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Son interdiction aux mineurs avait compromis la carrière de ce documentaire sur l'intégrisme islamique.

Le tribunal administratif de Paris a annulé mardi la décision du ministère de la culture de délivrer un visa d'exploitation au documentaire Salafistes "en tant que ce visa d'exploitation est assorti d'une interdiction aux mineurs de 18 ans". Ce visa avait été délivré après deux passages en commission qui, les deux fois, avait recommandé une interdiction aux moins de 18 ans en raison "de l'absence de commentaire et de l'extrême violence des images"

Tout ce qu'il faut savoir sur Salafistes

Cette plongée inédite dans la machine terroriste, qui donne la parole aux djihadistes, documente l'application de la charia et diffuse des messages de propagande, sans voix-off ni commentaire, avait fait polémique dès sa présentation au Festival international des programmes audiovisuels de Biarritz en janvier dernier. Le pari du documentaire était de laisser le spectateur seul face à la rhétorique salafiste pour bien comprendre ce à quoi nous sommes confrontés. La presse et les intellectuels s'étaient divisés sur la valeur du film, irresponsable et dangereux pour certains, nécessaire pour d'autres, notamment Claude Lanzmann qui avait publié une tribune dans Le Monde pour défendre "ce chef d'oeuvre éclairant".

Six mois plus tard, ce sont les juges du tribunal administratif de Paris qui ont tranché : "Il ressort des pièces du dossier et notamment du visionnage du film Salafistes que celui-ci présente (...) des propos et des images extrêmement violents et intolérants susceptibles de heurter le public. (...) Toutefois, lesdites scènes, par leur portée et la façon dont elles sont introduites dans le documentaire, participent à la dénonciation des exactions commises contre les populations" et permettent "au public, du fait même de sa conception d'ensemble et du réalisme de certaines scènes, de réfléchir et de prendre le recul nécessaire face à la violence des images ou des propos qui ont pu y être présentés. (...) Contrairement à ce que soutient la ministre de la Culture et de la Communication, ledit documentaire ne peut être regardé comme véhiculant une propagande en faveur de l'intégrisme religieux ou incitant, même indirectement, des adolescents à s'identifier à des mouvements prônant l'action terroriste".

La décision de la ministre de la culture de l'époque, Fleur Pellerin, d'interdire le film aux moins de 18 ans (visa habituellement réservé aux pornos et, plus rarement, aux films d'horreur ultra violent), prise en plein état d'urgence, avait condamné la carrière de Salafistes, sorti dans un nombre très réduit de salles et lâché par France Télévisions qui ne pouvait plus le diffuser sur ses antennes.