Quentin Tarantino sortant du Grand Rex
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Le cinéaste était présent ce mercredi à Paris pour une masterclass autour de son livre Cinéma Spéculations, durant laquelle il est revenu sur sa découverte et son amour du cinéma, tout en balançant des infos sur The Movie Critic, son 10ème et dernier film.

Ce mercredi 29 mars, une foule en délire se presse aux abords du Grand Rex, à Paris, pour rentrer au plus vite dans la plus grande salle de cinéma d’Europe. Après Bong Joon-Ho le mois dernier pour une discussion autour de son film The Host, fraîchement restauré et ressorti en salle, au tour de Quentin Tarantino de se prêter à l'exercice, dans le cadre d’une tournée organisée pour la sortie de son ouvrage Cinéma Spéculations, disponible depuis le 20 mars en France. Un livre de près de 500 pages où il revient avec passion sur sa vie de cinéphile, enfilant à l’occasion sa casquette de critique et d’historien du cinéma.

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Pour venir l’écouter, il faut débourser entre 44 et 77 euros, prix élevé comparé aux masterclass organisées par la Cinémathèque Française. La venue de Tarantino étant toutefois un événement rare dans la capitale parisienne, la salle affiche complet. Durant l’heure d’attente qui précède la rencontre, où les téléphones sont confisqués dans des pochettes à la fermeture métallique, la musique du parfait cinéphile résonne, avec en point d’orgue le saxophone de Bernard Herrmann sur Taxi Driver. Quentin Tarantino finit par débarquer à 20h sur la scène telle une rock-star, accueillie par les cris de certains spectateurs en transe et le délégué général du Festival de Cannes Thierry Frémaux, qui anime la conversation. La persona d’un cinéaste, idée que l’on croyait aujourd’hui disparue, apparaît ici plus vivante que jamais, avec un public composé en majorité de jeunes personnes. Tarantino, au côté de Steven Spielberg et de Martin Scorsese, est l'un des derniers auteurs de cinéma à jouir d'une immense popularité. Alors qu’il vient de fêter ses 60 ans, le réalisateur est revenu sur sa carrière, non pas celle sur celle de réalisateur, mais bien sur celle de cinéphile à part entière, nouveau critique et historien du cinéma, conclut par une lecture en majesté du premier chapitre de son livre. Voici 5 informations à retenir de la “Cinema Speculation Conversation” de Quentin Tarantino au Grand Rex.

Son dernier film, The Movie Critic, ne sera pas sur Pauline Kael…

Commençons par la fin : après plus d’une heure de conversation autour de sa cinéphilie, Thierry Frémaux se lance et pose la question que tout le monde attend : Que sera exactement The Movie Critic, son sujet, sa date de sortie ? Quentin Tarantino a tout dévoilé pour l’occasion. Contrairement à ce qui avait été rapporté par The Hollywood Reporter le 14 mars dernier, son 10ème, et à priori, dernier film, garde bien son titre mais ne sera pas sur la critique de cinéma Pauline Kael. Le récit se déroulera néanmoins à la fin des années 1970, en 1977 plus précisément, avec un personnage principal qui sera finalement masculin. Le cinéaste a également confirmé que le tournage devrait commencer à l’automne prochain, bien qu’il soit toujours en train d’ajuster son scénario aujourd’hui. “One Final Draft” (une dernière ébauche), selon ses propres mots.

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Son réalisateur préféré du Nouvel Hollywood est Brian de Palma

C’est une étape obligatoire quand le cinéma américain des années 1970 revient sur la table. Après avoir séparé deux catégories de réalisateurs du Nouvel Hollywood, ce mouvement cinématographique important de la fin des années 1960 et du début des années 1970 qui a vu naître une nouvelle génération de cinéastes, Tarantino s’est attardé sur le mouvement des “brats”, qui se compose de Steven Spielberg, Francis Ford Coppola, Martin Scorsese, George Lucas (qualifié pour l’occasion de “sexy motherfucker”) et… Brian de Palma, que Tarantino considère comme son favori, si ce n’est le meilleur d'entre eux. Il est notamment revenu sur le lien que celui-ci entretient avec le cinéma d’Alfred Hitchcock dans les années 1970 et 1980, avec des films comme Soeurs de Sangs, Pulsions et Obsession, qualifiant le réalisateur "d’hippie” réinventant certains codes de films anciens. Tarantino revient également sur sa rencontre avec le cinéaste, marié à l’époque à la productrice Gale Anne Hurd, qui l’avait longuement félicité pour son premier film Reservoir Dogs en 1992. 

