Guide du 12 juin 2019
Sony Pictures Releasing France/ Metropolitan FilmExport / Mars Films

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

MEN IN BLACK INTERNATIONAL ★★☆☆☆
De F. Gary Gray

L’essentiel
Pas grand-chose à dire sur le nouveau Men in Black, qui remplit honnêtement le cahier des charges de la franchise.

Reboot ? Spin-off ? À vrai dire, même après l’avoir vu, on ne sait pas dans quelle catégorie ranger Men in Black International, qui fait néanmoins table rase du passé avec un casting entièrement renouvelé -à l’exception d’Emma Thompson qui reprend le rôle de l’agent O apparu dans le 3. Rappelons le concept de la franchise : des hommes en noir veillent à la cohabitation harmonieuse sur Terre entre aliens et humains à l’insu de ces derniers -dont la mémoire est effacée en cas d’indiscrétion.
Christophe Narbonne

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PREMIÈRE A AIMÉ

ROXANE ★★★☆☆
De Mélanie Auffret

Il y a plus d’un siècle et demi, le journaliste Francisque Sarcey écrivait dans son journal que « les paysans bretons sont si ignorants qu’ils croient à l’influence de la Lune sur les marées ». Aujourd’hui, il rajouterait qu’ils sont tellement bêtes qu’ils pensent que la littérature peut changer le monde. C’est ce que raconte le joli film Roxane. On y suit l’histoire de Raymond, un agriculteur avec un drôle de secret : l’amour des mots lui est tombé dessus par hasard. Sans éducation ni bagage, ce paysan a cultivé cette passion, n’avouant ce penchant qu’à... ses poules.
Gaël Golhen

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LUNE DE MIEL★★★☆☆
De Elise Otzenberger

Pour son premier voyage en couple après la naissance de son bébé (sorte de lune de miel à retardement), Anna, jeune juive aux ancêtres polonais, a l’idée d’assister, au fin fond de la Pologne, à la commémoration du 75e anniversaire de la destruction de la communauté d’origine de son compagnon (Arthur Igual, parfait). Lequel aurait mille fois préféré aller à New York ! Tel est le point de départ de ce premier film très réussi d’Elise Otzenberger. D’emblée, le personnage haut en couleur d’Anna, interprété par la formidable Judith Chemla (Camille redoubleUne vie), nous amuse autant qu’il nous irrite. Très à cheval sur les détails, la jeune femme saoule ses parents de recommandations sur les soins à apporter à son enfant et entretient avec sa mère (la trop rare Brigitte Roüan) une relation un peu compliquée. Traversé d’un humour à la Woody Allen, le film évolue sur les routes de Pologne au fil des scènes de confrontation entre ces amoureux qui n’ont pas la même conception de la mémoire. On rit franchement des élucubrations d’Anna, persuadée de savoir tenir la vodka comme un Polonais. Puis, le film se fait plus grave, interrogeant l’identité de juifs originaires d’un pays qui les a réduits au néant. Les scènes au cimetière se révèlent tout particulièrement émouvantes. La première met en avant la transmission de la Shoah. La seconde raconte une ville prête à oublier que l’antisémitisme a ravagé sa population : « juif » est une insulte de supporter de foot et les pierres tombales servent à reconstruire des maisons. On sort de Lune de miel chamboulé.
Sophie Benamon

UN HAVRE DE PAIX
★★★☆☆
De Yona Rozenkier

Ce premier long met en scène les retrouvailles de trois frères qui enterrent leur père dans le kibboutz de leur enfance, alors que le plus jeune doit partir dans quelques jours faire la guerre à la frontière libanaise. Mais gare aux apparences ! Ce projet très personnel (Yona Rozenkier l’interprète avec ses propres frères et a tourné dans le kibboutz où ils ont grandi) ne se résume pas à un énième film sur Israël en guerre. Son propos, bien plus universel, pointe les dommages collatéraux créés par cette société de la virilité à tous crins qui n’envisage le quotidien que par la seule loi du plus fort, jusqu’à souhaiter aux autres les mêmes souffrances (le traumatisme du front) qu’on a soi-même douloureusement vécues. Le tout sans se poser en donneur de leçons manichéen grâce à un équilibre savamment orchestré entre burlesque et tragédie.
Thierry Cheze

SILLAGES
★★★☆☆
De Léa Rinaldi

Depuis quarante ans, la Mini Transat est un défi réservé aux casse-cou, une course en solitaire où il s’agit de relier à bord d’un voilier de 6,50 mètres, sans autre moyen de communication qu’une VHF, la France aux Antilles. À la fois voyage initiatique, laboratoire d’innovations technologiques et écurie de talents, c’est l’un des mythes de la voile contemporaine. Mais comment filmer cela, alors que les navigateurs ne sont confrontés qu’à des choses anti-spectaculaires (pétole, creux de vagues infilmables et solitude extrême) ? Réponse dans ce documentaire passionnant qui suit Ian Lipinski, voileux surdoué, pendant deux éditions successives. On découvre les doutes du skipper, ses craquages, ses avanies, ses rêves, la solidarité entre les marins et la rivalité qui suit l’euphorie de l’escale, le tout rythmé à la perfection et avec quelques moments de vrai cinéma.
Pierre Lunn

 

