Toutes les critiques de Julieta

Les critiques de Première

  1. Première
    par Vanina Arrighi de Casanova

    Le cinéaste espagnol revient au sommet de son cinéma avec un drame à la fois lumineux et austère mais d’une beauté terrassante.

    Moins mélo que Tout sur ma mère, moins borderline que Parle avec elle, Julieta renoue pourtant avec la sensibilité la plus forte du cinéma d’Almodovar. La légèreté fantasque et provoc allait bien au héraut de la Movida dans les années 1980, elle passait beaucoup moins bien dans les années 2010 – on peut considérer Les Amants passagers comme une rechute accidentelle dont le maître espagnol se relève avec une maîtrise stupéfiante. Portrait d’une femme abîmée, hantée par ses secrets, pétrie de culpabilité, Julieta (librement adapté de la novelliste canadienne Alice Munro) est ce qu’Almodovar a réalisé de plus beau depuis une quinzaine d’années.

    Pudeur et délicatesse

    Julieta n’est pas un mélo. Un drame, oui, mais superbement sobre et dépouillé, déroutant, du coup (on n’a pas pleuré…). Le script pourrait tenir sur un post-it : à la suite d’une rencontre fortuite, une quinqua sur le point de quitter Madrid avec son compagnon bouleverse ses plans, le quitte, reste à Madrid et se lance dans l’écriture d’une longue lettre à sa fille perdue de vue depuis 12 ans. Flashback : Julieta a 20 et quelques années, elle rencontre le père de sa fille, ils vivent un grand bonheur, et puis… On n’en dit pas plus. Si la trame est simple, son déroulement est beaucoup plus complexe, comme l’est l’écriture du personnage éponyme : rarement Almodovar, pourtant grand explorateur de la psyché féminine, avait atteint de telles profondeurs. La caractérisation de son héroïne prend de multiples détours pour mieux arriver au but et après avoir cheminé le long de ses circonvolutions, on réalise, proche du dénouement, que l'on comprend cette femme, qu'on la connait intimement. Il filme le naufrage émotionnel de Julieta sur les traits de son visage, avec une pudeur qu’on ne lui connaissait pas : sa délicatesse augmente à mesure que son héroïne sombre, et les rares explications ou commentaires émanent d’ailleurs souvent de personnages périphériques. Peu à peu, cette superbe femme (Adriana Ugarte, la Julieta jeune) se transforme, se délite, se dissout presque avant de renaître sous les traits d’une autre (Emma Suarez, la Julieta mûre), dans une séquence quasi-magique qu’on n’est pas près d’oublier.

    L'ombre d'Alfred

    Toujours solaire et bariolé, toujours adepte du mélange des genres – drame, romance, fantastique (les visions du cerf dans la neige), film noir, traversé d’éclairs de sensualité débordante – et fidèle à ses références cinéphiles (Hitchcock plane sur le film, dans la scène de train qui évoque L’Inconnu du Nord-Express, dans la dualité de l’héroïne qui convoque Sueurs froides, dans le personnage de Rossy de Palma, unique ressort comique de cette fresque, filmée comme la gouvernante de Rebecca), Pedro Almodovar a pourtant imperceptiblement changé. On célèbre dans quelques jours les 10 ans de Volver (« revenir »), titre qui synthétise si bien l’œuvre de l’Espagnol. Comme Julieta, Pedro revient toujours – à son esthétique baroque, à ses obsessions thématiques (la mère, la perte, l’échec de l’amour) - mais jamais tout à fait le même.

Les critiques de la Presse

  1. Les Inrocks
    par Serge Kaganski

    Almodóvar retrouve ici toute sa science du storytelling, cette virtuosité feuilletonesque qui lui permet de jongler avec les époques, d’emboîter divers personnages ou péripéties secondaires convergeant tous en un seul grand récit, avec le recours au flash-back devant cheminer jusqu’à la grande émotion finale (...)

  2. Le Parisien
    par Renaud Baronian

     Ce magnifique mélo en forme de portrait de femme sur deux époques, passionné parfois, bouleversant la plupart du temps, donne envie d'embrasser le grand Pedro en fin de projection pour la façon si fine qu'il a de raconter et de filmer les grandes émotions. 

  3. 20 Minutes
    par Caroline Vié

    Le réalisateur sonde l'âme féminine avec son acuité habituelle pour un magnifique portrait de mère abandonnée...

  4. Le Point
    par La rédaction du Point

    Fini, les loufoqueries LGBT, fini, l'humour corrosif, Julieta est un drame pur aux airs de tragédie grecque, et révèle deux nouvelles muses au Panthéon de Pedro : Adriana Uguarte et Emma Suarez.

  5. Télérama
    par Louis Guichard

    Avec sa conclusion abrupte et amère, qui suggère une transmission de la culpabilité, le film s'éloigne des réussites consensuelles du cinéaste comme Parle avec elle ou Volver. Mais il fascine par cette alchimie entre la noirceur désenchantée du fond et l'éclat rédempteur de la forme.

  6. Nouvel Obs
    par Pascal Mérigeau

    De même que les personnages n’expriment jamais leurs émotions, le cinéaste interdit au film de se répandre, tendu, tenu, habité par une douleur sourde qui par moments se transforme en sérénité, que seul, dit-on, l’âge procure. 

  7. L'Express
    par Thierry Chèze

    L'ensemble, intensément émouvant, pourrait se noyer dans un torrent de larmes. Or c'est l'inverse qui se produit. Dans sa mise en images comme dans le choix des couleurs vives, Julieta est traversé par une vraie dureté, et flirte allègrement, le temps d'une scène dans un train, magistrale de sensualité, avec le film noir.  

  8. Le Monde
    par Thomas Sotinel

    De cet alliage entre la banalité de la douleur et les formes fantastiques que peut lui donner le cinéma, ­Almodovar fait un beau film d’une tristesse très pure.
     

  9. Libération
    par Clément Ghys

    L’écrasante machinerie du film, couplée à une dimension trop hors-sol, empêche au drame d’exprimer véritablement toute sa puissance d’attraction émotionnelle.