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Une semaine avant la sortie de son film événement, Alice au pays des merveilles, Premiere.fr a rencontré Tim Burton.Son Alice au pays des merveilles explose le box office américain ; il vient d'être décoré par la France ; il sera le président du festival de Cannes 2010 : depuis quelques semaines, Tim Burton est le centre de la planète cinéma. On avait donc quelques questions à lui poser. Notamment sur son dernier film et sur son acteur fétiche Johnny Depp.... Cette histoire a été racontée mille fois, même sans devoir porter le titre d’Alice au Pays des merveilles. Pourquoi y revenir ?Tim Burton : Ce qui me fascine chez Alice, ce sont les images iconiques générées par ces deux livres et la force avec laquelle elles ont imprégné la pop culture. J’en sais probablement plus sur Alice en ayant écouté des groupes ou visité des expos qu’en ayant lu Lewis Carroll. L’histoire en elle-même est très linéaire, elle court d’une borne A à une borne B sans dynamique narrative réelle. C’est ce qui a toujours manqué aux autres versions filmées selon moi : on y voit des personnages plus tordus les uns que les autres, qui défilent sous vos yeux, sans fondation pour les soutenir. « Tiens c’est bizarre, oh c’est étrange, mince c’est étrangement bizarre ». Les personnages d’Alice sont tous excentriques, je voulais simplement donner un contexte à leur folie. Il s’agit d’un scénario original inspiré de Lewis Carroll, pas d’une adaptation. Une suite ?T.B. : Encore une fois, les bouquins sont un amalgame d’histoires et de personnages qui se croisent arbitrairement. Le but était d’utiliser tous les repères connus (la Reine Blanche, le lapin, le chat de Cheshire) pour inventer un itinéraire qui nous serait propre. Notre Alice a 19 ans, un âge intermédiaire où l’on se sent à la fois jeune et vieux. Et elle retourne dans le royaume magique de son enfance pour faire le tri de ces émotions nouvelles. D’une manière générale, votre travail revisite toujours des œuvres existantes. Pourquoi d’après vous ?T.B. : C’est intéressant, je ne sais pas… Je dois être, moi aussi, le produit de mon éducation. Plus jeune, je n’étais pas branché littérature mais j’adorais les films. Je suis définitivement de cette génération qui a grandi avec l’image et essaye aujourd’hui de comprendre ce qu’elle a vu. Travailler avec un matériau qu’on connaît sur le bout des doigts, qui a eu un impact aussi fort sur vous, est une autre manière d’ouvrir son imaginaire et de laisser les idées remonter à la surface. Mais ce n’est pas un choix conscient de ma part. Je ne m’assois pas avec un vieil exemplaire de TV Guide en pensant : ‘Mmm, voilà ! ‘Sanford and Son’, c’est ce que je regardais quand j’étais petit, je vais l’adapter en film !’ Pourquoi la 3D ? Et pourquoi ce rendu visuel à mi-chemin du dessin animé ?T.B. : Ce n’est pas comme si personne ne pouvait faire Alice au pays des merveilles avant aujourd’hui. Il n’y a pas de bonnes et de mauvaises manières d’utiliser la technologie au cinéma ; il n’y a que les exigences spécifiques du film sur lequel vous bossez. On a commencé par évoquer différentes techniques avant de s’arrêter sur ce mélange de prises de vues réelles et d’animation, de sorte qu’on utilise les traits réels des acteurs tout en les déformant à volonté. Qu’est-ce je peux dire ? Quand je ferme les yeux et que je pense à Alice au Pays des merveilles, voilà à quoi ça ressemble. Johnny Depp est devenu un élément essentiel de votre cinéma. Une muse ?T.B. : Un morceau de viande que je peux modeler à ma guise ! Et pour un film où les acteurs jouent la comédie dans le vide et doivent constamment faire appel à leur imagination, vous ne voulez pas de « method acting », vous voulez de l’exubérance, vous voulez de l’impro. Vous voulez Johnny Depp.