Cannes 2021 : Le tapis rouge de Bac Nord
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Cannes 2021 : François Civil, Gilles Lellouche, Cedric Jimenez, Adele Exarchopoulos, Kenza Fortas, présentent Bac Nord hors compétition
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Cannes 2021 : Idir Azougli, Karim Leklou, François Civil, Gilles Lellouche, Cedric Jimenez, Adele Exarchopoulos, Kenza Fortas, Hugo Selignac, Cyril Lecomte et Vincent Darmuzey présentent Bac Nord hors compétition
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Cannes 2021 : Adèle Exarchopoulos et Kenza Fortas à la montée des marches de Bac Nord
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Cannes 2021 : Les acteurs de Bac Nord s'éclatent !
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Cannes 2021 : Adèle Exarchopoulos sur le tapis rouge de Bac Nord
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Cannes 2021 : François Civil sur le tapis rouge de Bac Nord
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Cannes 2021 : Gilles Lellouche sur le tapis rouge de Bac Nord
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Cannes 2021 : Adèle Exarchopoulos et Kenza Fortas à la montée des marches de Bac Nord
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Cannes 2021 : Toute l'équipe de Bac Nord monte les marches
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François Civil et Gilles Lellouche dans Bac Nord
StudioCanal
Karim Leklou et François Civil dans Bac Nord
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Gilles Lellouche dans Bac Nord
Jérôme MACE/Chifoumi Productions
Première n°513 : François Civil, Gilles Lellouche et Karim Leklou sont en couverture pour Bac Nord
Première
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Cannes 2021 : François Civil, Gilles Lellouche, Cedric Jimenez, Adele Exarchopoulos, Kenza Fortas, présentent Bac Nord hors compétition
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Gilles Lellouche dans Bac Nord
Première n°513 : François Civil, Gilles Lellouche et Karim Leklou sont en couverture pour Bac Nord

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Cannes 2021 : Toute l'équipe de Bac Nord monte les marches

François Civil et Gilles Lellouche dans Bac Nord

Karim Leklou et François Civil dans Bac Nord

Gilles Lellouche dans Bac Nord

Première n°513 : François Civil, Gilles Lellouche et Karim Leklou sont en couverture pour Bac Nord

Rencontre avec François Civil et Gilles Lellouche, acteurs du thriller marseillais de Cédric Jimenez à (re)voir ce dimanche sur France 2.

Bac Nord, de Cédric Jimenez, est porté par François Civil, Karim Leklou et Gilles Lellouche. Il aurait dû sortir en décembre 2020, au cinéma, si bien que le trio avait fait la couverture de Première (n°513), au moment où la rédaction avait eu un coup de coeur pour ce thriller "coup de poing".

Finalement, sa sortie française a été repoussée au 18 août de l'année suivante, et il a été sélectionné à Cannes 2021, hors compétition. L'occasion de partager notre interview de Civil et Lellouche, ainsi que les plus belles photos de l'équipe lors de leur montée des marches. Adèle Exarchopoulos a notamment fait sensation sur la Croisette, rayonnante aux côtés des deux comédiens, mais aussi de Kenza Fortas ou Karim Leklou, qui complètent le casting.

Si Bac Nord a globalement reçu de bonnes critiques, il a aussi fait l'objet de récupérations politiques qui ont irrité son réalisateur. Sa première diffusion en clair, ce dimanche sur France 2, entraînera-t-elle de nouveau des discussions animées ?

Bac Nord est aussi percutant que passionnant [critique]

Interview initialement publiée en décembre 2020.

 

La triste année 2020 a au moins eu le mérite de démocratiser les rencontres virtuelles. Sans cela, aurait-on pu réunir aussi facilement Gilles Lellouche, en tournage à Vilnius (Lituanie) du film de Jérôme Salle, Kompromat, et François Civil ? Les deux acteurs ne se sont en tout cas pas fait prier pour répondre à nos questions sur Bac Nord, le thriller de Cédric Jimenez dans lequel ils campent brillamment, avec un troisième larron, Karim Leklou, des flics de la BAC Nord de Marseille, en butte à la grande délinquance et à leur hiérarchie. L’occasion pour eux de revenir sur cette expérience professionnelle et surtout humaine.