Il a également évoqué le cinéma de réalisateurs de la génération précédente, pionniers de l’autre catégorie du Nouvel Hollywood, tels que Sam Peckinpah, et plus particulièrement George Roy Hill, réalisateur de Butch Cassidy et le Kid et L’Arnaque, immenses succès populaires lors de leurs sorties. Le cinéaste s’est attardé sur La Castagne, film méconnu en France consacré à une équipe de hockey médiocre et vieillissante menée par Paul Newman. “Si je devais écrire sur un film de George Roy Hill, ce serait probablement celui-ci !

Brian de Palma
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Il ne veut rien imposer à ses enfants concernant son cinéma

Thierry Frémaux est revenu, pendant quelques instants, sur la vie privée du cinéaste, et notamment sur les rapports qu’il entretient avec ses deux enfants, dont son jeune fils de 3 ans Léo, né de son union avec la chanteuse israélienne Daniella Pick. Pour lui, pas question d’imposer à ses enfants de regarder ses propres films. “Ils devront attendre l’âge de 8 ans !” plaisante-t-il, avant d’affirmer que le premier par lequel ils seront probablement attirés sera… Kill Bill, pour sa dimension éminemment pop. Pour rappel, le premier film que le réalisateur a montré à son fils était… Moi, Moche et Méchant 2, choix étonnant, mais probablement plus correct pour un enfant de moins de 2 ans à l’époque.

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Il a découvert le cinéma avec sa mère et ses beau-pères

La masterclass a notamment été suivie par la lecture du premier chapitre de Cinéma Spéculations, où tel un prédicateur, il est revenu sur sa découverte du cinéma auprès de sa mère et de son beau-père, où plutôt de ses différents beaux-pères. Il a notamment évoqué le lien qui l’unit au cinéma, et notamment la rencontre importante avec Curt', son beau-père pianiste de jazz, qui était une source d’inspiration pour le jeune Quentin, avant que celui-ci ne lui fasse découvrir le cinéma à l’âge de 7 ans. Plusieurs anecdotes croustillantes, reprises dans le livre, ont pour l'occasion été ressassées, telles que sa découverte de la violence et de la sexualité dans les films, qu’il appréciait sans véritablement la comprendre, devenue la marque de fabrique de son cinéma qu’il reprendra dans une grande majorité de son oeuvre. Autre anecdote pour le moins amusante : sa mère lui interdisait d’aller voir des films comprenant de la violence si celle-ci était gratuite. Elle se devait d’avoir un intérêt narratif, et non un bain de sang totalement gratuit… On peut dire que la leçon a été comprise.

New Beverly Cinema
New Beverly Cinema

Il préfère une "pellicule merdique" au numérique

Depuis 2007, Quentin Tarantino est le propriétaire d’une salle de cinéma à Los Angeles, le New Beverly Cinema, qu’il enrichit chaque mois d’une programmation éclectique, qui lorgne majoritairement vers le cinéma des années 1970. Seule règle tacite et immuable : le cinéma ne projette que des films en pellicule 35mm, avec quelques exceptions pour le 16mm. Le cinéaste est catégorique : il refuse d’y projeter du numérique, à l’image de ses propres films, tous réalisés sur celluloïd, avec des projections en 70mm pour certains d’entre eux, format très apprécié chez les cinéphiles pour son format d’image extra large. Quand Thierry Frémaux tente de lui tirer les vers du nez en lui demandant de “choisir entre une pellicule merdique et une copie numérique de bonne qualité”, QT reste catégorique : “une pellicule merdique !

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