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La fille de Dario Argento tente l'introspection dans un film entre fable et hommage au cinéma italien 70's en filmant les errances une gamine mal aimée en forme de chanson pop. Rencontre. Quelle est la part d’autobiographie dans L'Incomprise ?Fellini disait que tout art est autobiographique, et la perle est l’autobiographie de l’huître. Mais si j’avais voulu raconter l’histoire de ma famille, j’aurais fait un documentaire à la façon de Capturing the Friedmans [stupéfiant documentaire sur une famille incestueuse, NDLR]. Là, je fais du cinema. J’avais envie de raconter une histoire non conforme au standard habituel, surtout en Italie. Je voulais montrer une famille actuelle, même si l’histoire est située au début des années 80. Les enfants n’avaient pas les mêmes droits que les parents et je raconte la révolte d’une gamine à un moment de sa vie.Mais visuellement, on est à l’opposé du documentaire. Qu’est-ce qui a déterminé le style ?Je dirais que c’est entre la poésie et la réalité. A part quelques scène extrêmes parce qu’absurdes, le jeu des acteurs est très vrai, pas fellinien. C’est parti d’un rêve, et je ne suis que le medium de cette histoire que j’ai partagée avec le scénariste, le chef-op, les comédiens, le décorateur, le responsable des costumes… Et on a tous rêvé le même rêve. Mais je voyais très bien où je voulais arriver. C’est un espace subjectif avec un objectif très clair. Esthétiquement, je voulais retrouver l’impression laissée par un polaroid qui perd de la densité et de la définition avec le temps, comme la mémoire qui s’efface. Et si on peut fixer ce qui reste de la mémoire, ça devient la réalité. Le film est un peu ça: un polaroid en train de disparaître. D’où les couleurs dans le film, les blancs deviennent un peu roses, les noirs un peu verts. C’est comme la mémoire : elle travestit un peu la vérité.La musique joue un rôle important.La musique est presque un personnage du film, il y a très peu de moments sans. J’ai écrit quatre thèmes, et je les ai confiés à des musiciens pour qu’ils les interprètes avec des sensibilités différentes : punk, new wave… Brian Molko de Placebo a écrit le début et la fin, et un ami français a écrit les thèmes du chat et de la copine au piano. Le reste, je l’ai choisi avec ma music supervisor, une amie qui partage les mêmes obsessions musicales que moi pour les morceaux obscurs des années 80. Je ne voulais pas répéter Donnie Darko, je voulais rappeler des sonorités oubliées.Tu mixes toujours ?Non. J’en ai fini avec cette merde. J’ai aussi arrêté de faire la putain d’actrice.Définitivement ?De passer des disques en boîte, j’espère que c’est fini pour toujours. Faire l’actrice, ça dépend. Peut-être que j’y reviendrai si j’ai besoin d’argent pour payer l’école de mes enfants. Sinon, jamais plus !Interview Gérard DelormeL'Incomprise d'Asia Argento avec Giulia Salerno, Charlotte Gainsbourg et Gabriel Garko est présenté à Un Certain regard à Cannes. Bande-annonce :