PREMIÈRE : Cédric Jimenez vous a tous les deux choisis sans vous faire passer d’essais. Est-ce la bonne façon de vous mettre dans les meilleures conditions ?
GILLES LELLOUCHE : Pour moi, c’est la continuité d’un travail entamé avec La French. Cédric m’a parlé très tôt du projet, avant même qu’il ne l’écrive…
FRANÇOIS CIVIL : De mon côté, c’est récent qu’on me fasse des propositions fermes. Je sais que pour ce rôle, Cédric avait envisagé à un moment de faire du casting sauvage à Marseille, avant que mon nom ne sorte. Je l’ai rencontré avant de lire le scénario. Et sur cette simple première rencontre, j’avais le feeling que j’allais dire oui. En raison de son énergie, de sa vision, de sa manière de parler de cette histoire. La lecture a achevé de me convaincre : pour son efficacité et parce qu’il y avait de la marge pour insuffler de la vie à ce trio.
GL : Pour rebondir sur l’énergie dont tu parles, je me souviens de ma première rencontre avec Cédric juste avant La French. J’y allais un peu à reculons, car j’avais fait beaucoup de polars. Je n’avais pas très envie de faire le film, mais son énergie était tellement bouillonnante, il m’a tellement noyé de phrases, de paroles sur ce qu’il allait faire que j’en suis reparti en me disant que soit ce type était un grand metteur en scène en devenir, soit c’était le plus grand mytho que j’avais pu rencontrer ! J’ai décidé de le suivre mais j’avais dit à Jean [Dujardin] que je comprendrais s’il décidait de ne pas tourner le film.
FC : On a envie de suivre Cédric au bout du monde. Même si on ne comprend pas tout, tout le temps.

Gilles, vous a-t-il parlé des autres acteurs qui étaient envisagés ? Votre approbation comptait-elle ?
GL : Il m’a parlé très tôt de François, puis de Karim [Leklou], mais pas pour que j’approuve. Il se trouve que j’étais fou de joie à l’idée de travailler avec eux. Après, dans l’absolu, j’aurais pu en effet mettre mon veto. Je ne suis pas l’abbé Pierre, il y a forcément des gens que j’estime plus que d’autres. Mais c’est idiot de raisonner comme ça : on ne connaît jamais quelqu’un de A à Z.

François, comment a réagi Cédric Jimenez quand vous lui avez proposé de prendre une pointe d’accent marseillais ?
FC : Il y a eu une espèce de non-dit à ce sujet. Je savais que, pour Cédric, mon personnage était celui qui avait grandi dans les quartiers Nord, comme le flic dont il est inspiré. Mais je ne savais pas vraiment s’il voulait que je prenne cet accent ou pas. Du coup, un jour, j’ai pris mon téléphone pour en parler. Je lui ai dit que j’essaierais, puis j’ai bossé dans mon coin. Aller le voir pour lui faire une proposition a été source de stress, mais ça a suffi à le convaincre.
GL : Cédric est très ouvert par rapport à ça. Chacun de nous a pu s’approprier son rôle, remodeler son profil, sa vie familiale. Les personnages du film ne sont plus tout à fait ceux qui sont dans le scénario. On a tous vite compris qu’il fallait s’éloigner des clichés des flics avec moustaches et vestes en cuir. On voulait faire quelque chose de plus humain, voire de plus enfantin. Mais je veux souligner l’audace de François, car sur La French, je n’avais pas eu, moi, le culot de prendre l’accent alors que mon personnage était un pur produit marseillais. Je craignais d’abîmer le film si je le faisais mal. Ce que fait François avec l’accent est extraordinaire car on ne se pose pas une seconde la question de sa véracité.
FC : C’est aussi parce qu’on est parti sur un truc léger.
GL : Mais que ce soit l’accent pour toi ou la décision de porter des boucles d’oreille pour moi, ce sont des choses qui nous font rentrer dans les personnages. Et ce n’est pas si commun de tenir de tels rôles de composition en France.

