Guide du 5 février 2020
Gaumont Distribution / Warner Bros. France / SND

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVENEMENT

BIRDS OF PREY (ET LA FANTABULEUSE HISTOIRE DE HARLEY QUINN) ★★★☆☆
De Cathy Yan

L'essentiel
Un film de gang de filles explosif qui s’inspire de Tarantino, Ritchie ou Vaughn. Loin d’être parfait mais assez original et réjouissant.

Désormais, les adaptations DC Comics au cinéma se découpent en deux parties : d’un côté les films totalement déconnectés de toute continuité, comme Joker. De l’autre, un ersatz d’univers partagé, mort-vivant depuis que la catastrophe Justice League l’a laissé exsangue. Y survivent comme ils peuvent quelques héros, dont Aquaman (son film solo est sorti en 2018) et Shazam (2019), et désormais Harley Quinn, de retour dans Birds of Prey après une première apparition remarquée dans Suicide Squad en 2016.
François Léger

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PREMIÈRE A ADORÉ

#JESUISLÀ ★★★★☆
D’Éric Lartigau

Voilà déjà six ans, Éric Lartigau signait avec La Famille Bélier un de ces succès phénomène de société dont le cinéma français est coutumier. Six ans comme le temps indispensable pour parvenir à enchaîner sans perdre de vue une ligne de conduite qu’il tient depuis son tout premier long métrage (Mais qui a tué Pamela Rose ?), voilà près de vingt ans. Car Éric Lartigau dénote dans un petit monde largement dominé par le culte du cinéaste-auteur.
Thierry Cheze

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THE GENTLEMEN ★★★★☆
De Guy Ritchie

Après plus de dix ans d’errance, excepté le solide diptyque Sherlock Holmes, Guy Ritchie revient à ses premières amours : le film de gangsters choral et furibard. Un retour que l’on n’attendait plus. Ça faisait une sacrée paye qu’on n’avait pas eu de ses nouvelles en direct des bas-fonds londoniens où sévit la petite criminalité à l’accent cockney. Ces combinards poissards, grotesques mais attachants s’évertuant à foirer leur business plan pour quelques billets dont ils ne verront jamais la couleur.
François Rieux

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LA CRAVATE ★★★★☆
De Mathias Théry & Étienne Chaillou

Que cache donc ce titre un peu blague qui évoque une comédie de Francis Veber ? « La cravate » est ici synonyme de respectabilité. Quand Bastien, 20 ans, gueule ronde à peine sortie de l’enfance, l’attache, il entre dans la cour des grands. On le sent un peu gourd dans son costume, lui, l’habitué du sweat baggy qu’il enfile pour ses parties de Laser Quest, la deuxième passion de sa vie. La première ? Le militantisme, et pas n’importe lequel : celui d’extrême droite, celui qui vous stigmatise. Arrêt prématuré de l’école, fâcherie avec les parents, difficultés pour trouver un travail... Les idées rances, ça fait tache sur un CV. En réagissant face caméra au texte de la voix off racontant son histoire que lui soumettent les réalisateurs, Bastien joue quitte ou double. « Ça va changer ma vie ou pas ? », se demande-t-il dans un sourire. Avant de lâcher : « Est-ce que je suis un connard du coup ? » La réponse n’est pas simple. Tout comme le parcours de ce militant du Nord, politiquement actif depuis ses 15 ans, qui s’est trouvé au Front national une famille d’accueil dont il a rapidement gravi les échelons au niveau local. Alternant scènes sur le vif tournées lors de la dernière campagne présidentielle et témoignage à froid recueilli un an plus tard, La Cravate trace de façon édifiante le portrait d’un jeune homme ordinaire, intelligent, revanchard et prudent, parfaite incarnation de la « dédiabolisation » en marche de l’extrême droite. La cravate ne fait pas le moine. À moins que...
Christophe Narbonne

 

