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Que vaut le dernier blockbuster Disney/Marvel ?

Vous connaissez l'histoire : Disney/Marvel sort avec une qualité et un succès remarquablement constants trois blockbusters par an ("serialized entertainment", résume le critique Justin Chang dans le Los Angeles Times), avec comme points de rassemblement les films Avengers agrégeant le maximum de superhéros. Voilà donc le très attendu Infinity War, la réunion de la promo 2018 : depuis L'Ere d'Ultron en 2015, il s'en est passé des choses, avec le recrutement de petits nouveaux comme Spider-Man, Doctor Strange et Black Panther.

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La promesse est surtout de mettre enfin en scène le grand méchant suprême Thanos, teasé par la scène post-générique du premier Avengers. Désireux de rassembler les six Pierres d'Infinité -des joyaux aux pouvoirs divins dispersés à travers les dix-huit films précédents du MCU- Thanos, à la tête d'une armée d'aliens, va devoir affronter à peu près tous les superhéros du catalogue pour essayer d'accomplir son but. Le principe est connu, mais Josh Brolin apporte une personnalité assez incroyable à Thanos, grâce à un déguisement numérique suffisamment léger (bien que Josh soit quand même transformé en colosse imberbe, violet et prognathe) pour laisser irradier sa performance, son puissant charisme tragique de génocidaire rêveur. La principale attraction du film, sans conteste. Mais Infinity War doit surtout gérer un nombre incroyable de super-personnages, dont les personnalités semblent trop écrasantes pour s'exprimer avec la même aisance que dans le premier Avengers, boosté à l'excitation pure de Whedon. Le balourd L'Ere d'Ultron était déjà incapable de retrouver ce miracle de storytelling ; Infinity War est beaucoup plus réussi mais reste long et pesant, comme figé par la gravité de Thanos ; répétitif, même, parfois redondant.

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Oh, ne vous méprenez pas : Infinity War assure le show, et compose quelques très belles séquences massives, mais on est à des années-lumières du dynamisme incroyable du premier Avengers. La proposition de cinéma n'est plus la même : il faut conclure un univers et non plus le construire. La tragédie devient trop écrasante. Infinity War est sans doute trop étiré, se déroulant aux dimensions de la galaxie, laissant vite tomber New York pour les paysages tripants du space opera façon Gardiens de la Galaxie. Qui sont là, évidemment, et achèvent après Thor : Ragnarok de faire basculer le MCU dans un univers un peu toc, loin des territoires psyché-rigolos (Doctor Strange), utopiques (le Wakanda de Black Panther) ou sympathiquement familiers (la Côte Est de Spider-Man : Homecoming). Le vrai problème d'Infinity War est que l'on y bavarde tout de même beaucoup au long des 2h29 du métrage, surtout coincés dans des cockpits de vaisseaux spatiaux à se demander avec quel calibre botter le cul de Thanos. De fond vert en fond vert, l'action semble également prisonnière de la gravité : après une séquence d'ouverture carrément bluffante à New York, les combats suivants se ressemblent trop dans leur écriture et leurs enjeux pour ne pas lasser (c'est Alexander Witt à la réalisation seconde équipe, et non plus nos chouchous de John Wick, David Leitch et Chad Stahelski comme sur Le Soldat de l'hiver ou Civil War). Mais il suffit que Thor -le vrai héros du film, essentiel à sa dramaturgie- débarque pour écraser tout le monde, volant le show aux stars visiblement fatiguées comme Robert Downey Jr. ou Chris Evans. En fin de compte, Infinity War vaut tout de même le prix du billet mais finit par subir le poids de sa propre gravité. Le film ne souffre pas du tout, par contre, de sa fin en forme de cliffhanger plus ou moins (suivant votre degré de confiance en l'audace industrielle de Marvel) insoutenable. Car la suite, Avengers 4, débarque fin avril 2019. Pas de doute, on sera là. On sera toujours là. En espérant que la gravité ne gagne pas, cette fois-ci.