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Et sa résurrection, grâce à sa plateforme de streaming.

Nicolas Winding Refn est venu au Festival Lumière faire la pub de son site byNWR.com et il est en forme. "Etes-vous le nouvel Henri Langlois ?", lui demande-t-on en conférence de presse.  Réponse : "Oui, en plus beau gosse". Pince-sans-rire et tiré à quatre épingles, le punk danois à qui l'on doit Drive, après s’être chauffé devant les journalistes, est monté sur la scène de l’Institut Lumière, où il a livré un happening anthologique, annonçant très officiellement la mort du cinéma. Sortant son iPhone de sa poche, pendant que Thierry Frémaux faisait mine de s’étouffer, il a enclenché le chrono et demandé aux spectateurs de méditer pendant dix secondes au décès du septième art. Puis il a repris le micro pour fièrement annoncer… la résurrection du cinéma ! Rires dans la salle. Ouf. Thierry Frémaux reprend des couleurs.

Nicolas Winding Refn va écrire sa première série criminelle

Se présentant comme "le troisième frère Lumière", NWR s’est dit très fier d’être dans la ville de naissance du cinématographe, rue du premier film, pour annoncer que le cinéma venait de renaître de ses cendres, là, sous nos yeux. La première étape de cette résurrection, si on a bien tout compris, sera donc le lancement en février prochain de byNWR.com, une "plateforme évolutive de contenus" (dixit le communiqué de presse), dédiée à des bizarreries oubliées de l’histoire du cinéma. Un peu comme un pendant VOD de son livre L’Art du Regard. Refn entend mettre en ligne gracieusement des raretés cinématographiques restaurées à ses frais (il assure pouvoir financer tout ça grâce à l’argent qu’il gagne en tournant des pubs), accompagnées de textes, d’essais, de vidéos, de photos, de documents rares, etc. "Le futur de l’entertainment, c’est la gratuité", a expliqué le cinéaste, qui choisira de montrer des films "bons ou mauvais, peu importe" (la distinction n’a aucun sens à ses yeux), du moment qu’ils sont portés par une vision personnelle. Le tout premier de ces films sera un incunable de 1965 intitulé The Nest of the Cuckoo Birds, dont Refn a raconté l’histoire très underground  :

"Ce film n’a été vu par personne. Mais les Cramps ont écrit une chanson dessus, intitulée The Nest of the Cuckoo Birds, et le film est devenu une légende urbaine au sein du mouvement punk. Le poster original a été mis aux enchères et s’est vendu 8000 dollars. Un jour, il y a 18 mois, j’ai reçu un coup de fil du département cinéma d’Harvard, me disant qu’ils avaient trouvé une copie dans les caves d’un vieux cinéma. J’ai payé pour la restauration, ça m’a coûté 30 000 dollars. Et puis j’ai vu le film… (là, Refn a fait une tête signifiant qu'il n'avait pas déniché un nouveau Citizen Kane - ndlr) Je n‘ai jamais rien vu de pareil ! Disons que c’est comme un film de John Waters mais sans John Waters. Le réalisateur Bert Williams n’a fait qu’un film dans sa vie. Mais son nom est mentionné au générique plus de fois que n’importe quel autre réalisateur de l’histoire du cinéma. Je suis bien sûr extrêmement jaloux. C’est un film fait par un artiste, au début des sixties, un artiste bohémien qui vivait en Floride, et qui raconte son expérience de la Seconde Guerre mondiale. La vie de Bert Williams est passionnante, il y aura de la documentation et des photos sur le site pour accompagner la découverte du film. Parce que pour imaginer le cinéma du futur, il faut comprendre le cinéma du passé." D'autres trésors cachés suivront, dont Night Tide (où Dennis Hopper tombe amoureux d'une sirène), à raison d'un par mois. Et vive le cinéma !