Ce film parle des policiers, sujet sensible dans le monde d’aujourd’hui. Est-ce qu’on lit le scénario en s’interrogeant sur la manière dont le film va s’inscrire dans le débat autour de cette question ?
GL : Les débats sur les réseaux sociaux me fatiguent. Je ne crois pas que le film soit sujet à polémique, il raconte ce qu’il a à raconter, point. On peut toujours trouver un moyen de polémiquer mais je m’en contrefous. Être anti-flics aujourd’hui alors qu’on les célébrait au moment du Bataclan n’a pas de sens pour moi. On manque d’objectivité et de justesse. Je ne suis ni pro ni anti-flics. Je veux juste que les gens soient éclairés sur la complexité de ce métier ; comme sur la complexité de vivre en banlieue aujourd’hui. Je n’ai pas de camp à choisir. Bac Nord raconte l’histoire de trois types broyés par une machine qui donne des ordres un jour et des contre-ordres le lendemain.
FC : Aujourd’hui, on veut faire de tout quelque chose de politique. Ici, ce n’est pas politique mais sociétal : le film nous renvoie un miroir de la France à travers des fonctionnaires de police.

Karim Leklou et François Civil dans Bac Nord
StudioCanal

Gilles, qui est le boss de cette BAC, était-il aussi le chef de bande sur le plateau ?
FC : Total patron ! (Rires.) Une vraie rencontre. Depuis que je suis tout jeune, excuse-moi Gilles, je suis son parcours et j’admire le risque qu’il prend à faire des polars quand c’est moins à la mode, puis à changer de registre en tournant des films comme Pupille… Sur le plateau, il faisait autant de propositions pour son personnage que pour les nôtres. Il pesait aussi plus que nous face à Cédric. Il mettait moins les formes.
GL : Pour moi, c’était très revigorant de voir la concentration de François. Tu lui parles de n’importe quoi, il va s’enfermer dans sa loge, prendre son téléphone et regarder tout ce qu’il trouve sur le sujet pour pouvoir bien en parler. C’est quelqu’un de très en alerte et de vivant. Karim, c’est un acteur d’un instinct incroyable qui n’est jamais là où on l’attend. J’ai surfé sur leur énergie, c’était comme un bain de jouvence.

Question transmission, la génération de Depardieu se plaignait que celle qui l’avait précédée ne lui ait pas tendu la main. Daniel Auteuil expliquait, lui, qu’il l’a fait en prenant de l’âge, quand il ne voyait plus les autres comme des concurrents. C’est ce que vous avez ressenti ?
GL : Il n’y a pas non plus beaucoup d’acteurs de la génération précédente qui m’ont tendu la main. C’est une tradition, apparemment… Je trouve ça complètement con. La seule chose que je peux entendre là-dedans, c’est le refus du temps qui passe. On a toujours l’impression qu’on est resté bloqué à 38 ans ! Après, soit on est lucide et on accepte de nouveaux emplois, soit on se croit l’éternel jeune premier. Je préfère évidemment la première hypothèse. Elle permet d’ouvrir les yeux sur le monde qui nous suit. Et il est beau le monde qui nous suit ! Je prends plus de plaisir à regarder ces jeunes qu’à vivre mon film tout seul dans mon coin, comme un couillon. Tu apprends de leur façon différente d’approcher le métier et tu te nourris de leur rage, tout en partageant modestement ton expérience.
FC : Il ne faut jamais perdre de vue que le cinéma est une aventure collective et que, sans les autres, on n’est rien. C’est très bateau, mais très juste. Il y a des gens comme Gilles qui l’ont compris et abordent chaque film avec un oeil neuf et l’envie de faire voler en éclats leurs acquis. D’autres sont plus centrés sur eux-mêmes.

