Goldeneye
MGM

A l'occasion de la rediffusion de GoldenEye, ce soir sur France 2, retour sur un projet hollywoodien avorté.

De toutes les pièces du puzzle des cinquante ans de James Bond, le script original de Michael France pour GoldenEye est la clé de voûte de la ré-imagination du personnage pour le XXIe siècle, le Rosebud de la série, une bible que les fans s'arrachent sous le manteau sur le web.

Mai 1993. Après une pause de quatre longues années, liée aux problèmes légaux et financiers de la MGM, la pré-production de Bond 17 commence enfin, avec l'annonce de l'embauche du scénariste Michael France pour la rédaction du premier draft de ce qui deviendra GoldenEye. Côté casting, Pierce Brosnan n'est pas encore de mise, et c'est toujours Timothy Dalton qui est envisagé dans le rôle titre.


James Bond : tous les films classés du pire au meilleur

Rendu aux producteurs en janvier 1994, le script de 156 pages (!) raconte la lutte de Bond contre Trevelyan, ancien chef du MI6 passé à l'est avant la chute du mur, dont l'objectif est désormais de subtiliser 600 milliards de dollars au stock exchange de New York, et faire sauter le World Trade Center pour couvrir ses traces. Un million de morts potentiels ? "Juste de la poussière sur le globe, James". New York sera "engloutie par les flammes dans une attaque terroriste", et Trevelyan utilisera à son avantage la chute de la bourse après l'attentat, pour augmenter encore plus son profit.

Visionnaire, le scénario regorge de scènes d'action incroyables et démesurées : le pré-générique se déroule à bord d'un train à grande vitesse, où Bond repère un espion déguisé en serveur et se lance à sa poursuite, jusque sur le toit, où un hélicoptère commandité par les méchants se mêle de la partie. Description familière ? Il s'agit effectivement du final de Mission: Impossible de Brian de Palma, avec Tom Cruise... sauf que ce dernier ne sera réalisé que deux ans plus tard. Une différence majeure : Bond utilise son Aston Martin, qu'il conduit sur le toit, et propulse contre l'hélicoptère, pour un dénouement explosif ! Ailleurs, Bond, en skis, est poursuivi par un autre hélico équipé d'une scie circulaire géante (scène qui sera réadaptée dans Le Monde ne suffit pas en 1999), et enfin, une poursuite le montre à cheval en milieu urbain, (c'est avant la sortie de True Lies la même année), au cours de laquelle il échappe à ses ennemis en parcourant un lac gelé, où la glace menace de craquer. Les spectateurs de Skyfall verront l'analogie.

40 ans de blockbusters hollywoodiens : GoldenEye (1995)

Clairement écrit pour Timothy Dalton (le général Pushkin, vu pour la dernière fois dans Tuer n'est pas Jouer en 1987, est aussi de la partie), ce script, jugé trop cher et irréalisable, provoquera son départ de la série, et sera entièrement remanié pour Pierce Brosnan, Michael France ne récoltant au final qu'un crédit d'auteur de l'histoire du film. Il est cependant la clé de voûte manquante à la ré-imagination du Bond moderne, de nombreuses idées abandonnées (le profit réalisé au stock exchange suite à un attentat, le combat sur le toit du train) ayant été recyclées jusque dans les derniers films avec Daniel Craig.
David Fakrikian  

A lire aussi :

Casino Royale par Quentin Tarantino  Pierce Brosnan dans Tuer n'est pas jouer