Timbuktu d'Abderrahmane Sissako
Le Pacte

France Ô diffuse ce mardi, dans le cadre de l’émission 1 dose de ciné, Timbuktu d’Abderrahmane Sissako. Un drame sur un pays pétrifié par l’islam radical. A voir absolument.

Attention chef d’oeuvre ! Il y a cinq ans, en mai 2014, le festival de Cannes dévoilait Timbuktu d’Abderrahmane Sissako. Les spectateurs étaient figés d’émotion devant le drame de ce village tombé sous le joug des extrémistes. Beaucoup rêvaient de le voir au Palmarès et dénoncèrent son absence. Quelques mois plus tard, le film reçut sept César dont celui de meilleur film et de meilleur réalisateur. C’est une belle revanche pour Abderrahmane Sissako. Ce mauritanien d’origine a fait de l’exil le thème central de son œuvre. Installé en France depuis les années 1990, il dessine peu à peu une filmographie poétique et politique. En 1998, c’est au Mali dans le village de son père qu’il tourne La Vie sur terre. Suivent  En attendant le bonheur (2002) et Bamako (2006). Avec Timbuktu, il signe un film ambitieux qui résiste aux excès du djihadisme avec une œuvre d’art.

 

Dénoncer l’obscurantisme avec la lumière

L’histoire se déroule près de Tombouctou. Un berger touareg, Kidane mène une vie simple et paisible dans les dunes, entouré de sa femme Satima, de sa fille Toya et de don fils Issan. En ville, l’islam radical a pris le pouvoir. Peu à peu, les restrictions de liberté se font plus pressantes. Il est interdit de jouer de la musique, de fumer, de rire et même de jouer au football. Pour autant, sous ce régime de terreur, des individus tentent de résister : les femmes gardent des secrets, les jeunes miment une partie de foot sans ballon. Et puis, un jour Kidane est lui aussi pris dans l’engrenage des nouvelles lois et de l’ignorance des bourreaux.

La beauté de ce film tient dans l’opposition entre les deux mondes : celui qui célèbre la beauté de la nature et de l’art et celui qui s’y oppose. Aux images magnifiques du berger libre dans ses dunes, Sissako oppose la bêtise des djihadistes aveugles au monde qui les entoure. Le réalisateur les dépeint comme des pleutres, des menteurs et des arrivistes, se réjouissant de leur justice expéditive. Leur combat est ainsi vidé de son sens. Il n’est plus question de religion ici, mais de pouvoir et de coups bas. Timbuktu c’est aussi une ode à la résistance, à ces petits gestes qui font que l’esprit survit dans la rébellion face à l’oppression.

Le triomphe aux César de Timbuktu

Le combat d’une femme

Timbuktu c’est aussi le combat d’une femme, Sylvie Pialat, pour monter ce film à tout prix. La productrice a d’ailleurs été en outre récompensée par le Prix Daniel Toscan du Plantier pour son travail sur ce film en 2015. C’est sur une rencontre et trois pages d’idées que Sylvie Pialat a dit oui à Abderrahmane Sissako. Ce-dernier avait d’abord pensé faire de Timbuktu un documentaire. La productrice n’avait jamais mis les pieds dans le désert mauritanien, mais elle sentait chez son interlocuteur un besoin impératif de tourner cette histoire. Quelques mois plus tard, il revient avec un scénario de 64 pages et décroche les autorisations pour tourner à Tombouctou. Un attentat les oblige à ajourner le tournage au Mali. C’est finalement en Mauritanie, sous la protection de l’armée, qu’il filme une histoire universelle . Il fait bon de la voir encore aujourd’hui.

 

Timbuktu est diffusé sur France Ô le mardi 14 mai 2019 à 20h55.