Vous avez tous les deux abordé ce métier en bande. Celle de Guillaume Canet pour Gilles, et celle de Pierre Niney pour François. C’est essentiel dans un métier de solitaire ?
GL : Je dirais qu’on exerce plutôt un métier collectif dans lequel on peut se retrouver très seul. Je suis actuellement à Vilnius, dans une chambre d’hôtel, avec mon texte à apprendre, sans famille ni potes. Ça va durer pendant plus de deux mois. Sur BAC Nord, c’était l’inverse : on formait une vraie famille 24 heures sur 24. Avec François, j’ai l’impression qu’on aime la meute et l’euphorie qui en découle. Ce n’est pas pour rien que j’ai réalisé Le Grand Bain. Pour répondre plus précisément à votre question, je n’ai jamais été fasciné par les stars solitaires, j’ai toujours trouvé ça plus pathétique qu’enivrant. C’est une question de nature.

Dans la bande, on ne monte pas tous au même niveau, tout de suite. En souffre-t-on ?
GL : Je n’ai jamais été jaloux du succès de mes petits camarades, je l’ai toujours vécu comme quelque chose de galvanisant. Quand je voyais Marion [Cotillard], que je connaissais depuis quinze ans, recevoir son Oscar, j’étais admiratif de ce qu’elle avait accompli. Ça me poussait vers le haut. J’ai connu des gens aigris, mais c’était parce qu’ils ne travaillaient pas. Dès lors que tu as la chance de t’exprimer, il faut savourer. Après, tu auras toujours quelqu’un qui réussit mieux que toi, qui fait du cinéma d’auteur alors que tu es coincé dans la comédie, et inversement. Si tu t’y attardes, tu n’en sors jamais.
FC : On est tous des Salieri dans la vie, avec un Mozart au-dessus de nous ! (Rires.) Une fois qu’on a accepté ça, on peut avancer. J’ajouterais que la réussite de mes camarades, je la prends aussi un peu pour moi, comme quand Pierre [Niney] a remporté le César pour Yves Saint Laurent. Il faut être philosophe, savoir se contenter de travailler comme dit Gilles. Même si on est tous des êtres d’ambition qui rêvons d’avoir de beaux rôles en permanence.

Vous parliez, Gilles, des stars solitaires. Mais, même Bébel et Delon, au plus fort de leur star-power, s’entouraient des mêmes réalisateurs, des mêmes techniciens, des mêmes acteurs.
GL : En l’occurrence, ce sont des acteurs, avec tout le respect que j’ai pour eux, qui sont restés prisonniers du système qu’ils avaient mis en place. Même si Belmondo a toujours tendu la main aux nouvelles générations. La bande, c’est bien, à condition d’en sortir, d’aller se frotter à d’autres univers, d’autres partenaires. La maîtrise absolue des choses est, de mon point de vue, un frein à l’expression. Le trac est un mal nécessaire.

À propos de trac : l’avez-vous eu en tournant la monumentale scène d’assaut au milieu du film dont tout le monde va parler ?
FC : On l’a beaucoup préparée. Il faut savoir qu’elle représente quinze jours de tournage, un vrai film dans le film, avec 150 figurants. Je m’étais bien entraîné, ce qui ne m’a pas empêché de me claquer la cuisse le premier jour en tapant un sprint ! (Rires.) J’ai un peu boité ensuite.
GL : J’aimerais bien boiter comme lui, hein ! (Rires.)
FC : Ce qui était intéressant, c’est la façon dont Cédric a fait sa mise en place. On jouait sans savoir où étaient les caméras pendant cinq minutes d’affilée, chose rare au cinéma où tout est très découpé. On était constamment surpris par ce que faisaient les autres, il y avait un effet d’entraînement dingue. Les figurants, qui n’en étaient pas vraiment puisqu’ils avaient de vraies interactions avec nous, ont été exceptionnels, ils se prenaient au jeu comme nous. À la fin de chaque prise, tout le monde était heureux, on se tombait dans les bras les uns des autres.
GL : On avait le sentiment qu’on avait fini le film alors qu’on venait seulement de commencer. C’était une lessiveuse, ces quinze jours ! On ne s’est posé aucune question. Pas de psychologie, il fallait foncer, suivre Cédric. Quand ça canardait dans l’appartement, avec des balles à blanc, je peux vous assurer qu’on croyait qu’on allait mourir !
FC : Le gars des flingues est venu voir Gilles. Il lui a dit : « Il va y avoir des rafales d’Uzi, tu veux des boules Quiès ? » Gilles a répondu non. Forcément, j’ai suivi. À la première rafale, Gilles et moi nous sommes regardés, complètement déphasés. Ça nous avait explosé les tympans ! (Rires.) On a couru récupérer des boules Quiès du coup.