PREMIÈRE A AIMÉ

LA DERNIERE VIE DE SIMON ★★★☆☆
De Léo Karmann

À 8 ans, Simon, orphelin, a comme meilleur ami Thomas dont la famille respire la bienveillance. Au cours d’un jeu, Simon révèle à Thomas et à sa soeur Madeleine qu’il est capable de prendre l’apparence des gens qu’il a touchés. Peu après, le destin des deux garçons va basculer... Loin de nous l’idée de mettre la pression à Léo Karmann en le comparant aux grands maîtres (ce serait lui tailler un costume un peu trop large), mais il y a dans son premier film quelque chose de Shyamalan : un réalisme fantastique et une économie d’effets au service de l’émotion et de l’humanité véhiculées par des personnages à la croisée des chemins. D’aucuns nous rétorqueront qu’il n’a pas le choix – faute de moyens que le système français ne peut lui offrir – au contraire d’un Shyamalan qui a délibérément imposé sa patte et renouvelé la grammaire du cinéma de genre. Soit. En l’état, La Dernière Vie de Simon est une jolie proposition qui s’inscrit dans la lignée de Vincent n’a pas d’écailles, le film de superhéros minimaliste de Thomas Salvador. Dans les deux cas, le pouvoir surnaturel ne sert pas une cause ou un dessein mais à combler un manque, en somme à s’accomplir. Ça change tout, en premier lieu la nature du film où l’humilité remplace l’héroïsme, où la tendance est à l’effacement plutôt qu’à la mise en avant. Parfaits d’ambivalence, Benjamin Voisin et Martin Karmann sont presque éclipsés par Camille Claris, la jeune femme par qui le romanesque arrive.
Christophe Narbonne

ADAM
★★★☆☆
De Maryam Touzani

On a découvert Maryam Touzani dans Razzia qu’elle avait coécrit avec Nabil Ayouch. Mais avant de passer devant la caméra, elle avait oeuvré derrière avec des courts. Et se retrouve ici aux commandes de son premier long qui raconte l’amitié entre une veuve, mère d’une fillette, tenant une pâtisserie à Casablanca, et une célibataire enceinte, espérant faire adopter son bébé à la naissance, venue frapper à sa porte pour trouver un travail. Deux femmes que tout oppose et dont la méfiance l’une envers l’autre va se fragmenter au fil des jours. En douceur. Et c’est bien là tout le talent de Maryam Touzani : signer une œuvre politique engagée sans marteler les choses. En faisant de cette amitié le cœur du récit par lequel s’exprime sa critique de la société patriarcale marocaine et non l’inverse. On en ressort ému et épaté par son duo de comédiennes : Lubna Azabal et Nisrin Erradi.
Thierry Cheze

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

SAMSAM ★★☆☆☆
De Tanguy de Kermel

Au départ, il y a une BD créée par Serge Bloch pour le magazine Pomme d’Api, devenue en 2007 une série d’animation signée Tanguy de Kermel. Et douze ans plus tard, les aventures de SamSam débarquent pour la première fois au cinéma sous la direction du même réalisateur. SamSam, fils de superhéros, s’y désole de n’avoir pas découvert son superpouvoir, à la différence de tous ses copains d’école. Il va alors partir à sa recherche en faisant fi des dommages collatéraux que cela peut entraîner pour sa communauté, soudain sous la menace d’un monstre cosmique à la croissance exponentielle. Soyons clairs : ce n’est pas Les Indestructibles et les adultes n’y trouvent pas vraiment leur compte. Mais la vivacité colorée de l’ensemble, le talent à s’adresser aux plus petits sans discours abêtissant et la tendresse jamais mièvre de ces péripéties finissent par emporter le morceau.
Thierry Cheze

BAYALA, LA MAGIE DES DRAGONS
★★☆☆☆
De Federico Milella & Aina Järvine

Au royaume de Bayala, divisé entre plusieurs peuples elfes ailés et magiciens, la princesse Surah et ses compagnons emmènent un oeuf de dragon à la recherche des parents du futur bébé. Sauf que la reine des Elfes des ombres convoite également l’oeuf... Au premier abord, Bayala part mal : l’animation de cette épopée de fantasy est assez rigide (elle vise un certain réalisme), l’histoire est compliquée, les chansons tentent de copier celles de Disney (sans réussir). Pourtant, il s’en dégage un certain charme (très) juvénile, grâce à son scénario inventif et ses amusants seconds rôles, comme le bébé dragon dans sa coquille ou un raton laveur évidemment facétieux. Au fond, des films comme Bayala démontrent qu’on aurait bien besoin de critiques de moins de 7 ans à la rédac.
Sylvestre Picard

