa grand- mère malade, décide de se rapprocher d’elle en espérant décrocher son héritage, tout en devant intriguer contre ses oncles et même sa propre mère, aussi sensibles que lui au pactole possible. La grande réussite de ce film est le voyage qu’il propose du cynisme à la tendresse, au fil de l’évolution des rapports entre cette grand- mère- dupe de rien – et son petit- fils. Le tout sans changement artificiellement radical dans l’écriture des personnages et avec une cruauté finement distillée. Un climat de force tranquille règne dans ce film qui a aussi le mérite de ne jamais « occidentaliser » son propos, quitte à ce que des références culturelles et cultuelles nous manquent pour tout saisir

Thierry Cheze

KYUKA- AVANT LA FIN DE L’ETE ★★★☆☆

De Kostis Charamountanis

Un père emmène ses enfants en vacances sur l’île grecque de Poros sans leur dire que leur mère veut les revoir. Le frère et la soeur rencontrent à leur insu cette génitrice qui les a abandonnés quand ils étaient bébés… Faut-il renouer ou casser définitivement ce lien ténu avec leurs origines ? Passé par l’ACID au dernier festival de Cannes, le premier film de Kostis Charamountanis va chercher dans le même mouvement l’insouciance de la jeunesse et les blessures enfouies. Gros chantier, dont les fondations reposent sur une foi absolue en son épatant casting et une artificialité assumée (le format 1:33 et le grain façon film de vacances sépia, les arrêts sur image, une scène clé audacieusement déroulée à l’envers…). Ces expérimentations formelles font parfois perdre l’équilibre à Kyuka…, qui finit cependant toujours par retomber sur ses pattes en refusant de laisser la mélancolie le dévorer.

François Léger

L’AGNEAU ★★★☆☆

De Cheyenne- Marie Caron

A l’écart de toutes les modes, Cheyenne Carron creuse le sillon d’un cinéma spirituel questionnant les dérives de la société et la réponse que l’Eglise peut y apporter. Après un film sur le meurtre du père Hamel, la voilà qui s’empare des abus sexuels en mêlant deux histoires. Celle d’un père coupable d’attouchements sur sa fille et celle du curé, injustement accusé par une petite paroissienne. L’oecuménisme audacieux, la mise en scène au plus près des personnages, et la louable quête de vérité rendent ce film potentiellement casse-gueule, assez irréprochable malgré (ou à cause de) son austérité et sa candeur.

Gaël Golhen

LA FIN DES SLOWS ★★★☆☆

De Laurent Metterie

Pour ce documentaire, Laurent Metterie est allé à la rencontre de quinze couples de toutes générations, toutes orientations sexuelles et toutes origines socio- professionnelles pour les questionner sur le quotidien de leurs vies à deux, de leur manière de vivre leur relation amoureuse à la répartition des charges ménagères au quotidien en passant par l’éducation des enfants. Metterie se révèle un confesseur hors pair. Et la confiance qu’il crée chez ses interlocuteurs permet des témoignages où profondeur et légèreté ne font souvent qu’un. Une carte postale instantanée de la vie en couple dans la France de 2025 qui vaut autant par les mots qui sont dits que par les regards portés par les compagnons et les compagnes sur ceux ou celles qui partagent leurs vies. Comme s’ils apprenaient eux- mêmes des choses sur ceux dont ils pensaient tout connaître.

Thierry Cheze

CECI N'EST PAS UNE GUERRE ★★★☆☆

De Magali Roucaut et Eric-John Bretmel

“Nous sommes en guerre” déclarait Emmanuel Macron lors de son allocution annonçant la mise en place du confinement. Magali Roucaut et Eric-John Bretmel en prennent le contre-pied dans Ceci n’est pas une guerre, un court film documentant cette étrange période proche de la science-fiction que nous avons tous traversée. Caméra en main pour Magali et téléphone pour Eric, les deux amis arpentent les rues vides de Paris, filment les animaux et les fantômes qui s’y baladent, les rencontres… Le tout donne un rendu un peu fouillis et sans but réel mais qui correspond précisément à ces instants de flottements et de remise en question si spécifiques à cet épisode de la crise sanitaire. On regrette presque que le documentaire ne s’attarde pas davantage sur les discussions téléphoniques entre Eric et son père, pour qui le confinement remue des souvenirs de la Guerre et de sa survie à la déportation des Juifs.

Lisa Gateau

DIMANCHES ★★★☆☆

De Shokir Kholikov

La cour d’une modeste propriété où vit et travaille un vieux couple au milieu de laquelle est installée une estrade qui sert de couchage. Comme chez Ozu, ce Dimanches, premier long-métrage de Shokir Kholikov, affiche une forme d’horizontalité, les corps se reposent entre deux efforts, les gestes lents et précis sont préservés par les remous d’un dehors qui ne sera que partiellement dévoilé. La caméra reste à hauteur, accueille plus qu’elle n’emprisonne les êtres. Le battement du film est au diapason des humeurs : lui, pas commode ; elle, plus docile. Toute personne extérieure qui entre dans le champ apparaît comme une menace à cette quiétude qui ne saurait supporter des injonctions (les rejetons du couple convoitent la propriété sous couvert de vouloir améliorer les conditions de vie de leurs parents) Espace à l’air libre, scène de théâtre où l’humanité toute entière se limiterait à deux âmes sereines. La mise en scène précise et délicate ressent la moindre vibration. Le cinéma à l’état le plus pur.