Cédric Jimenez : Itinéraire d’un minot gâté

Cette scène d’assaut renvoie à celle des Misérables. Cédric Jimenez nous a dit qu’il n’avait pas voulu voir le film de Ladj Ly avant de tourner. Et vous ?
GL : Une anecdote, d’abord. J’ai été invité à un anniversaire au mois d’avril 2019, cinq mois avant d’entamer le tournage de Bac Nord. Il y avait notamment Kim Chapiron de Kourtrajmé qui me parle d’un film sur des mecs de la BAC, en banlieue parisienne. Il m’assure que c’est un chef-d’oeuvre. Les Misérables va à Cannes et rencontre ensuite le succès qu’on connaît. Autant vous dire que nous avions le spectre de ce film au-dessus de nos têtes. Cédric nous a demandé de ne pas le voir pour être totalement sereins. Il a eu raison.
FC : Qu’aurait-on gagné à le voir en amont ? C’était perdant-perdant. Soit on se trahissait si c’était trop similaire, soit on se mettait une pression dingue pour être à la hauteur. Je l’ai vu depuis. Visuellement, c’est très différent. Il y a un côté plus documentaire dans Les Misérables et un côté fiction plus assumé dans Bac Nord. Eux parlent plus de la bavure et de la violence qu’elle engendre et nous de la faillite du système judiciaire et de la République vis-à-vis des quartiers.

On vit une époque compliquée où l’exploitation des films est menacée. Quel est votre rapport à la salle ?
GL : Je reste un amoureux de la salle, pour l’expérience collective. On peut aussi se féliciter que, pour des raisons économiques, certains films d’auteur voient le jour grâce aux plateformes. Seront-ils meilleurs pour autant ? Ça reste à vérifier. Je n’en ai pas vu énormément de délirants pour l’instant. J’espère idéalement que les salles et les plateformes vont coexister le plus longtemps possible. Je serais très malheureux qu’il n’y ait plus de films en salles.
FC : D’accord avec le patron ! (Rires.) J’ai l’impression que Netflix a produit Scorsese et Cuarón pour se donner une légitimité. Il y a peu de cinéastes qui percent sur les plateformes par ailleurs. L’expérience collective dont parle Gilles me paraît primordiale, sinon chacun reste chez soi, c’est un peu déprimant.

Que pensez-vous de la sortie internationale de BAC Nord sur Netflix alors ?
GL : Je suis très partagé. C’est une grande liberté, et une chance pour le producteur Hugo Sélignac d’amortir les risques qu’il a pris avec le film. Je constate pour ma part que Le Grand Bain a été vendu dans environ 80 pays, j’ai été le défendre un peu partout et, globalement… il n’a marché nulle part à l’exception des territoires francophones. Qu’aurais-je préféré ? Que le film soit vu par des millions de personnes dans le monde sur Netflix ou que je fasse mon VRP de luxe dans plusieurs pays ? Dans le contexte qu’on vit, les plateformes sont salvatrices, c’est indiscutable. Mais attention ! Ce repli sur soi qui nous est imposé est dangereux. On a besoin d’aller vers l’autre, d’échanger. Je ne suis pas inquiet, sauf pour les exploitants qui tirent la langue.


Cédric Jimenez - Novembre : "Il faut faire des films pour les bonnes raisons !"