StudioCanal/Warner Bros./ Ad Vitam Distribution

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

MON KET ★★★☆☆ 
De François Damiens

L’essentiel
On pourrait résumer Mon Ket comme ça : c’est l’histoire de Dany Versavel (François Damiens), un voyou qui s’évade de prison pour retrouver son fils de 15 ans dont il vient de perdre la garde. Ce papa fruste et violent a des problèmes de communication avec son gamin (son « ket », en argot bruxellois) et pas mal de temps perdu à rattraper. Suspense, action, émotion : le film est un update contemporain des Fugitifs, ou une variation belge sur La Poursuite impitoyable. Reste que, malgré sa volonté de « faire cinéma », Mon Ket n’est pas forcément plus drôle que la meil- leure des compils du comique belge. Mais pas moins non plus. Ce qui signifie – Damiens étant un génie de l’exercice – que Mon Ket est totalement hilarant.
Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A AIMÉ

OPERATION BEYROUTH ★★★☆☆
De Brad Anderson

Le hasard de la programmation voit la sortie le même mois de deux films traitant du conflit israélo-palestinien à l’époque où il commençait à s’exporter dans le monde entier. Mais là où Otages à Entebbe, de José Padilha, reconstitue un événement historique, Opération Beyrouths’appuie sur les faits pour imaginer une fiction complexe, propulsée par un héros qui ne l’est pas moins. Ici, les négociations importent autant sinon plus que l’action, et le scénariste Tony Gilroy s’y entend pour écrire des dialogues denses qui véhiculent une quantité d’informations tout en faisant avancer l’intrigue. Celle-ci paraît alors un peu mécanique dans sa façon de privilégier le personnage central au détriment des autres, dont on peut regretter qu’ils ne soient pas plus développés. Jon Hamm compense en incarnant à la perfection un homme fracturé et paradoxal, pas vraiment à sa place et pourtant maître de la situation. Ce n’est pas un rôle confortable, à l’image du film, où s’affrontent mouvement et tractations, poids du passé et fièvre d’un présent où la frontière entre amis et ennemis est complètement brouillée. 
Gérard Delorme

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UNE ANNEE POLAIRE ★★★☆☆
De Samuel Collardey

Si vous connaissez le travail de Samuel Collardey, son nouveau film ne vous surprendra guère. Comme dans L’Apprenti et Tempête, il s’agit pour lui de produire de la fiction avec du réel : l’instituteur danois qui choisit d’enseigner aux Inuits dans un bled paumé du Groenland, c’est Anders Hvidegaard rejouant des scènes tirées de sa propre vie – ou de celles de collègues sur lesquels Collardey s’est documenté au préalable. Le réalisateur français appartient à cette caste de cinéastes aux rangs de plus en plus étoffés (Jean-Charles Hue, Roberto Minervini, Chloé Zhao), qui profitent de leur immersion dans une communauté donnée pour nourrir des docu-fictions bluffants, redéfinissant les concepts de récit, de héros et même de réalité. L’expédition menée par le guide inuit en plein blizzard, avec Anders Hvidegaard commençant à maîtriser la conduite de son traîneau à chien, relève-t-elle de la reconstitution totale ou de la simple captation ? À la limite, mieux vaut ne pas savoir, on risque d’être déçu – les détails a posteriori sur les scènes bidonnées du mythique Nanouk l’Esquimau en ont quelque peu amoindri l’impact. En l’état, Une année polaire peut se voir comme un excellent récit d’apprentissage, doublé d’une réflexion pertinente sur les bienfaits discutables de la civilisation : Anders Hvidegaard, en bon Danois, est persuadé de prêcher la bonne parole auprès des Inuits, pour qui la scolarisation représente un danger, car elle se substitue à la transmission orale des anciens, indispensable à leur survie.
Christophe Narbonne

RETOUR A BOLLENE ★★★☆☆
De Saïd Hamich

Pour son premier long métrage, Saïd Hamich (coproducteur du Much loved de Nabil Ayouch) s’aventure sur un terrain ô combien miné : la question de l’identité et des communautarismes. Mais en lieu et place du flot de théories répétées en boucle jusqu’à l’épuisement sur ce sujet, il fait le –bon- choix de le traiter en partant d’une situation concrète. En l’occurrence, le retour de Nassim, trentenaire vivant à Abu Dhabi avec sa fiancée américaine, à Bollène où il a grandi. Un retour aux sources qui ne sera pas de tout repos. D’abord parce qu’il entretient des rapports complexes avec sa famille, et tout particulièrement son père à qui il n’adresse plus la parole. Mais surtout parce qu’il ne reconnaît pas l’ambiance de cette ville du sud de la France et certains de ses amis d’enfance, contaminés par la montée en puissance de l’extrême-droite et son rejet de la communauté maghrébine à laquelle il appartient. Hamich raconte les tiraillements de cet homme entre ce passé qui l’a construit mais qu’il a fui et ce présent où il se sent étranger à ses origines pour autant de bonnes que de mauvaises raisons. Rien n’est jamais tout noir ou tout blanc dans ce récit et Retour à Bollène séduit précisément pour sa capacité à évoluer dans ce gris où se mêlent harmonieusement l’intime et le général, les liens familiaux et les engagements sociétaux. Et, de fait, à ne jamais s’enferrer dans la pure réflexion cérébrale distante pour oser se confronter à des moments émouvants voire poignants. Le tout en un peu d’une heure orchestrée sans longueur inutile. Un grand film politique, aussi pertinent que sensible.
Thierry Cheze