SOUMAYA
★★☆☆☆
D’Ubaydah Abu-Usayd et Waheed Khan

L’intention d’Ubaydah Abu-Usayd et Waheed Khan était louable : dénoncer l’islamophobie en France à travers le portrait d’une femme musulmane, licenciée du jour au lendemain de son poste de cadre dans une société de transport pour des motifs clairement douteux, en plein état d’urgence. Un sujet révoltant, d’autant plus quand on sait que le récit se base sur une histoire vraie. Dommage que le film soit desservi par un jeu d’acteur trop inégal, quelques personnages caricaturaux et une insistance sur le pathos agaçante, accentuée par plusieurs plans serrés sur le visage larmoyant d’une enfant sur fond de musique triste.  
Julia Mothu

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

NOTRE-DAME DU NIL ★☆☆☆☆
D’Atiq Rahimi

En portant à l’écran le roman d’une autre (le prix Renaudot 2012 de Scholastique Mukasonga), Atiq Rahimi semble avoir perdu tous ses repères. Oubliée la maîtrise implacable de Syngué Sabour. Dès les premiers plans, peuplés de ralentis inutiles, on perçoit son parti pris voué à l’échec : apporter de la joliesse dans un monde brutal et ramer à contre-courant de ce portrait d’un institut catholique formant de jeunes Rwandaises à devenir l’élite du pays. Située en 1973, l’action décrit les tensions entre Tutsis et Hutus qui trouveront leur apogée lors d’une sanglante guerre civile vingt ans plus tard. Mais à multiplier les personnages, Rahimi est soudainement forcé d’en zapper certains pour que tout tienne en 90 minutes. La dernière ligne droite, aux ellipses maladroites, en vient même à brouiller la compréhension. Souci de scénario ? Erreurs de montage ? Son premier loupé.
Thierry Cheze

AQUARELA – L’ODYSSÉE DE L’EAU
★☆☆☆☆
De Victor Kossakovsky

Un homme, puis deux, penchés sur une immense étendue glacée. Que font-ils ? Un autre tombe à l’eau. On dirait du Tati. S’ensuit le treuillage d’une voiture immergée, on ne sait pas trop pourquoi. Va-t-on découvrir des conducteurs gelés à l’intérieur ? Même pas. Le principe d’Aquarela ne saute pas aux yeux. On ne sait pas où l’on est (on le découvre en lisant le dossier de presse : il s’agit du lac Baïkal, en Russie), ni avec qui, ni pourquoi. Ça continue. Le documentaire aligne maintenant des images impressionnantes de fonte des glaces. Aucun commentaire, au spectateur d’imaginer le discours écolo présumé de Victor Kossakovsky, qui filme aussi l’ouragan Irma et les chutes du Salto Ángel, au Venezuela. Un documentaire sur « la force de l’eau dans tous ses états » qui fait plouf.
Christophe Narbonne

LE CŒUR DU CONFLIT
★☆☆☆☆
De Judith Cahen & Masayasu Eguchi

Une Française, un Japonais. Un couple. Les deux réalisateurs, Judith Cahen (La Croisade d’Anne Buridan) et Masayasu Eguchi mêlent l’intime à leur questionnement artistique et nous proposent de les suivre entre Paris, Fukushima et Hiroshima. Est-il encore possible de concevoir (au sens propre comme au figuré) dans un environnement où le nucléaire annonce la fin du monde ? Peut-on boire le thé dans une théière fabriquée à Fukushima ? Le problème de ce journal intime et politique est qu’il embrasse trop de problématiques et offre des réponses par trop comiques ou surréalistes. On a rapidement le sentiment d’assister, en voyeur, à une conversation sans queue ni tête. Le sujet aurait mérité plus de rigueur et l’apport de points de vue extérieurs au duo.
Sophie Benamon

Et aussi
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Reprises
L’homme du sud de Jean Renoir