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Dix cinéastes qui n'ont pas tenu leurs promesses

Kevin Smith, le geek éternel

1994, le monde découvre <em>Clerks, les employés modèles</em>, petit film indé fauché sur deux rats de vidéo club. A l'époque <em>Tarantino</em> sort simultanément <em>Pulp Fiction</em> et la nouvelle cinéphilie américaine, intelligente, postmoderne, réflexive, qui aboutira à <em>Scream</em>, en est à ses balbutiements. Personne ne parle encore des geeks mais <em>Kevin Smith</em> en est un. Il sera même leur parrain, six ans avant qu'<em>Apatow</em> les récupère et devienne leur gourou. Un peu trop fidèle à lui-même et malgré quelques diversions (<em>Père et fille</em>), Smith ne se départira jamais de cette figure de glandeur sympathique, casanova des mall, fan de comics, post ado assumé sans autre ambition qu'habiter sans présence les non lieux américains. Clerks sera le paradigme de son oeuvre, et sa fin. A moins d'un miracle.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma

Mathieu Kassovitz, le rebelle sans cause

Après <em>Métisse</em>, téléfilm inavoué pillant <em>Spike Lee</em>, <em>Kassovitz </em>fait sensation avec <em>La Haine</em>, non film sur la banlieue dont les lascars rient encore. Mais peu importe, sur les plateaux de Canal Plus notre militant anti Le Pen est le héros d'une génération qui ne lui a rien demandé. A y repenser, comme petit film d'errance urbaine, délesté de tout conditionnement sous cellophane sociologique, c'était pas si mal La Haine. C'est ensuite que les choses se gâtent et que notre rebelle sans cause (sinon le ronron ambiant) s'enlise. <em>Assassin(s)</em> achevant dans le ridicule sa période de post ado militant, Kasso se recycle en super artisan pour thriller foireux (<em>Les Rivières pourpres</em>), avant de partir se vautrer au States (<em>Gothika</em>) pour finir sur un nanar king size (<em>Babylon A.D.</em>). Royal.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma 

George Miller, l'ami des bêtes

De la riche et méconnue nouvelle vague australienne, peu ont survécu. Il y a notre favori, le grand <em>Peter Weir</em>, voguant depuis vers les cotes d'Hollywood, puis, loin, un peu oublié (d'où sa présence ici), <em>George Miller</em>. Impossible d'oublier son <em>Mad Max</em>, mythique western post apocalyptique dont le deuxième épisode restera un morceau d'anthologie. Après un troisième opus plus faible et tinaturnerisé, il ne rebondit pas sur un premier succès hollywoodien (<em>Les Sorcières d'Eastwick</em>) et s'égare durant dix ans avant de revenir en ami des bêtes avec le sympathique <em>Babe, le cochon dans la ville</em>. Pas de quoi pourtant nous rappeler son nom puisqu'il disparaît à nouveau durant huit ans avant de signer <em>Happy Feet</em>, fable écolo avec des pingouins. On est loin de Mad Max ? Pas tant que ça.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma 

Wilson Yip, l'étoile filante de Hong Kong

A la fin des années 90, le cinéma hongkongais a changé. La relève des <em>Tsui Hark</em>, <em>John Woo</em> ou <em>Ringo Lam</em> peine à se dessiner. Seul <em>Johnnie To</em>, signant ses premiers chefs d'oeuvre : The Mission, <em>The Longest Nite</em> (officiellement de <em>Patrick Yau</em>), semble annoncer une succession - qu'il incarnera. L'autre lueur d'espoir vient alors de <em>Wilson Yip</em>, peu connu ici, qui en deux films fabuleux (Bullet Over Summer et Juliet in Love) promet monts et merveilles. Ton impromptu, art de l'improbable, sens du mélo, esprit familial et goût des trajectoires impossibles, Yip promet et donne beaucoup. Puis les 00's l'achève, il devient l'homme de main de <em>Donnie Yen</em> (doué mais d'un narcissisme mal canalisé), lancés ensemble dans un revival martial poussif, sans âme, qui ne lui convient pas.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma 

Robert Luketic, le fossoyeur de la comédie romantique

2001, les tours tombent, le monde ne sera plus jamais pareil. Au même moment, <em>Reese Witherspoon</em> joue dans <em>La Revanche d'une blonde</em>. Géniale comédie renversant les préjugés avec intelligence, allure et charme. Aux commandes un inconnu, <em>Robert Luketic</em>. C'est son premier film. On veut y croire, voir en lui une valeur sûre. Mauvaise pioche, film après film, tous les espoirs mis en lui seront anéantis. Après une purge avec <em>J.Lo</em> qu'on espère une erreur de parcours (<em>Sa mère ou moi</em>) et le médiocre <em>Las Vegas 21</em>, il s'enfonce dans les limbes avec <em>L'abominable vérité</em> et <em>Kiss & Kill</em>. Héritant pourtant à chaque fois d'un pitch digne du meilleur de la comédie des années 30, Luketic ruine tous ses beaux projets en les ensevelissant de vulgarité. Cherchez l'erreur.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma

Tobe Hooper, le boucher sans os

Jamais <em>Tobe Hooper</em> n'a retrouvé la puissance de Massacre à la tronçonneuse. Jamais il n'a pu rebondir après une telle déflagration de violence, passer après un film aussi radical et définitif, bilan d'une époque malade plongeant dans le nihilisme. Ce sera son premier et (probablement) dernier chef d'oeuvre. L'homme d'un seul film. Car ce ne seront ni Le Crocodile de la mort, Massacres dans le train fantôme ou Poltergeist qu'il réalise pour <em>Spielberg</em> qui l'aideront à trouver sa voie. Ni par la suite Lifeforce, Massacre à la tronçonneuse 2, Spountaneous Combustion ou le plus récent Tobe Hooper's Mortuary. Avec sa bande de dégénérés anthropophages, Hooper était dans son époque, quand il faut, où il faut, comme il faut. Le reste ne sera qu'échecs et malentendus.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma

Harmony Korine, l'arty freak

1995, <em>Larry Clark</em> tourne le teen movie d'une génération, <em>Kids</em>. Un choc : néo réalisme urbain, new-yorkais, street, skate, trash, casting sauvage, et récit d'un jour, conçu par un jeune inconnu, <em>Harmony Korine</em>. Le film doit plus à Clark qu'à son scénariste, propulsé surdoué en un éclair, mais peu importe. Très vite suit Gummo, premier long affichant les contours d'une oeuvre singulière : cartographie sensible d'une Amerique borderline, freaks show pathétiquement sublime, toujours aux limites de la folie, image granuleuse, instable, arty. Korine se fait un nom, Agnès B devient son mécène, il enchaine sur Julien Donkey Boy, film Dogme et premier basculement vers une longue dérive personnelle et artistique dont il ne s'est toujours pas remis.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma

Shinya Tsukamoto, le cyberpunk des 90's

Dans les 90's, avant qu'Internet n'accélère la cinéphilie mondiale, <em>Shinya Tsukamoto</em> jouissait d'une réputation festivalière hors du commun. Il est alors célèbre pour ses deux <em>Tetsuo</em>, des films indus, cyberpunk, à la fois baroques et expressionnistes, parsemés de corps mutants, contaminés par des environnements hyper urbains et technologiques. Le DVD et la découverte plus tardive de sa filmo font de lui au début des 00's l'icône d'un cinéma jap barré. La critique tente de le récupérer pour la sortie de <em>Tokyo Fist</em>, puis très vite il retombe dans l'oubli. En cause la qualité des films qui après Snake of June est en chute libre. Tsukamoto se perd, son oeuvre devient obsédée par le suicide, et seul le fan de cinéma asiatique encensera son Nightmare Detective 2 et un ultime volet de Tetsuo. Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma

Ken Russell, l'iconoclaste maudit

On se souvient de <em>Jean-Luc Godard</em> affirmant qu'il n'y a jamais eu de cinéma anglais. Si on ne peut lui donner complètement tort, des auteurs comme <em>Michael Powell</em>, <em>Nicholas Roeg</em> et <em>Ken Russell</em> prouvent l'existence d'un cinéma britannique. Ce dernier compte parmi ces cinéastes à la filmo étonnante, riche, mais si mal aimés, peu connus qu'il pourrait basculer dans la case des maudits. Célèbre pour <em>Tommy</em> (avec <em>The Who</em>), on lui doit surtout quelques grands morceaux de cinéma baroque ou hallucinés, tels que Les diables, <em>Au-delà du réel</em> et <em>Gothic</em>. Fasciné par la décadence, les univers sulfureux, son oeuvre fait plusieurs fois scandale au point qu'il échouera à la télévision au moment où paradoxalement il acquiert une certaine notoriété cinéphile.Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma

Hal Hartley, le new-yorkais post godardien

Certains cinéastes, comme les modes, ne durent qu'un temps. Ils sont de leur époque, d'une décennie, comme une étrange conjonction que l'Histoire ne démentira pas. Tel est le cas d'<em>Hal Hartley</em> qui au début des 90's, alors que <em>Jarmusch</em> a ouvert depuis quelques années la brèche d'un cingla indé US dont Sundance fut le vecteur, acquiert une petite notoriété avec L'incroyable vérité ou Flirt. Hartley signe un cinéma élégant, intelligent, cultivé, drôle, fortement emprunté par <em>Godard</em> et autres auteurs européens. Il revisite les genres, se les accapare ou les actualise ; obtient un joli succès d'estime avec Amateur en 94, mais après <em>Henry Fool</em> (primé à Cannes mais échec critique et public) il part à la dérive et disparaît dans une mer obscure de courts-métrages. Suivez le fil réalisateur sur le blog cinéma Jérôme Dittmar

Comme le bookmaker, le cinéphile aime prendre des paris, miser sur des noms. Cela fait partie du jeu, un peu dur, cruel parfois. Le cinéaste devient son poulain, on observe une filmo tel un turfiste. Les promesses d'un temps, d'un début de carrière (ou pas) sont scrutées avec attention. Pour des raisons diverses, se maintenir sur la durée n'est pas aisé, d'autant que nous avons la dangereuse habitude de nourrir parfois trop d'espoirs. De nous tromper. Voici donc en dix noms dix auteurs qui ont déçu, se sont perdus, ont été mal vus ou pris dans le carcan inadapté d'un système. Dix histoires, dix trajectoires, dix cinémas pour le meilleur comme le pire.