Thomas Baurez

TOXIC ★★★☆☆

De Saulé Bliuvaité

Repartie de Locarno avec le Léopard d'or, Saulé Bliuvaité signe un premier film aux allures d’anti coming-of-age. En pleine banlieue lituanienne grisonnante, deux adolescentes dénuées de figures parentales stables tentent d’accélérer leur passage à l’âge adulte en sacrifiant leur innocence. Un schéma inversé qui s’amorce lorsque Marija et Kristina intègrent une école de mannequinat locale dans laquelle tout un pan de la féminité s’ouvre à elles : celui des corps mutilés et sous-alimentés, assujettis aux régimes à base de ver solitaire et de coton, entraînant Toxic à la limite du body horror. Mais hors de question pour la réalisatrice de succomber à un quelconque voyeurisme, puisqu’elle filme ses deux actrices de très loin, de très haut, et parfois même à peine dans le cadre. Une distance visuelle qui apporte sobriété et délicatesse au film, dont le sujet n’en demeure pas moins brutal.

Lucie Chiquer

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

AIMONS- NOUS VIVANTS ★★☆☆☆

De Jean- Pierre Améris

La fin de vie est décidément la thématique en vogue de ce début 2025. Après La Chambre d’à côté et Le Dernier souffle, on suit Chez Jean- Pierre Améris (Les Emotifs anonymes) Antoine Toussaint, une vedette de la chanson française au bout du rouleau partant en Suisse pour avoir recours au suicide assisté. Un ultime voyage où rien ne va se dérouler comme prévu suite à sa rencontre, dans le train, avec une de ses fans Victoire. Une femme, elle, débordante de vie, ayant obtenu une permission de la prison où elle est incarcérée pour assister au mariage de sa fille. Le duo Gérard Darmon- Valérie Lemercier incarne ce choc des contraires avec une complicité qui constitue le point fort du film. Mais la transparence de la réalisation et plus encore le manque de folie du scénario l’empêchent de décoller. Tout l’inverse du récent On ira qui abordait, lui aussi, ce sujet rude par le prisme de la comédie mais avec une inventivité ici aux abonnés trop absents.

Thierry Cheze

LA REPARATION ★★☆☆☆

De Régis Wargnier

Après plus de dix ans d’absence (son précédent film Le Temps des aveux était sorti en 2014), Régis Wargnier fait son retour au cinéma avec un récit qui traite justement de disparition. On y suit la relation entre le chef d’un célèbre restaurant gastronomique et sa fille de vingt ans qui rechigne quelque peu à prendre sa succession. Quand ce père disparaît mystérieusement lors d’une partie de chasse, sa fille se retrouve alors seule aux commandes… avant de recevoir deux ans plus tard une étrange invitation à Taïwan, où elle décide de se rendre. Renouant avec son goût des grandes fresques et des invitations au voyage, le réalisateur d’Indochine propose une mise en scène qui cultive la sensualité (ici essentiellement culinaire). Mais ce déploiement de moyens visuels finit par tourner légèrement à vide tant il se met au service d’une intrigue répétitive dont la montagne de secrets accouche d’une souris.

Damien Leblanc

HARVEST ★★☆☆☆

De Athina- Rachel Tsangari

Le charisme singulier de Caleb Landry Lones, la beauté de la lumière aux couleurs vives et chaudes de Sean Patrick Williams, le sens aiguisé du cadre d’Athina Rachel Tsangari (Attenberg)… On se laisse facilement embarquer par cette plongée au cœur d’un village et de ses coutumes, sorte d’Eden luxuriant coupé du reste du monde sans savoir précisément ni où ni à quelle époque on se trouve. Le mystère opère. Mais on comprend aussi vite que la forme va finir par poser une chape de plomb étouffante sur le récit. Et qu’après une interminable phase d’installation, l’arrivée du cousin du seigneur des lieux qui va prendre possession de ce village et transformer ce paradis même imparfait en enfer ne changera rien à l’affaire. Ce parti pris de mise en scène ouaté combiné à la faiblesse d’amplitude dans l’écriture des différents personnages entraîne même cette variation autour des jeux de pouvoir à la limite de la caricature pataude.

Thierry Cheze

OXANA ★★☆☆☆

De Charlène Favier

Découverte en 2020 avec le remarquable Slalom sur l’emprise mentale et sexuelle dans le sport, Charlène Favier a choisi pour son deuxième long de dresser le portrait d’Oxana Chatchko, l’une des co- fondatrices du mouvement FEMEN. Un personnage sans concession que la cinéaste raconte avec admiration sans pour autant verser dans l’hagiographie, ne cachant rien des dommages collatéraux de son jusqueboutisme qui explique sa rupture avec les autres FEMEN. Mais tout au long de ce récit – à commencer par ce parti pris artificiel et mal exécuté de construction en flashbacks et flashforwards – on ne cesse de se demander ce que la fiction apporte de plus qu’un documentaire. Elle permet certes de montrer une scène aussi puissante que celle où ces FEMEN se sont retrouvées menacées d’être brûlées vives en pleine forêt par des agents biélorusses dont il n'existe de fait aucune image. Mais, pour le reste, la fiction atténue la puissance et la radicalité de son personnage et de son sujet.  

Thierry Cheze

FESTA MAJOR ★★☆☆☆

De Jean- Baptiste Alazard

D’abord une voix-off un peu étrange et des corps alanguis, grimés, comme mélangés face à un soleil qui se lève. Une ambiance de nuit blanche, de lendemain de fête. Puis des vues magnifiques du village de Fillols (Pyrénées-Orientales) révèle un cadre majestueux. Le documentaire de Jean-Baptiste Alazard cherche à faire coïncider deux espace-temps : un présent rattaché à un passé séculaire qui impose des traditions (ici un certain sens de la fête) On se sent parfois exclu de la piste de danse avant qu’une âme charitable nous y entraîne à nouveau.

Thomas Baurez

 

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