En avant (2020)
Disney

A cause du coronavirus, le box-office américain a connu son plus bas niveau ce week-end depuis 22 ans.

55,3 millions de dollars : c'est la somme engrangée par la totalité des films distribués sur le territoire américain ce week-end. Une somme équivalente au démarrage d'un blockbuster (par exemple : Sonic le film démarrait à 58 millions le 14 février dernier). La dernière fois que le box-office américain a connu un total aussi faible, c'était le week-end du 30 octobre 1998, d'après Deadline, lorsque Vampires de John Carpenter démarrait en première position avec 9 millions de dollars. Ce week-end fatal de 2020 connaît une baisse de 85% par rapport au même week-end l'an dernier, alors que Captain Marvel régnait sur le monde. L'explication est simple : le coronavirus, qui a poussé le public à déserter les salles, qui de toutes façons commencent à fermer (comme à Los Angeles) ou à réduire au maximum leur capacité d'accueil. Avec cette plongée du box-office, le décalage de sorties de très gros films comme Mourir peut attendre, Mulan et Fast & Furious 9, l'année 2020 sera bien celle d'un tournant à Hollywood. Tout va changer, mais comment ? Les deux films en tête du box-office ce week-end s'appellent En avant et J'y crois encore : on ne fait pas du mauvais esprit, c'est la même chose en VO : Onward et I Still Believe. Il y a parfois de drôles de coïncidences.

Bref, En avant parvient tout de même à récolter 10,5 millions de dollars pour son deuxième week-end. Cela aurait pu être pire, vu le contexte. Le dernier Pixar a gagné 60,2 millions aux Etats-Unis, pour un total mondial de 101,6 millions. Ce pauvre En avant, victime du virus, risque bien de réaliser le moins bon score au box-office de toute l'histoire de Pixar : jusqu'ici, ce titre était détenu par Le Voyage d'Arlo (332,2 millions dans le monde, dont 123 millions aux USA), sorti fin 2015.

J'y crois encore récolte 9,5 millions de dollars au démarrage. Cette comédie dramatique et romantique raconte l'histoire (vraie) de Jeremy Camp, un chanteur de rock chrétien, et de sa relation avec sa fiancée (Britt Robertson de A la poursuite de demain) atteinte d'une maladie incurable. C'est un film religieux (genre très rentable aux USA), réalisé par les frères Erwin, auteurs de La Voix du pardon en 2018 : un autre film de rock chrétien qui avait cartonné, rapportant 86 millions pour seulement 7 de budget. Avec les profits de ce film, les frères Erwin ont fondé leur propre studio, Kingdom Story Company, dont J'y crois encore est le premier bébé. Ils ont quatre films en projet jusqu'en 2021, dont deux sur Jésus et un sur le grand quaterback (chrétien) Kurt Warner prévu pour Noël 2020. Tout ça pour dire que J'y crois encore (qui doit sortir en France le 6 mai, si tout va bien), a coûté 12 millions de dollars et on ne sait pas s'il parviendra à se rembourser, vu le contexte.

Sony sortait ce week-end le film d'action Bloodshot, avec Vin Diesel en marine mort puis ressuscité à l'aide d'une nanotechnologie le dotant de super-pouvoirs bien bourrins. Résultat : 9,3 millions de dollars au démarrage, 200 000 dollars de moins que J'y crois encore. Les critiques n'arrivent pas à s'enthousiasmer pour ce film réalisé par Dave Wilson, membre du studio Blur de Tim Miller, qui avait pourtant signé des bande-annonces de jeux vidéo démentes. Si vous ne nous croyez pas, regardez un peu celle-ci, pour Star Wars : The Old Republic - Knights of The Eternal Throne. Vous aussi, vous donneriez 45 millions de dollars à son réalisateur pour faire un long-métrage, pas vrai ? Bloodshot est adapté d'un comics édité par le label Valiant, fondé par un ex de Marvel en 1989, qui a signé un deal avec Sony pour adapter cinq de ses BD (comme Harbinger, gros succès façon X-Men au début des années 90) en films au sein d'un cinematic universe. A condition, évidemment, que Bloodshot soit un succès. Autant dire que cela semble compromis.

Alors qu'Invisible Man avec Elisabeth Moss rapporte 6 millions pour son troisième week-end, pour un total américain de 64 millions) une autre production Jason Blum sortait enfin en salles : The Hunt devait initialement sortir en septembre 2019, mais suite aux massacres commis en août aux USA, Universal a décidé d'interrompre la promo du film et de le sortir le vendredi 13 mars. Trop sensible : le film raconte comment des Américains moyens sont traqués et tués façon Les Chasses du comte Zaroff par des millionnaires hipsters. Co-écrit par Damon Lindelof, The Hunt est réalisé par Craig Zobel, auteur de certains des meilleurs épisodes de The Leftovers et du joli petit huis-clos post-apo Z for Zachariah -Les Survivants en VF- avec Margot Robbie, Chiwetel Ejiofor et Chris Pine. Et le film ne rapporte que 5,3 millions au démarrage, alors qu'il en aurait coûté 14, près du double par rapport à une production Jason Blum standard. Impossible de savoir si le film aurait mieux marché dans un contexte sans coronavirus.

Et que réserve le futur dans les salles américaines ? Le 20 mars sort The Climb de Michael Angelo Corvino (qu'on avait adoré à Cannes 2019) et Le Daim de Quentin Dupieux. Outre la ressortie de Braveheart le 22 mars pour ses 25 ans (alors que le film était sorti le 24 mai aux USA, allez savoir), les grosses sorties ont abandonné les salles. Il y a aura quelques films d'animation dérivés de franchises par-çi par-là (un film Steven Universe le 23 mars, un nouveau film Digimon le 25 mars). Le paysage du cinéma US encaisse le choc à court terme. A quoi va ressembler l'avenir ? Il ne faut pas forcément croire aux prophéties eschatologiques. Les studios ont toujours de grands projets qui sortiront forcément en salles dans l'avenir. En avant ! On y croit encore.

Source : Le Film français

Box-office américain du 13 au 15 mars 2020 :
1) En avant
2) J'y crois encore
3) Bloodshot
4) Invisible Man
5) The Hunt