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

GRETA★★☆☆☆
De Neil Jordan

Neil Jordan fait partie des cinéastes majeurs qui ont « esthétisé » le thriller dans les années 90. Avec The Crying Game ou Entretien avec un vampire, le réalisateur irlandais a marqué le cinéma mondial. Il se fait plus rare depuis quelques années, victime, comme tant d’autres, du tournant de Hollywood vers les blockbusters familiaux. Il nous revient avec un pur film de genre qui met face à face deux femmes. Frances (Chloë Grace Moretz) est une jeune fille perdue depuis la mort de sa mère. Elle trouve un sac luxueux dans le métro et décide de le rapporter à sa propriétaire. Élégante et mystérieuse, cette dernière, Greta (Isabelle Huppert), la remercie et l’invite à prendre le thé. Le piège s’est refermé. Avec ce pitch qu’on pourrait croire emprunté à un conte, Neil Jordan ne cache jamais ses intentions. Tout son art consiste à faire rôtir le spectateur sur son siège à coups d’effets discrets dans l’attente du où et du quand. Chloë Grace Moretz apporte à la jeune fille une modernité qui la fait échapper au stéréotype de l’innocente et naïve victime. Greta porte en elle tous les personnages tordus qu’Isabelle Huppert a déjà interprétés chez Chabrol, Haneke ou Verhoeven. Mais c’est précisément là que le film trouve sa limite. La comédienne est tellement associée aux rôles effrayants qu’elle ne surprend presque plus dans l’horreur. Et l’affrontement final entre les deux héroïnes en pâtit évidemment beaucoup. Ce retour de Neil Jordan n’est donc pas totalement gagnant.
Sophie Benamon

ZOMBI CHILD 
★★☆☆☆
De Bertrand Bonello

Il y a des films qui donnent tout, tout de suite (Sibyl ce mois-ci, par exemple), d’autres qui s’envisagent comme des matières plus ou moins dormantes où les choses se cristallisent après coup. En l’espèce, Bertrand Bonello, réalisateur de films de cette seconde catégorie (De la guerre, Nocturama...), s’attaquant à une histoire de morts-vivants paraissait logique. La grâce de sa mise en scène flottante et charnelle n’empêchait pas sur le papier le gore de surgir. Nous voici à Haïti dans les années 60. Un homme tombe en pleine rue. Très vite, un cercueil et une procession. La caméra se place dans le noir tombeau. Le mort est vivant. Pénombre. L’homme sorti de terre devient un être soumis. Sans transition, un panoramique montre des lycéennes vaguement somnolentes pendant un cours sur le sens du mot « révolution ». France, de nos jours, lit-on. Nous sommes dans un pensionnat de jeunes filles bien nées. Jacques Tourneur voire Wes Craven d’un côté. Sofia Coppola ou Peter Weir de l’autre. Quelque chose infuse d’un territoire à l’autre. Quoi au juste ? Une croyance ? Une malédiction ? Un sacrifice ? L’une des lycéennes est la petite-fille du zombi haïtien. Un zombi plus mélancolique qu’affamé qui vient corriger la figure de pop star généralement accolée à ladite créature (cf The dead don’t die). La mise en scène capte une atmosphère qu’on aimerait toutefois plus envoûtante et forcément un peu plus dévorante. L’emprise des ténèbres – pour paraphraser le titre d’un bon film de Wes Craven sur la question – n’a malheureusement pas vraiment lieu.
Thomas Baurez

CHARLOTTE A 17 ANS 
★★☆☆☆
De Sophie Lorain

Il y a de l’énergie à revendre dans ce teen movie venu du Québec. Et une volonté affirmée de donner la parole aux jeunes femmes (les adultes y sont absents et les garçons confinés aux seconds plans) dans un genre où elles sont souvent réduites au simple rôle de la « petite amie ». À commencer évidemment par la Charlotte qui lui donne son titre : une ado qui, pour guérir d’une peine de coeur (son premier amour lui a avoué son homosexualité), décide de multiplier les expériences sans se soucier du qu’en-dira-t-on. Joyeusement amoral, Charlotte a 17 ans se nourrit de l’abattage de son interprète principale, Marguerite Bouchard. Mais l’obsession de la légèreté de sa réalisatrice et son parti pris de rester à la surface des choses constituent aussi ses limites : son énergie comme ses choix artistiques (pourquoi ce noir et blanc ?) tendent à devenir crispants sur la longueur.
Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

11 FOIS FÁTIMA ★☆☆☆☆
De Joao Canijo

C’est un film choral en mouvement : onze femmes du même village du nord du Portugal se lancent dans un périple pédestre de 400 kilomètres vers Fátima, haut lieu de pèlerinage catholique. La route est longue... et le film tout autant ! Car vite dépassé par le nombre de personnages à embrasser, le Portugais Joao Canijo rate sa phase d’introduction et ne permet jamais vraiment de s’attacher à elles, s’obligeant par la suite à forcer le trait pour susciter de l’émotion. Sauf dans sa dernière ligne droite, entièrement située dans le Sanctuaire où, enfin, leurs échanges et autres altercations prennent fin et la caméra de Canijo capte juste la ferveur suscitée par le lieu de culte. Saute alors aux yeux – mais trop tard – que devant la faiblesse de la part fictionnelle du récit, un documentaire sur le même sujet aurait été plus approprié.
Thierry Cheze

 

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