Amadeus
Warner Bros

Parce qu'il n'y a pas qu'OM/PSG à la télévision ce soir, les grands cinéastes se sont donné rendez-vous sur les chaînes de la TNT. Sergio Leone, Milos Forman et les frères Coen : quelle que soit l'époque ou le genre, les cinéphiles sauront trouver leur compte.

Amadeus reviendra à 21h sur Arte. A cette occasion, voici un extrait de notre dossier consacré au film dans le Première Classics n°10 (avec Le Père Noël est une ordure en couverture).


Amadeus : Quand Mark Hamill et Mel Gibson rêvaient de jouer Mozart

Réinterprétation lointaine d’une courte pièce de Pouchkine, Mozart et Salieri, parue en 1830, Amadeus s’inspire d’une légende apparue à l’époque romantique et raconte que, fou de jalousie, le compositeur Antonio Salieri, pourtant favori de la cour, aurait fini par empoisonner Mozart dont il ne supportait pas le talent. À vrai dire, Pouchkine comme Peter Shaffer  avaient parfaitement que cet antagonisme était complètement inventé. Salieri ayant même été l’un de seuls à avoir tendu la main à Mozart tout au long de sa vie. Ils ont malgré tout choisi de s’en inspirer pour insuffler du romanesque à la vie, pourtant loin d’être terne, du compositeur. Le film ira même encore plus loin dans les raccourcis et les petits arrangements avec la réalité, faisant de Salieri un des personnages les plus machiavéliques jamais décrits, et élaborant ainsi l’hypothèse d’une biographie parfaitement apocryphe. Rien n’est donc tout à fait authentique dans Amadeus, si ce n’est le pur génie de Mozart.

Pour saisir cette démarche, qui était celle de Shaffer et deviendra celle de Forman, il faut d’abord partir de ce titre. Pas Wolfgang ni Mozart donc, mais bel et bien Amadeus, le prénom du milieu, dérivé du latin « amare » et de « deus », et qui signifierait donc « aimé de Dieu ». C’est cet amour qui pourrait alors expliquer un talent aussi unique dans l’histoire de l’humanité, et c’est un miracle auquel le très pieux Salieri ne peut se résoudre. Pourquoi la parole divine aurait-elle choisi de s’exprimer à travers ce petit Autrichien paillard, braillard et capricieux au rire insupportable ? Tout ceci est évidemment une 
métaphore du geste créatif, sa part d’inexplicable et sa beauté mystique. Qui d’autre mieux que Mozart pouvait incarner ce mystère ? C’était le sujet de la pièce, ça sera celui du film. Et c’est évidemment ce qui excite le plus Forman dans ce nouveau projet : capter l’inspiration, la création, le génie. Pour réussir Amadeus, il va devoir filmer l’infilmable. « Soyez bien conscient que j’adore votre pièce mais que nous allons devoir tout changer si nous voulons en faire un grand film. » Alors que Peter Shaffer venait de vendre les droits d’Amadeus à Saul Zaentz, il acceptait dans le même temps d’en écrire l’adaptation pour le cinéma au côté de Miloš Forman. Ce dernier lui proposait donc d’oublier tout ce qu’il croyait savoir sur le sujet et de repartir de zéro pour recréer une toute nouvelle dramaturgie à sa pièce. 

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Ce qui va souder les deux hommes, c’est la musique, ou plus précisément leur amour commun pour la musique. Outre ses talents d’écrivain, Shaffer était un pianiste confirmé. Forman, lui, sortait tout juste des mélodies hippies de Hair et du piano jazzy de Ragtime. S’il enchaîne sur Amadeus, c’est bien parce que son cinéma entretient un rapport obsessionnel à la musique – qui ne sera pas démenti par la suite de sa filmo. Les deux hommes vont donc écrire – beaucoup, plus de 200 pages – tout en écoutant du Mozart à peu près tout le temps. D’après Forman, la réussite du projet tient à ça: « Nous avions la musique du film au moment de l’écriture ! Quelle chance ! On écoutait du Mozart pour inventer des scènes, des émotions, des personnages. Sa musique nous guidait et nous permettait déjà de visualiser le film. » Shaffer ajoutera : « Je crois que nous avons écrit le premier script de l’histoire du cinéma où la musique tient le rôle principal. »

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L’autre moment mémorable du tournage fut évidemment la scène où Mozart sur son lit de mort dicte son Requiem à Salieri. C’est l’une des séquences les plus stupéfiantes de toute l’histoire du cinéma et celle qui offre au film sa raison d’être. En voulant capturer le génie à l’œuvre, Forman s’attelle à une scène qui serait historique ou ne serait pas. Elle fut l’une des dernières à être tournée. Habités depuis de long mois par leurs personnages, Hulce et Abraham en était venus à ce moment-là à se détester cordialement. La scène va bénéficier pleinement de cette tension.

L'article complet sur Amadeus est à retrouver dans notre kiosque en ligne