LE VOYAGE DU FAKIR ★★★☆☆
Ken Scott

Comment est-ce qu'un sympathique arnaqueur des rues se retrouve coincé dans une armoire Ikea ? Et comment se retrouve-t-il baladé dans toute l'Europe, à partager le sort des migrants clandestins et à en tirer une leçon de vie ? Si Le Voyage du fakir réussit à dépasser son statut de feel good movie en guimauve à la Jean-Pierre Jeunet, c'est grâce à son héros joué par Dhanush, superstar du cinéma tamoul dotée d'un charme ahurissant. Il porte brillamment le film sur son bagout. On le suivrait n'importe où, même dans une armoire.
Sylvestre Picard

LES RIVES DU DESTIN ★★★☆☆
De Abdolreza Kahani

Après son divorce, Samira quitte la province où elle vivait pour retourner vivre avec sa fille à Téhéran. Violent, son ancien époux s’oppose à son retour et emmène de force leur enfant chez la sœur de Samira. Pas à son coup d’essai (Les Rives du destin est son huitième film), Abdolreza Kahani met en image le quotidien de cette femme indépendante, prête à braver vents et marées pour se reconstruire et s’émanciper, malgré sa précarité. Ce long-métrage témoigne avec force de la façon dont les mentalités conservatrices en Iran sont en train d’évoluer. Malgré quelques longueurs, il montre les difficultés qu’une mère célibataire doit affronter pour se désenchaîner du diktat des hommes, toujours présent. Un combat plus que jamais d’actualité.
Alexandre Bernard

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

L’HOMME DAUPHIN, SUR LES TRACES DE JACQUES MAYOL ★★☆☆☆
De Lefteris Charitos

Jean-Marc Barr retrace la vie de l’homme qui inspira Le Grand Bleu. En 1988, le grand public découvre l’existence du plongeur apnéiste Jacques Mayol à travers le films culte de Luc Besson. Ses plongées font rêver les ados aux sons de la musique flamboyante d’Eric Serra. Mais le modèle se révèle encore plus passionnant. C’est ce que nous explique le documentariste Lefteris Charitos en mêlant des images d’archives et témoignages inédits. Entendre le véritable Enzo Molinari (interprété à l’écran par Jean Reno) raconter leur rivalité est captivant. Il y a aussi la vie d’un père racontée par une fille qui le voyait s’éloigner dans ses rêves et ses passions. Car Jacques Mayol reste aussi un mystère. Enfin, Jean-Marc Barr vient aussi témoigner des effets du Grand Bleu sur cet homme mort il y a 17 ans.
Sophie Benamon

MY PURE LAND ★★☆☆☆
De Sarmad Masud

L’histoire, tirée d’une histoire vraie, est incroyable : trois femmes, une mère et ses deux filles, retranchées dans leur maison, combattirent, armes à la main, 200 bandits menés par leur oncle qui revendiquaient les terres de son frère, injustement emprisonné. Le film illustre les tentatives de spoliation qui sont monnaie courante au Pakistan, l’un des pays les plus corrompus au monde –l’oncle bénéficiait du soutien du commissaire local. Anglais d’origine pakistanaise, Sarmad Masud a tourné sur place dans des conditions rocambolesques qui mériteraient un film à part. Tout était donc réuni pour faire de My pure land un western moyen-oriental au scénario digne d’une tragédie grecque : las, il trahit un léger amateurisme à tous les étages, du découpage à la direction d’acteurs, en passant par la mise en scène incapable de transcender la folle matière narrative. Il faut néanmoins saluer et encourager cette incursion prédestinée dans le genre au pays des kalach’.
Christophe Narbonne

 

PREMIERE N’A PAS AIME

JE VAIS MIEUX ★☆☆☆☆
De Jean-Pierre Améris

Quelques mois après le succès de son deuxième long métrage Jalouse (co-réalisé avec son frère Stéphane), revoici des nouvelles de David Foenkinos sur grand écran. Mais cette fois- ci comme auteur d’un de ses romans publiés en 2013, adapté et porté à l’écran par Jean-Pierre Améris. L’histoire d’un quinqua soudain en proie à un mal de dos fulgurant qu’aucun médecin ne parvient à guérir. Et pour cause : l’origine de cette douleur est purement psychologique. Sur le papier, on pouvait attendre beaucoup de la rencontre entre la plume (si joliment portée à l’écran par Jean-Paul Rouve avec Les souvenirs) de l’auteur de La délicatesse et l’œil du réalisateur des Emotifs anonymes. Tant ils semblent liés par une langue commune, une aisance à explorer l’âme humaine avec empathie, finesse et humour. Mais ici, quelque chose cloche. Le récit reste trop sage, ne sort jamais des sentiers battus et rebattus. On s’attend exactement à tout ce qui va arriver à cet homme qui décide de remettre en cause sa vie privée comme professionnelle. Il manque le grain de sable, l’accident, le coup de folie malicieux dont l’un et l’autre sont si souvent coutumiers. Celui-ci ne se produit que le temps d’une seule et unique scène lorsque ce quinqua pousse son ex à lui balancer ses quatre vérités, point de départ d’une dispute façon Guerre des Rose. Une scène, c’est hélas bien peu. Et ce, malgré les efforts d’Eric Elmosnino et Judith El Zein, irréprochables, Je vais mieux se contente d’arriver à bon port sans qu’on se souvienne du voyage.
Thierry Cheze

 

Et aussi
Demi-soeurs de Saphia Azzedine
Le loup et l’agneau de Sévan Maurin
La naissance de Narcisse de Hugo Parthonnaud
Train de vies ou les voyages d’Angélique de Paul Vecchiali
Les sept déserteurs ou la guerre en vrac de Paul Vecchiali

 

Reprises
Cinq et la peau de Pierre Rissient
La femme-insecte de Shôhei Imamura