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Les Hommes de l'ombre reviennent ce soir pour une saison 2. Une série politique de plus entre Borgen et House of Cards ? Que vaut cette second salve alors que la première avait été saluée tant par la critique que par le public lors de son lancement en 2012... quelques mois avant le raz de marée de la série Netflix

"Crossing Lines ce n’est pas True Detective, mais ce n’est pas de la merde non plus", déclarait récemment Marc Lavoine à Télé Star. Eh bien disons que Les Hommes de l’ombre, ce n’est pas House of Cards, mais ce n’est pas de la merde non plus.Certes les deux séries s’intéressent aux dessous de la vie politique mais la comparaison s’arrête là.Ainsi, si la première saison des Hommes de l’ombre était axée sur la prise du pouvoir, la seconde, qui démarre ce soir sur France 2, se focalise sur l’exercice du pouvoir et ses compromissions (la troisième et sans doute dernière devant se concentrer sur l’après pouvoir).Les vies politiques américaines et françaises présentant des différences fondamentales et le seuil de tolérance aux invraisemblances scénaristiques n’étant pas le même des deux côtés de l’Atlantique (ouh, un futur président des USA qui pousse une méchante journaliste sous un train / ouh la fille d’un homme d’état qui s’embrigade, lors d’un stage de journalisme, avec des réseaux djihadistes), la comparaison entre les Hommes de l’ombre et House of Cards est vite vaine. Le monde fictionnel décrit n’est pas le même et les moyens mis en œuvre non plus. D’ailleurs, si la série de Netflix se focalise sur l’humain vil et shakespearien qu’est Francis Underwood (Kevin Spacey) celle de France 2 joue elle sur les interactions entre ces hommes (et femmes) de (ou proche du) pouvoir : le président, sa femme, ses conseillers, ses ministres etc.La grande force des Hommes de l’ombre, ce sont ses scénaristes – malgré un trait parfois caricatural propre aux séries françaises - qui encore une fois dans cette saison 2, ont anticipé la vie politique comme ils avaient réussi à le faire dans la saison 1 et sa société de conseils politiques appelée Pygmalion.Sans véritablement spoiler l’histoire, attendez-vous à une saison axée sur la peopolisation de la vie politique et un scandale sur un ministre ami intime du président lâché en pâture à la vindicte populaire pour cause d’affaire de corruption. Aquilino Morelle et les vendeurs de casque de scooter risquent de rire jaune.Les scénaristes (Marie Guilmineau, Sylvain Saada et Pauline Rocafull) ont également réussi la gageure de se débarrasser de Nathalie Baye, qui devait être l’héroïne de cette seconde saison, sans trop de heurts. Dans le projet originel de Dan Frank, lui aussi déserteur (il est parti sur la nouvelle série de Netflix, le diffuseur de House of Cards !), Anne Sauvage, son personnage, devait gagner l’élection. C’est donc finalement son rival de la saison 1 Alain Marjorie, désormais au cœur de l’intrigue, qui l’emporte. Nicolas Marié qui l’interprète doit brûler un cierge à Nathalie Baye chaque semaine depuis ce désistement.Cet imbroglio réglé, les scénaristes ont créé le personnage de la femme du président, une personnalité border line et limite folle, incarné par Carole Bouquet qui, il faut bien le dire, ne fait qu’une bouchée du rôle en réussissant à lui donner une épaisseur et une présence qu’elle n’avait certainement pas sur le papier.Autre problématique résolu par les scénaristes décidément balèze : réduire le rôle de Grégory Fitoussi (Ludovic Desmeuze), pris au moment du tournage retardé par la réécriture, par la saison 5 d’Engrenages et la 3 de Mr Selfrige. L’équilibre de la série n’en pâtit pas même si son personnage est moins présent. L’affrontement entre les 2 spin doctors Ludovic Desmeuze (Grégory Fitoussi) / Simon Kapita (Bruno Wolkowitch) n’est plus un enjeu central et c’est tant mieux car il sent désormais un peu le réchauffé…Reste toutes fois que, malgré une saison de bonne facture, la série pêche par ses dialogues parfois pauvres ou old school - on est loin des diatribes face caméra de Frank Underwood, qui font mouche à chaque fois. Mais quand on disait que la comparaison était vaine…Nicolas Bellet